Dimona au second plan

Le test chinois place le sujet de Dimona au second plan. Aux yeux de l’administration Johnson, la priorité est donnée à l’urgence du traitement du cas chinois et non plus Israël. Ce dernier est considéré en 1962-63, comme le cas le plus sérieux et le plus pressant en matière de prolifération. Mais, suite à l’essai nucléaire de la Chine communiste, l’urgence entourant la centrale israélienne a considérablement diminué. Il y a aussi d’autres raisons : les arrangements nucléaires de Kennedy-Eshkol ainsi que la visite d'Eshkol à Washington quelques mois plus tôt (en juin 1964), jouent un rôle important et apaisent Washington. En 1964, Washington a le sentiment que le problème nucléaire israélien est contenu, au moins politiquement, et pourrait le rester probablement pour longtemps tant que les États-Unis satisferont les besoins israéliens en armements conventionnels. D'autre part, l'explosion chinoise soulève la possibilité de la prolifération par une réaction en chaîne parmi les voisins de la Chine, en particulier l’Inde, le Japon, et le Pakistan (Newsweek, 9 août 1965) 469 . En ce qui concerne l’Inde, dès le début des années soixante, en juin 1961, Washington demande à ses ambassades en Europe, en Asie et en Afrique d’assembler tous les éléments permettant d’évaluer la question du nucléaire chinois et indien (Annexe 8) 470 . Le Pentagone demande au Department of State de poursuivre ses efforts concernant le test chinois et le programme nucléaire indien. Le 28 octobre 1964, le Pentagone adresse une demande secrète au département d’État. Dans cette lettre -non déclassée-, le Secrétaire d’État à la Défense Robert McNamara demande à Dean Rusk, de rassurer les États non-nucléaires voisins de la Chine( 471 ). C’est ce qu’on lit dans un autre rapport, daté du 23 octobre1964, que McNamara attache à sa lettre. Ce document est exclusivement consacré au problème du nucléaire indien (Annexe 81) 472 . Par ailleurs, un mois après, le 23 novembre 1964, une note est écrite par l’AEC, recommandant d’intensifier la coopération avec l’Inde dans le domaine nucléaire. La raison de cette note est d’éviter que les Indiens accélèrent leur programme nucléaire en réaction au test chinois (Annexe 82) 473 . Le 25 novembre 1964, le Président de la Commission de l’énergie atomique Glenn Seaborg propose, dans une lettre à l’ambassadeur américain à New Delhi, de coordonner la coopération indo-américaine dans le domaine nucléaire (Annexe 83) 474 . Ces demandes irritent l’ambassadeur américain en Inde, Llewellyn E. Thompson. Il est l’un des principaux participants à la formulation de la politique de non-prolifération de l'administration Johnson. Llewellyn E. Thompson critique toutes ces suggestions et s’oppose à l’idée que les États-Unis puissent fournir des garanties spécifiques en matière de sécurité. Il argumente sa position par le fait que l’Inde est un pays non-aligné. Il explique que la politique concernant la question de la prolifération n'a pas été encore établie (Annexe 84) 475 .

Notes
469.

“The Bomb: Special Report”, Newsweek, 9 août 1965, pp. 52-57.

470.

Annexe 80, Department of State Instructions : “Indian Capability and Likelihood to Produce Atomic Energy”, 29 juin 1961(Secret). Source : Decimal File, 1960-1963; Central Files of the Department of State, Record Group 59; National Archives, Washington, D.C.

471.

Central Files of the Department of State, Record Group 59; National Archives, Washington, D.C. Subject-Numeric File, 1964-1966

472.

Annexe 81, The Secretary of Defense, Washington. 23 octobre 1964. The Indian Nuclear Problem : Proposed Course of Action, Souce : Decimal File, 1960-1963; Central Files of the Department of State, Record Group 59; National Archives, Washington, D.C.

473.

Annexe 82, Letter from J. G. Palfrey -Atomic Energy Commission- à l’ambassadeur Llewellyn E. Thompson . Source : Mandatory Review declassification by the Lyndon Baines Johnson Presidential Library.

474.

Annexe 83, Telegram from State Department to the Embassy in New Delhi. Source : National Security Archive, Subject-Numeric File, 1964-1966; Central Files of the Department of State, Record Group 59; National Archives, Washington, D.C.

475.

Annexe 84, Memorandum from the State Department, Ambassador at Large: “New Delhi’s 1862 of December 31, 1964 ,” December 31, 1964 (SECRET) Source : National Security Archive, Subject-Numeric File, 1964-1966; Central Files of the Department of State, Record Group 59; National Security Archive, Washington, D.C. Pour plus d’information sur ce sujet voir : National Security Archive Electronic Briefing Book No. 1, The United States, China, and the Bomb.