Au début des années 1960, dans le cadre du « Groupe de Traitement de l’Information Cognitive » du laboratoire Lincoln, Murray Eden va se trouver par ailleurs aux côtés du théoricien des circuits, Samuel J. Mason. Dans sa thèse de 1952, ce dernier avait auparavant introduit une méthode d’analyse des circuits électroniques par le biais de « graphes de flux de signal » [« signal flow graphs »]. Un des problèmes que pose l’analyse du comportement des circuits électroniques est que leur traitement mathématique direct donne lieu à un grand nombre d’équations simultanées et couplées. L’idée de Mason avait donc été de subdiviser le circuit en sous-systèmes et de leur associer des diagrammes de flux. On pouvait alors passer d’une représentation dans le domaine temporel à une représentation dans le domaine fréquentiel où l’analyse et la combinaison en transformées de Fourier est mathématiquement plus simple à exprimer et à résoudre, au besoin avec des modèles probabilistes. C’est donc une approche empirique, probabiliste et de dissection pragmatique des phénomènes artificiels complexes tels que les circuits électroniques qui caractérisait l’approche de Mason.
Mais, à la fin des années 1950, Mason comme Eden se trouvent face à un « instrument de laboratoire » désormais finalisé qui est le TX-2. Et, l’un comme l’autre, essentiellement dans le cadre des projets militaires de reconnaissance d’écriture et de traduction automatique, mais aussi sans doute en partie sous l’impulsion des idées humanistes revendiquées par Mason, ils infléchissent leurs travaux vers les usages de ce genre de machine, sans oublier pour autant leurs attaches en théorie du signal et en théorie des circuits. Ils développent en effet l’idée de produire une machine à destination des aveugles 620 qui, couplée à un synthétiseur vocal, soit au préalable à même de lire et de reconnaître des textes écrits. Ils décident de se concentrer sur l’amont de cette machine (la partie reconnaissance de formes), puisque des synthétiseurs vocaux assez performants existent déjà et sont améliorés par d’autres équipes, et de fonder le « Groupe de Traitement de l’Information Cognitive ». Ce sera chose faite en 1961. À cette date, et de son côté, Eden réfléchit depuis déjà deux ans à la conception d’une machine assistée par calculateur numérique et qui soit à même de reconnaître toutes les écritures, même manuscrites, quelles que soient les déviances relatives de leurs formes.
Selon un historien officiel du MIT, Paul Penfield Jr., Samuel J. Mason était un homme très affable et doué d’un très fort sens de la compassion. Il appartenait ainsi à plusieurs sociétés d’aide et de charité. Voir [Penfield, P., 2000].