4-8. Figuralité et instance énonçante

Pour examiner plus en détail la figuralité du mythe, on s’arrêtera sur une figure du monde dont on a déjà parlé. Il s’agit de l’objet magique ‘canne de Bouddha’ qui manifeste le rôle d’Adjuvant dans le cadre du parcours narratif ‘Destruction’. Cet objet lui a été donné par Bouddha lui-même lorsque l’héroïne arrivait de nouveau à l’autre monde à la recherche du médicament. Cet objet-figure du monde est un stimulus de substitution qui renvoie à la présence du pouvoir spirituel. A titre de représentant du Destinateur-Manipulateur, il compose ainsi la configuration modale du sujet de quête de manière à ce qu’il s’instaure en sujet réalisant le P.N /Destruction/ qui a pour visée de sauver les âmes prisonnières.

Au palier discursif, la figure /abandon/ qui est un sémantisme qualitatif de l’identité de l’acteur-héroïne se combine à celle /spiritualité/ sur un dispositif spatial isotopiquement spécifié par /mort/. A son égard, on note que la description que le narrateur donne du monde des morts est extrêmement dépouillée. Le degré de densité sémique en est très affaibli et donc flou : à peine sortie du palais de ses parents, l'héroïne rentre dans le royaume des morts, guidé par les oiseaux. Par rapport à ce monde étrange, il n’y a ni de précision de repérage en termes de coordonnées spatiales (ni haut, ni bas), ni de description de son paysage. On y rencontre une figure spirituelle (Bouddha) à un endroit quelconque et en contournant un angle, on voit des morts souffrir en prison, etc. C’est comme si on imaginait l’au-delà comme un espace topologique sans direction, ni distance entre ses points géométriques. On pourra en dire autant pour le dispositif temporel. La durée du séjour de l’héroïne en royaume des morts s’étale, du point de vue du vivant, sur l’étendue considérable. Mais la temporalité se trouve réduite, pour ainsi dire condensée en quatre types de faire. Il s’agit des tâches que l’héroïne devra accomplir. Faute de quoi elle n’aura pas accès à son objet de quête-remède magique. En projetant ainsi le cadre spatio-temporel sur son énoncé-discours linguistique, le sujet énonçant y débraye et se laisse montrer en la figure /abandon/ qui détermine le prédicat qualitatif inaliénable de l’acteur-héroïne. A ce moment syntagmatique du récit où l’héroïne sauve les âmes, elle se combine à l’autre figure /spiritualité/ manifestée en l’acteur-Bouddha. De ce dernier on a dit qu’il était le délégué de l’instance de Destinateur et qu’il composait comme tel la syntaxe modale rendant compte du parcours d’indenté du sujet performant. Le complexe modal /vouloir et devoir-faire/ (« guérir ses parents tombés malades ») le déterminait auparavant en Manipulation où l’héroïne se présentait comme le Destinataire provoqué par l’acte factitif du Destinateur qui agit de la sorte au nom de l’axiologie qu’on appellera /Amour filial/. En l’interprétant positivement, elle devenait un sujet de quête fiduciairement lié à son Destinateur mais sans savoir quoi faire pour autant. Sur le chemin qu’on a traduit comme l’espace hétérotopique sans repérage de direction, elle rencontre l’Adjuvant qui, en lui attribuant la figure-objet modal /canne de Bouddha/, la constitue en sujet compétent. Maintenant, la syntaxe modale de l'héroïne est complétée par /pouvoir-faire/.