Problématique de la recherche

Cette recherche s’inscrit dans un terrain difficile, car travailler sur le sujet des armes nucléaires israéliennes relève des sujets atypiques et son terrain est miné de manipulation. On se perd dès que l’on fait les premiers pas. On croit avancer mais on ne fait que du surplace. Les repères sont rares par le manque de travaux dans ce domaine. L’objet est difficile à explorer et il y a peu de documents à son égard. Le cas de l’ambiguïté nucléaire israélienne rentre dans cette catégorie de sujets qui manquent drastiquement d’études. Sur le plan international, et notamment du côté israélien, il est très rare d’avoir des documents concernant les armes nucléaires israéliennes. Hormis ceux trouvés par Avner Cohen auprès des archives israéliennes et qui remontent à 1955, il y a peu d’ouvrages les concernant. Les travaux scientifiques sur ce sujet restent rares.

Hormis celui de Seymour Hersh, The Samson Option, (1991), hautement riche en interviews, et celui du chercheur israélien, travaillant aux États-Unis, Avner Cohen, Israel and the Bomb (1998), peu d’ouvrages abordent le volet historique des armes nucléaires israéliennes. L’ouvrage volumineux de Avner Cohen inclunt des centaines d’interviews. Depuis, ce chercheur rencontre des difficultés pour retourner en Israël (Annexe 190) 24 . En France, il est rare de trouver des archives ou encore des traces historiques sur les liens entre la France et Israël en ce qui concerne la coopération nucléaire. Les traces que l’on trouve, dont une partie se trouve dans les annexes, sont en majorité américaines et sont basées sur des évaluations de la part de la CIA. Peu d’ouvrages sont disponibles en la matière. Celui de Pierre Péan, Les deux bombes (1991), malgré sa pertinence, est considéré par beaucoup comme une investigation journalistique. La contribution de Dominique Lorentz Affaires Atomiques (2001) 25 , quant à elle, malgré un effort considérable et une enquête poussée, n’offre pas une solide transparence scientifique des sources. Lorentz, qui avance une thèse selon laquelle les Israéliens ont aidé la France à développer les armes nucléaires, se situe plus sur un terrain journalistique que scientifique. Son ouvrage, donne l’impression d’une cascade de scoops et donne le sentiment d’un parti pris idéologique (notamment en ce qui concerne le général Charles de Gaulle, p. 238-239) 26 . Côté israélien, l’ouvrage de Shlomo Aronson (1991) 27 , utilise des postulats comme le lien entre l’holocauste et les armes nucléaires israéliennes. Une hypothèse intéressante mais je me suis trouvé confronté au difficulté de vérifier une telle hypothèse. Il pose de questions sur la longueur de pages sans donner des réponses à toutes les questions. Nos deux méthodes sont totalement différentes. Les sources et les données le sont aussi. Ici j’utilise 287 documents historiques, contre 21 utilisés par Aronson (un seule document est en commun). La construction du sujet par Aronson est totalement différente. Aronson aborde le rapport entre ce qu'il appelle les “gouvernements de Jérusalem”, ainsi que le volet libanais. Il relate par la suite le côté Palestino-libanais, l’Intifada, ainsi ce qu’il appelle “la renaissance du panarabisme. Il termine son ouvrage en abordant la prolifération mondiale : Algérie, Iran, Pakistan, Inde, Afrique du Sud, Taiwan et la Corée du Nord (avec quelques paragraphes pour chaque cas et qualifie le cas pakistanais de “bombe islamique”). William Bordeaux Quandt (1992) 28 , un des témoins directs de la guerre de 1973, en tant que membre de “US National Security Council, écrit « A tough editor would have done well to insist on a more coherent analytical structure to the book and more readable text. » Du côté arabe, rares sont les ouvrages consacrés à ce sujet. Une majorité d’ouvrages ou encore d’analyses parues ici et là dans des revues ou des journaux ne manque pas d’être impliquée par un parti pris. Par conséquent le manque d’objectivité scientifique ne peut donc pas leur donner une caution de validité.

Notes
25.

Dominique Lorentz, Affaires atomiques , préface Alexandre Adler, Paris, Les arènes, 2001, 603 pages.

26.

Lorentz avance comme postulat, tout au long de son ouvrage, que la capitale d’Israël est Jérusalem (près de 30 fois dans les 150 premières pages)

27.

Shlomo Aronson with Oded Brosh, The Politics and Strategy of Nuclear Weapons in the Middle East, Opacity, Theory and Reality, 1960-1991, An Israeli Perspective , State University of New York Press, 1991, 398 p.

28.

in Foreign Affairs, Vol. 71, N. 4, 1992.