Un modèle non mathématique

Or, remarquons-le, comme il contient des étapes foncièrement hétérogènes (et choisies justement pour leur hétérogénéité relative !), il ne peut être un modèle formalisable mathématiquement. C’est en ce sens qu’il n’est en fait même pas un modèle au sens de Thom, puisqu’il n’est pas réductible à un modèle géométrique. Il reste donc un modèle certes dynamique (i.e. descripteur d’une historicité), mais purement verbal et graphique. Tout en étant rigide et assez formel, il se focalise sur quatre caractéristiques purement hétérogènes entre elles (d’où leur impossible quantification) mais botaniquement significatives et diversement exprimables par des « symboles graphiques » 1699 divers :

  1. le type de croissance (rythmique ou continue) ;
  2. la structure de ramification (présence ou absence de ramification végétative, ramification sympodiale ou monopodiale, ramification rythmique, continue ou diffuse) ;
  3. la différenciation morphologique des axes (orthotropie ou plagiotropie) ;
  4. la position de la sexualité (terminale ou latérale)[Barthélémy, D., Edelin, C. et Hallé, F., 1989], p. 90.

Un « modèle architectural » au sens de Hallé et Oldeman est donc entièrement défini lorsque l’on dispose d’une combinaison particulière de ces caractéristiques morphologiques et de leurs symboles graphiques afférents. Chaque combinaison rencontrée dans la nature (certaines ne le sont pas) a reçu le nom d’un botaniste connu. Ces 24 combinaisons sont déterminées par observation sur le terrain et par le suivi de l’activité des méristèmes 1701 .

C’est donc bien volontairement que le concept de « modèle » est choisi par Hallé et Oldeman : il est plus lâche que celui de « type » employé en taxonomie. Il est uniquement « fondé sur l’étude des structures et des fonctionnements méristématiques » et il est donc indépendant du type biologique des plantes 1702 . Or c’est précisément cette relative systématicité, cette prise en compte de la forme globale dans sa genèse, dans son historicité, et enfin cette faculté de réduire la variété architecturale à des combinaisons d’un petit nombre de règles élémentaires qui rend possible la convergence entre ce nouveau concept de la botanique et la méthode de modélisation fractionnée adoptée jusque là par de Reffye. C’est une modélisation qui enchaîne des séquences de choix et qui, à ce titre au moins, prête à une informatisation, a priori.

Notes
1699.

Selon l’expression de [Hallé, F., 1979], p. 538.

1701.

Par « enregistrement des étapes successives de la morphogenèse sous forme de croquis et de documents photographiques », [Hallé, F. et Oldeman, R. A. A., 1970], p. 5.

1702.

[Hallé, F. et Oldeman, R. A. A., 1970], pp. 9-10 ;