S’il est donc faux de dire que rien dans les deux premiers chapitres ne prépare l’auditoire à ce qui va suivre 106 , parce que la mort et les spectres s’annoncent déjà, le texte ne l’y prépare que de façon fort discrète et allusive. Et tout souvenir du ‘Black Mate’ ne ferait que l’induire en erreur.
Car Burns n’est pas Johns. Johns l’autoritaire croyait aux fantômes. Burns le soumis ne croit qu’au fantôme, à celui de son précédent capitaine. Loin de s’occuper de considérations générales sur les superstitions, le récit cette fois analyse donc un rapport personnel entre un homme et un spectre identifiable, par la médiation d’un fantasme. L’autorité de ce spectre pèse en effet encore sur le second, qui ne peut que médire de lui mais ne peut se libérer de son emprise. Burns attendait d’une autre autorité (celle-là même qui a confié le commandement au narrateur) qu’elle règle le problème pour lui, mais c’est l’attitude la plus infantile qui soit : attitude qui puérilise Burns, et le place donc quasiment dans un rapport de fils à père avec feu son capitaine.
« The first two chapters of The Shadow-Line are a comic [?] red herring – the business with Hamilton, captain Giles, the Chief Steward of the Officers’ Sailors’ Home and Captain Ellis, the Master Attendant, has no bearing at all on the story of the young skipper’s struggle with the calm, the malaria and cholera, his predecessor’s villainy, the sceptical first mate and the heroic cook with the weak heart – but they heighten the reader’s expectations. » (Batchelor 1994, p.245)