6. Conclusion

Les tests de compositionnalité ne lèvent pas toutes les incertitudes. Les unités lexicales testées dans ce chapitre révèlent l'insuffisance des critères pour déterminer la lexicalité d’un assemblage. De plus, à la suite des observations de Bauer (1998), on s’attend à ce que le statut de certaines combinaisons de lexies ne soit pas clair. Les critères considérés ne permettent pas de confirmer ou d’infirmer une division lexique-syntaxe. Une division composé-séquence libre basée sur un seul critère serait hasardeuse et non la preuve d’une frontière. Après examen des corrélations entre critères, Bauer (1998) doute de l’existence de deux constructions distinctes. Aucun exemple ne réunit toutes les particularités des composés ou des séquences libres.

Nous partageons l’avis d’Adams et de Boisson qui voient le statut de composé comme une question de degré (1973 : 58). Tournier résume bien ce qui résulte de cet assemblage de tests :

‘Aucun des critères proposés pour décider si une séquence est un mot composé n’est à lui seul déterminant dans tous les cas. Toutefois, l’application conjointe de ces cinq critères [accentuation, graphie, distribution, sémantique, fréquence] peut, sinon aboutir à une certitude, du moins permettre de réunir un faisceau de présomptions (1991a : 67).’

Pour réaliser notre projet, nous avons besoin d’une définition opératoire pour le recensement des noms composés du domaine d’Internet. La définition utilisée sera peu restrictive 52 puisqu’une définition étroite nuirait à la mise en place d’un système d’équivalences types d’aide à la traduction en écartant les catégories mineures. Nous pensons qu’appliquer un triple filtrage 53 aux candidats composés dont les critères sont lâches peut réunir l’indispensable « faisceau de présomptions ».

Seront extraites du corpus et appelées noms composés les lexies qui, d’une part, correspondent à la définition suivante du nom composé et à la majorité des propriétés énoncées par Tournier (Part. I, Ch. 1, Sec. 1.) : un nom composé est une lexie construite désignant un concept. Les éléments qui entrent dans la formation d’un nom composé sont le plus souvent autonomes, c'est-à-dire des lexies simples, des conjonctions, des prépositions, des lexies composées, des sigles, des amalgames mais aussi des morphèmes grammaticaux. Les éléments dépourvus d’autonomie sont des troncations et des pseudo-confixes (voir Part.I, Ch.1, Sec. 2. pour les détails et les exemples). D’autre part, pour éliminer autant que possible les séquences fortuites et les collocations, les termes sélectionnés devront en outre :

Si un doute subsiste sur une unité, elle sera recensée. En effet :

Notes
52.

Arnaud (2004 : 333) se demande si les auteurs qui adoptent des définitions restrictives, dont Di Sciullo et Williams 1987 pour qui le français et l’espagnol manquent de composés, ne desservent pas leur théorie.

53.

Une illustration du triple filtrage figure en Annexe (Annexe 4).

54.

www.m-w.com , www.dictionary.cambridge.org pour l’anglais, www.granddictionnaire.com pour l’anglais et le français, GR 2001 pour le français, www.diccionario.es pour l’espagnol.

55.

Devant le manque de fiabilité des tests de lexicalité, Arnaud (2003) a retenu cette méthode pour déterminer en toute objectivité les « suites NN timbre-poste » qui sont des unités lexicales.