1.3. L’histoire de Chris

Dès sa naissance, Chris a été baptisé dans la foi chrétienne selon la tradition de l’Église catholique. Avant l’âge de sept ans il a également été séparé de ses parents et remis au chef de canton dont son père est originaire, pour son éducation. Là, il sera impliqué très tôt dans la vie de la communauté chrétienne, servant à la messe comme enfant de chœur. C’est ainsi, nous explique Chris, que lui serait venue sa vocation religieuse. Il nous dira que son père qui était dans la capitale l’aurait beaucoup soutenu dans cette démarche.

Après ses études d’école primaire, il aurait été admis au Juvénat d’une congrégation religieuse, non loin de la capitale où habitaient ses parents, pour y poursuivre sa formation religieuse. Parallèlement à sa formation religieuse, il recevra une formation en comptabilité qui sera sanctionnée par les diplômes de C.A.P et de B.E.P. Mais il se serait surtout distingué par ses talents en musique. Il composera ainsi plusieurs chants liturgiques bien connus par plusieurs chorales au niveau national. Après ses premiers vœux temporaires au sein de sa congrégation religieuse, il occupera les fonctions d’économe dans sa communauté tout en poursuivant des études en Droit Canon et en théologie.

Les choses allaient pourtant se compliquer pour lui à l’approche du renouvellement de ses vœux temporaires qui devait le conduire aux vœux perpétuels, dans sa congrégation religieuse. C’est en effet à ce moment que surviendront ses premières crises. Après deux ans de traitement à la médecine moderne sans succès, la communauté religieuse décidera de suspendre les vœux de Chris et de le rendre à sa famille, officiellement pour des raisons de santé et pour qu’il se soigne mieux.

C’est à ce moment que le père de Chris entreprendra des consultations auprès des devins, chose proscrite par la religion catholique, pour comprendre ce qui arrivait à son fils et mieux le soigner. Il se dévouera d’autant plus qu’il tenait particulièrement à ce que son fils puisse retourner rapidement dans la vie religieuse. Les devins consultés diront que Chris était possédé par des kinkirsi. Les traitements entrepris s’avérèrent cependant sans succès, amenant ainsi Chris à prolonger indéfiniment son retour à la vie laïque.

Chris entreprendra alors plusieurs stages de comptabilité dans différentes entreprises qui se solderont tous sans aucune embauche. Mais cela ne l’inquiétait nullement car il croyait toujours qu’il retournera dans sa congrégation religieuse. Dans le même temps, il participera très activement à la vie paroissale, bénéficiant de toutes les considérations liées au statut de religieux qu’il affichait ostensiblement même s’il ne l’était plus.

Toutefois, comme la situation perdurait, Chris entreprendra des démarches pour rentrer au Grand Séminaire et se faire prêtre. Mais là aussi, la réponse des autorités ecclésiastiques était invariablement la même : il lui fallait patienter, on verra ce que l’on pouvait faire pour lui.

Le temps passait cependant et la situation de Chris se dégradait de plus en plus. Il se retrouvait ainsi sans occupation professionnelle, sans argent et, selon lui, sans aucun soutien de la part de sa famille, de son ex-communauté religieuse et de toute l’Église catholique. Il devient de plus en plus irascible, vindicatif, se sentant abandonné et persécuté par tous. Il affichera ostentatoirement son appartenance religieuse, arborant une grosse croix en bois de manière provocatrice. Il s’en prendra régulièrement à ses parents, au clergé, à son ex-communauté qu’il traitera de « chrétiens de dimanche », de véritables hypocrites, pratiquant peu les vertus chrétiennes et la charité envers le prochain. Il s’en prendra à sa famille qui le laisserait croupir dans la misère, alors que lui n’avait ménagé aucun effort pour la soutenir, quand il « était toujours bien ».

Les conflits avec son entourage vont ainsi s’exacerber en même temps que ses crises s’intensifieront. Il essayera de reprendre un traitement médical mais il ne pouvait plus honorer ses ordonnances et ses consultations médicales qu’en comptant sur les dons des paroissiennes et de quelques personnes charitables qu’il rencontrait ; menant pour ainsi dire une vie de mendicité et de clochardisation qui ne disait pas son nom. Cette situation irritera d’autant plus les membres de sa famille qui lui reprocheront de les honnir. Il s’adonnera ainsi de plus en plus aux groupes de prières et aux thérapies syncrétiques, pensant éradiquer ainsi définitivement son mal. C’est dans un tel contexte que Chris arrivera à notre consultation.