2.1.1. les différents types d’entrepreneurs

Nous avons vu que, pour Lachmann, les individus établissent des plans d’action en fonction de la représentation qu’ils se font de leur environnement. Autrement dit, l’interaction entre les différents participants au marché peut être décrite comme l’interaction de différents plans. Par conséquent, l’issue de cette confrontation ne peut pas être déterminée. Il existe donc une ‘« riche variété de circonstances qui peuvent donner naissance à des processus de marché »’ (1986, p. 5). Contre les économistes qui tendent à établir l’existence d’une tendance à la convergence des différents plans d’action, Lachmann (1986, p. 113) souligne « la variété des actions humaines ». Il entend ainsi rétablir le sens véritable du terme de « choix », celui-ci n’étant pas une simple sélection, mais l’œuvre d’une création. Dès lors, il explique : ‘« si nous voulons pouvoir démêler l’écheveau complexe de l’interaction entre les forces équilibrantes et déséquilibrantes et ne plus tenir pour acquis la suprématie constante des forces équilibrantes, nous avons besoin d’une classification des types d’entrepreneurs telle que les distinctions significatives se reflètent dans différents modes d’interaction »’ (1986, p. 125).

Avant de nous pencher sur les caractéristiques des différents types d’entrepreneurs, il nous faut revenir sur les fondements méthodologiques d’une telle distinction. Lachmann en effet, s’inspire ici largement de la démarche weberienne. En tant qu’élève 429 à l’université de Berlin, Lachmann connaissait parfaitement l’œuvre de M. Weber. Le premier ouvrage de Lachmann s’intitule d’ailleurs The Legacy of Max Weber 430 .

Toutefois, ces « types d’entrepreneurs » ne sont pas des « types idéaux » au sens de M. Weber. L’analyse que fait Lachmann (1971, p. 27) de l’« idéal type », sans doute parce qu’elle est fondée sur l’interprétation de W. Sombart 431 , reste superficielle. Il est intéressant de noter que Lachmann semble conscient de ce biais puisqu’il ne tranche pas entre la définition de l’« idéal type » de Sombart et celle de M. Weber. Il se contente de noter que W. Sombart accuse M. Weber d’avoir confondu l’idéal type avec un concept général applicable à toutes les sciences sociales. Pourtant, Lachmann semble se rapprocher de W. Sombart dans la mesure où il écrit : ‘« le concept d’idéal type de Weber manque de toute référence spécifique à la nature humaine et semble pouvoir être applicable aussi bien au royaume animal et au monde végétal qu’à la sphère humaines »’ (1971, p. 29). Il se contente de noter que l’‘« idéal type a pour but d’ordonner les phénomènes concrets en fonction de leurs distances par rapport à celui-ci »’ (1971, p. 29). Selon lui, le concept d’idéal type ne permet pas de prendre en compte la variété de l’action humaine 432 .

Finalement, il semble que l’interprétation de Lachmann de l’idéal type pose problème. Lachmann reprend la méthode de M. Weber dans la mesure où il choisit de suivre une méthode compréhensive. Toutefois, si l’interprétation est bien au cœur de son analyse, c’est plutôt la subjectivité des interprétations qu’il souligne.

L’analyse des types entrepreneuriaux est présentée dans sa forme la plus explicite dans The Market as an Economic Process et plus particulièrement dans le chapitre intitulé « Markets and Market » 433 . Toutefois, l’analyse présentée dans cet ouvrage fait appel à des travaux antérieurs concernant la théorie du capital. Nous serons donc amenés à mettre en perspective l’analyse de 1986 avec les résultats des premiers travaux de l’auteur. Nous reviendrons ainsi plus particulièrement sur le rôle et la nature des activités de spéculation et d’investissement.

Lachmann (1986, pp. 125-127) distingue trois type d’entrepreneurs reposant chacun surun mode d’interaction différent : l’arbitragiste [arbitrageur], l’innovateur [innovator] ou le spéculateur [speculator]. Notons tout d’abord que les trois types portent les mêmes noms que ceux proposés par Kirzner (1984, pp. 84-86). Cependant, de nombreuses différences quant aux définitions de ces types apparaissent entre les deux auteurs comme nous allons le voir maintenant.

L’arbitragiste, tout d’abord, cherche à réaliser un gain en exploitant les différences de prix ou entre le prix et le coût à un moment donné. Son action permet donc d’équilibrer offres et demandes (en statique). L’innovateur ensuite espère tirer profit des différences intertemporelles de prix que son action pourra produire. Enfin, le spéculateur cherche à exploiter des différences intertemporelles de prix sur lesquelles son action n’a aucune influence. Lachmann distingue ainsi les spéculateurs et les innovateurs, qui fondent leurs jugements et leurs décisions sur des anticipations, des arbitragistes qui agissent en fonction des changements passés. L’action des spéculateurs et des innovateurs dépend de l’avenir, contrairement à celle de l’arbitragiste. Pourtant, il paraît discutable, au vue même de la représentation du choix humain chez Lachmann, que l’arbitragiste se fonde uniquement sur le passé pour agir, sauf à considérer qu’il disparaîtra une fois son action accomplie 434 . Toute action étant fondée sur une représentation du futur, il semble que l’arbitragiste décrit par Lachmann doive agir lui aussi en fonction d’une anticipation. Si l’on veut donc conserver la définition de Lachmann et l’opposition avec les deux autres types, il semble que l’on doive considérer l’arbitragiste comme supposant que la situation dans laquelle il se trouve ne se verra pas modifiée de manière significative dans le futur.

Nous retrouvons ainsi la définition de Kirzner (1984, p. 84) pour qui l’arbitragiste ne fait que découvrir des erreurs passées et corriger ces erreurs. Il se contente de tirer profit des différences de prix sans penser aux conséquences que peut avoir son action sur les anticipations des autres individus. L’arbitragiste ignore donc que son action peut avoir des répercussions non seulement sur l’action des autres individus mais sur les résultats de sa propre action. En poussant un peu plus l’analyse, nous pourrions même dire que d’une certaine manière, l’arbitragiste fait preuve d’une parfaite rationalité au sens donné aujourd’hui par la théorie microéconomique, dans la mesure où il ne tient pas compte de l’interaction avec les autres individus. Cette interprétation nous semble d’autant plus plausible qu’elle est compatible avec l’existence d’une connaissance imparfaite des individus comme celle que Lachmann suppose.

Plus encore, l’arbitragiste est définit par Lachmann (1986, p. 126) comme « un agent équilibrant ». Or, si l’arbitragiste fait l’hypothèse que le futur sera tel que le présent, rien ne prouve que les autres individus auront la même anticipation. Rien ne permet en outre d’assurer que le résultat de son action sera forcément celui qu’il anticipe. L’individu peut en effet commettre des erreurs du fait même de sa connaissance imparfaite.

Par définition, l’équilibre correspond, selon Lachmann, à une situation où les actions des divers agents et donc leurs anticipations sont coordonnées. Seul le hasard en ce sens peut produire une situation d’équilibre, alors même que les individus ne tiennent pas compte de l’interaction de leurs anticipations. Finalement, il semble que seule la parfaite connaissance des individus, ou le pur hasard, puissent produire une situation où les actions des individus sont parfaitement coordonnées. Par hypothèse, Lachmann considère que les individus ont une connaissance imparfaite, ce qui ne laisse plus que le hasard pour expliquer que l’action des individus conduise à une tendance à l’équilibre.

Le second type d’entrepreneur, l’« innovateur », a une action pleinement créatrice puisqu’en créant la nouveauté sur le marché, il bouscule l’ancien schéma de production. Il a en outre une action déstabilisatrice pour les autres acteurs : il bouleverse leurs prévisions et leurs plans. Lachmann explique que l’action de l’innovateur « est poussée par l’interaction entre les entrepreneurs de la première et de la troisième catégorie », c’est-à-dire par l’interaction entre les arbitragistes et les innovateurs. Les arbitragistes exploitent les différences de prix nées de l’introduction d’une innovation. Ils cherchent en effet à imiter les innovateurs, s’installent dans la même activité et contribuent à réduire le profit obtenu par les innovateurs lors de leur entrée sur le marché. Nous retrouvons ainsi l’idée de Schumpeter selon laquelle les « entrepreneurs-innovateurs » sont suivis par des « entrepreneurs-imitateurs » 435 .

L’interaction entre les innovateurs et les spéculateurs est quant à elle plus complexe. S’intéresser à la relation entre l’innovation et la spéculation revient en effet pour Lachmann à se demander ‘« ce qui se passe si chaque innovateur se trouve lui-même entouré par une nuée de spéculateurs essayant d’anticiper le résultat de leur action »’. Aussi, n’existe-t-il pas de réponse simple à cette question puisque le résultat « dépend de la forme exacte prise par l’activité spéculative en jeu », comme le note Lachmann (1986, p. 126). Celui-ci reconnaît en effet que l’action des spéculateurs peut entrer en conflit avec celle des innovateurs. Aussi, l’action du spéculateur est-elle tantôt équilibrante 436 , tantôt déséquilibrante, selon les circonstances. En définitive, le résultat de la spéculation dépend du fait qu’elle soit imitée ou non par les autres spéculateurs et plus largement parles autres participants au marché. Lachmann (1986, p. 126) explique ainsi : ‘« là où [généralement] les spéculateurs souhaitent détenir des stocks variables de ce que les innovateurs produisent, ils facilitent l’action des innovateurs aussi longtemps qu’ils sont prêts à absorber ou régler les différences entre le flux de produit et le flux de sa demande, ou le flux d’offre des facteurs de production et leur demande »’. Par conséquent, le résultat de la spéculation dépend de la manière dont les spéculateurs utilisent leurs stocks. S’ils accumulent ou se débarrassent de leurs stocks au moment où les innovateurs en ont besoin, leurs actions se complètent. La spéculation est alors équilibrante. Mais parallèlement, les spéculateurs peuvent exercer une action perturbatrice pour l’activité des innovateurs. Ils peuvent ainsi spéculer à la hausse des cours des matières premières, gonflant artificiellement les prix des matières premières dont ont besoin les innovateurs. L’action des spéculateurs est alors déséquilibrante.

Lachmann s’est particulièrement intéressé au fonctionnement des marchés spéculatifs tout au long de sa carrière. Il a ainsi été fortement influencé par l’analyse keynésienne et les travaux de N. Kaldor auquel il fait souvent référence. Il met d’ailleurs l’accent sur l’instabilité des marchés spéculatifs sur lesquels un agent peut être acheteur à un instant puis vendeur l’instant suivant. Il note ainsi que ‘« sur de tels marchés, toute transaction est un départ pour l’inconnu, les acheteurs et les vendeurs partant dans des directions différentes »’, des individus pouvant avoir des anticipations différentes face à la même situation (1988, p. 272). Plus encore, il souligne que les anticipations diffèrent entre les hommes, mais aussi dans le temps.

Toutefois, si Lachmann s’inspire de N. Kaldor (1939), il se sépare ce dernier sur de nombreux points. En effet, il ne pousse pas aussi loin son analyse que ne le fait N. Kaldor. La définition qu’il propose de la spéculation est nettement plus « large » que celle de N. Kaldor (1939). Pour lui, la spéculation 437 renvoie à des différences de prix intertemporelles sur lesquelles son action n’a aucune influence (1986, p. 125).

N. Kaldor (1939, p. 53) distingue trois types d’opérations sur les marchés à terme à savoir l’« arbitrage », la « couverture » et la « spéculation » auxquelles correspondent des types agents particuliers. L’arbitragiste défini ainsi n’a rien à voir avec l’arbitragiste de Lachmann : si le second tire profit de différences de prix à un moment donné, l’arbitrage 438 renvoie pour N. Kaldor (1939, p. 54) à « l’achat au comptant et simultanément la vente à terme puis la détention du stock jusqu’à la date de livraison ». Plus simplement, ce dernier distingue l’activité d’arbitrage qui a pour objectif de se couvrir contre les risques de l’activité de spéculation qui, elle, assume les risques. Par conséquent, il n’est pas possible de considérer l’action des spéculateurs indépendamment de l’action des « arbitragistes en couverture ». L’action de chacun contribue en effet à limiter l’ampleur des variations du prix à terme (1939, pp. 54-55). En outre, N. Kaldor montre que la variable importante dans la détermination du prix à terme n’est autre que l’évolution du volume des stocks spéculatifs lesquels se définissent comme la différence entre le volume des stocks réellement détenu et celui du stock qui serait détenu si, et seulement si, le prix du bien considéré demeurait constant. Il conclut ainsi son analyse en expliquant que ‘« la sensibilité du prix courant au prix anticipé est d’autant plus grande qu’est importante l’élasticité des stocks spéculatifs »’ (1939, pp. 56-57). Or, Lachmann ne tient pas compte, ni même n’évoque à aucun moment dans son analyse, l’importance des stocks spéculatifs. Lachmann néglige ainsi de prendre en compte le poids des activités spéculatives par rapport aux autres types d’activités, alors même qu’il s’agit d’un facteur essentiel pour comprendre les liens existants entre spéculateurs et arbitragistes (au sens de Lachmann).

Finalement, notre auteur ne prend pas en compte le fait que pour exercer un effet stabilisateur sur les prix, les achats spéculatifs doivent ne représenter qu’une infime fraction dans l’ensemble des transactions. N. Kaldor montre quant à lui dans son article que l’activité spéculative peut avoir un effet 439 stabilisateur ou déstabilisateur selon l’élasticité des anticipations et l’élasticité des stocks spéculatifs. Il peut ainsi en conclure que la stabilité dépend largement de la conviction partagée par les individus quant à l’évolution du prix par rapport à son niveau atteint les jours précédents 440 . Dès lors, N. Kaldor (1939, p. 73) peut-il en conclure que ‘« ce n’est pas tant l’existence de la spéculation en tant que telle qui est responsable de la stabilité de notre système économique, mais son incidence si différente sur les marchés – le fait que sur certains d’entre eux elle joue un rôle dominant, alors que sur d’autres, elle n’a qu’une influence insignifiante »’.

Finalement, le tableau peint par N. Kaldor est beaucoup plus complexe que celui que propose Lachmann même si leurs résultats sont étrangement proches l’un de l’autre. L’activité spéculative n’est pas forcément stabilisatrice ou déstabilisatrice. Son issue dépend de nombreuses circonstances dont il est nécessaire de tenir compte avant de pouvoir fournir une analyse de son fonctionnement.

Si l’analyse de Lachmann concernant les types d’entrepreneurs est plus contrastée et donc plus complexe que celle de Kirzner, notamment parce qu’elle prend en considération la nature déséquilibrante de la spéculation, elle n’en reste pas moins incomplète. Elle ne permet pas de comprendre les détails des relations liant entre eux les différents types entrepreneuriaux, même si elle ouvre des pistes quant à la voie que devrait prendre une telle analyse. Lachmann montre en définitive que les différentes formes entrepreneuriales s’affrontent, se renforcent ou se neutralisent. L’issue de cette confrontation ne peut être déterminée a priori contrairement à ce que suppose Kirzner. Aussi Lachmann propose-t-il une analyse différente mettant l’accent sur la pluralité des processus de marché comme nous le verrons dans la sous section suivante.

Notes
429.

Lachmann entra à l’université de Berlin en 1923 et eut ainsi pour professeur W. Sombart. Nous renvoyons le lecteur pour un point concernant la querelle entre l’école historique allemande et Menger au premier chapitre de ce travail.

430.

Au fil des pages, Lachmann dresse l’inventaire des apports de M. Weber et met en avant des pistes qui devraient permettre d’enrichir l’analyse économique. Ces pistes constituent selon nous un véritable « projet de recherches » que Lachmann s’est attaché à développer tout au long de ses travaux. Le thème central de l’œuvre de Lachmann semble en effet résider dans l’importance des institutions et de la contextualisation dans la compréhension des phénomènes sociaux. Les derniers développements de ce projet ne sont autres que l’herméneutique développée dans Lachmann (1991).

431.

Lachmann fait ici référence à l’ouvrage de 1930, Dei drei Nationalökonomien, Munich and Liepzig :Duncker & Humblot.

432.

Cette critique semble rapide dans la mesure où, ainsi qu’il l’a été montré par exemple par R. Aron, la notion de type idéal est double. Elle permet d’une part de renvoyer à des caractéristiques universelles et abstraites, et d’autre part de replacer ces formes abstraites dans un contexte historique déterminé. La notion d’idéal type est ambiguë et par conséquent plus complexe que ce que nous expose Lachmann. Pour résoudre cette ambiguïté, R. Aron (1967) propose de distinguer la « tendance idéaltypique », ce que M. Weber (1965, pp. 185-186) désigne parfois sous l’expression d’« idéaltype d’idéaltypes » ou d’idéaltype « générique » des types idéaux. Autrement dit, il existe des degrés d’abstraction différents dans les constructions utilisées par M. Weber. Le point commun à toutes ces constructions conceptuelles ou typiques réside dans leur caractère « abstrait ». Il ne s’agit jamais que d’images « dans lesquelles nous construisons des relations, en utilisant la catégorie de possibilité objective, que notre imagination formée et orientée d’après la réalité juge comme adéquates » comme l’écrit M. Weber (1965, p. 176).

433.

Ce chapitre met en avant la pluralité des marchés. Lachmann montre dans ce chapitre que la tendance à l’équilibre n’est pas la caractéristique essentielle des marchés.

434.

Même dans le cas où l’arbitragiste serait voué à disparaître, il faudrait encore supposer qu’il fait abstraction des répercussions de son action pour les autres individus et les générations à venir. Or, une telle hypothèse est totalement impossible dans la mesure où toute action est orientée vers le futur selon Lachmann.

435.

Nous renvoyons le lecteur à la partie 2, chapitre 1 de ce travail et plus particulièrement à la sous section « 2.3.2. Evolution du capitalisme et formes d’entreprises : monopolisation et protectionnisme » où nous exposons l’analyse de Schumpeter.

436.

Kaldor (1939), auquel Lachmann (1986, pp. 137-138) fait explicitement référence ici, parle de spéculation « stabilisatrice » ou « déstabilisatrice ».

437.

Parallèlement, la spéculation se définit selon N. Kaldor (1939, p. 49) comme « l’achat (ou la vente) de marchandises en vue d’une revente (ou d’un rachat) à une date ultérieure ; là où le mobile d’une telle action est l’anticipation d’un changement des prix en vigueur et non un avantage résultant de leur emploi, une transformation ou un transfert d’un marché à un autre ».

438.

Notons que pour N. Kaldor la différence entre l’opération d’arbitrage et celle de couverture est relativement fine. En effet, l’opération d’arbitrage ne se distingue de celle de couverture selon lui (1939, p. 54) que parce que « l’agent qui se couvre se porte habituellement sur le marché à terme pour réduire un risque associé à un engagement qui est indépendant de l’existence de ce marché ». Parallèlement, l’arbitragiste ne prend de risque que dans la mesure où le marché à terme sur lequel il se place lui permet de reporter les risques sur d’autres participants à ce marché.

439.

Il nomme cet effet « le degré d’influence stabilisatrice sur les prix de la spéculation » (1939, p. 60).

440.

Notons toutefois que la stabilité des prix n’implique pas nécessairement la stabilité de l’activité, comme le note N. Kaldor, puisque la variation des stocks spéculatifs a un effet sur le revenu des agents. Lorsque la spéculation a un effet stabilisateur sur les prix, grâce à un accroissement du stock spéculatif, une augmentation de la demande, ou une réduction de l’offre, a pour conséquence une baisse des revenus ; et inversement dans le cas d’un effet déstabilisateur de la spéculation. Ce tableau est pourtant loin d’être terminé puisque cet effet sur le revenu des stocks spéculatifs sera plus ou moins important selon qu’il y ait ou non plus d’un bien dont le prix soit stabilisé par la spéculation.