4. BENJAMIN

Benjamin est un jeune homme de 32 ans lorsqu’il arrive à notre consultation. Il nous a été adressé par un attaché de santé en psychiatrie qui l’avait suivi aux débuts de ses troubles qui remontaient à plus de douze ans. Cela avait commencé par des crises convulsives subites qui avaient plongé Benjamin dans un coma de deux jours alors qu’il était en classe de seconde des Lycées.

Les nombreux examens qui avaient été effectués dont un électroencéphalogramme et un scanner, n’avaient pas permis d’établir un diagnostic précis sur l’origine de ces crises. Benjamin s’en était sorti avec des troubles de mémoire qui auraient beaucoup perturbé ses études. Il avait du mal à retenir tout ce qu’il apprenait et était souvent pris par de violents maux de tête.

Ces différents troubles s’accompagnaient d’une forte anxiété et d’une crainte de re-sombrer dans les crises convulsives. C’est ce qui avait motivé une longue prise en charge en psychiatrie avec des résultats très mitigés. Il avait néanmoins pu poursuivre une formation professionnelle dans le domaine de la santé et venait d’être affecté à son premier poste comme responsable d’un dispensaire, lorsqu’il arrivait à notre consultation.

Benjamin nous précisera cependant que ses crises avaient été précédées d’une longue période d’insomnie, allant de l’insomnie partielle à l’insomnie totale. Cet épisode avait duré environ deux ans alors qu’il était dans un internat. L’enseignant préposé à l’infirmerie de l’internat, à qui il s’en était plaint, n’aurait pas jugé utile de l’adresser à une consultation médicale et se serait contenté de lui donner quelques somnifères à chaque fois que survenaient les crises d’insomnie.

Au cours de ces deux dernières années, les crises d’anxiété s’étaient intensifiées sur fond de troubles psychosomatiques. Benjamin s’en était confié à l’attaché de santé avec lequel il avait gardé des liens. Ce dernier nous l’avait ainsi recommandé pour une prise en charge psychologique. En réalité, il s’avèrera que Benjamin avait successivement épuisé ses différents soignants en douze années d’une prise en charge qui n’avait pas beaucoup évolué. Il serait même entré en conflit avec certains d’entre eux. Il estimait en effet que la non évolution de son état était due à des mauvais diagnostics. Il avait multiplié les plaintes et les demandes d’examens. Il aurait même demandé un dosage de contrôle des principes actifs et de la toxicité des médicaments qui lui étaient prescrits. Tout cela avait fini par agacer ses soignants qui refusaient de le suivre.

Par ailleurs, Benjamin évoquait en lien avec les origines mystérieuses de ses premières crises convulsives, un ensemble de considérations plutôt irrationnelles qui avaient du mal à être intégrées dans une approche médicale, comme lui-même le reconnaissait.

Il avait également suivi des traitements traditionnels et s’était intéressé à quelques rares consultations divinatoires sans trop de convictions. Il dira à ce propos que c’était plus pour se débarrasser de l’insistance de quelques membres de sa famille. Paradoxalement à cela, il manifestait une curiosité quasi obsessionnelle pour tout ce qui concernait l’histoire de ses parents, les coutumes et les traditions mystiques de sa famille et ce en lien avec ce qu’il nommait ses crises.