De la pollinisation au rendement : simuler pour discriminer les différents facteurs biologiques de la fructification

La connaissance des facteurs qui limitent la pollinisation des cacaoyers (rareté des « passages efficaces » de grains de pollen, raretés des amas de plus de 35 grains) n’est en fait qu’une partie de la connaissance nécessaire à une explication de la faiblesse et de la variabilité du rendement en fèves de cacao à l’hectare. À la différence de ce que l’on doit considérer pour le caféier, il faut ici tenir compte de la variabilité du nombre d’ovules par ovaire puis du taux de transformation des ovules en graines. Dans un article qui paraît en 1978, de Reffye, Parvais et Lucas poursuivent donc leur travail commun en s’adjoignant les services du généticien de l’IFCC G. Mossu. Alors que, pour le premier article de 1977 sur la pollinisation du cacao, de Reffye n’avait été que le deuxième cosignataire, il en est désormais le premier. Ce qui indique, d’après les pratiques habituelles de la revue Café, Cacao, Thé, qu’il en est le principal contributeur. De fait, cet article assez long (20 pages) manifeste un ample déploiement de modèles mathématiques de natures diverses. Ce travail frappe par la grande maîtrise dont il témoigne désormais dans l’insertion de ces modèles à des fins d’analyse biologique. Mais surtout, une particulière sensibilité mathématique aux diverses formulations équivalentes de ces modèles, à leurs conversions réciproques, à leurs combinaisons et à leurs inversions, nous fait penser que l’on a là affaire à un emploi des mathématiques qui n’est pas superficiel et de simple application. Comme ses articles précédents, de Reffye avance pas à pas des hypothèses de sous-modèles pour chacun des sous-processus négligés jusqu’alors dans les travaux d’analyse multivariée. Et, au travers de cette incontestable maîtrise mathématique, on sent une capacité à adapter en souplesse les modèles à la réalité mesurable, ou simplement supposée, de chacun de ces micro-événements biologiques qui mènent l’arbre à sa fructification.

Nous ne reprendrons pas ici le contenu de cet article en détail puisque le procédé d’analyse y est le même que précédemment. Mais nous allons tout de même donner une image de la façon dont les sous-modèles y sont d’abord introduits séparément puis rendus ensuite compatibles entre eux par le calcul ou par la simulation. Le but principal des auteurs est de partir de ce qui est pour l’heure mesurable à l’issue de la fructification, à savoir la distribution du nombre de fèves (ou de graines de cacao) par cabosse, pour tirer la structure mathématique sous-jacente des différents facteurs qui déterminent cette distribution finale. Cela leur paraît la seule manière d’évaluer précisément la contribution de chacun de ces facteurs. Il serait en effet assez vain de se lancer dans une entreprise de sélection génétique de clones de cacaoyers sans disposer d’une telle connaissance.

Or, on peut déjà supposer que ce n’est pas la forme globale, parce que finale, de la distribution du nombre de fèves par cabosse qui est directement déterminée génétiquement. Elle ne peut être considérée comme un caractère génétique en soi puisqu’elle est la résultante de divers micro-événements combinés, dont certains même sont aléatoires. L’hypothèse de travail de de Reffye et de ses collègues ici consiste donc à affirmer qu’il est possible de trouver une échelle à partir de laquelle on peut se représenter des micro-événements suffisamment « élémentaires » et susceptibles, en se combinant, de contribuer effectivement à la distribution finale mesurable. L’article que nous évoquerons ici procède alors en deux temps principaux. Tout d’abord, il se livre à ce qu’il appelle une « analyse logique » de la courbe globale de fréquence des fèves par cabosse. Ensuite, il propose l’organigramme et la liste du programme de simulation prolongeant l’analyse.