1.1.1. Les composés binaires

Tableau 47 : Structures compositionnelles endogènes et exogènes des composés binaires du corpus espagnol
Structures Fréquence « type » %
1 Composés endogènes : 435 88,23%
1.1 purs 208 42,19%
1.1.1 N + de + N 111 22,52%
1.1.2 N + A 79 16,02%
1.1.3 N + N 7 1,42%
1.1.4 N + a + N 3 0,61%
1.1.5
PS + N 2 0,41%
N + PS 2 0,41%
1.1.6
no + N 1 0,20%
V + N 1 0,20%
N + en + N 1 0,20%
A + N 1 0,20%
1.2 hybrides 227 46,04%
 1.2.1 N + N 78 15,82%
 1.2.2 PS + N 54 10,95%
 1.2.3 N + de + N 41 8,32%
 1.2.4 N + PS 23 4,67%
 1.2.5 N + A 22 4,46%
 1.2.6 PS + A 4 0,81%
 1.2.7 Fdiv 3 0,61%
 1.2.8 N + a + N 2 0,41%
2 Composés exogènes 58 11,76%
  TOTAL 493 100,00%

Comme dans l’étude morphosyntaxique française, on retrouve la subdivision composés endogènes purs/composés endogènes hybrides (Ch. 3, Sec. 1.1.1.). Avec 88,23%, les composés endogènes sont majoritaires. Ce pourcentage est légèrement supérieur à celui du français (85,37%). L’influence de la RAE, qui n’apprécie guère les emprunts, n’est certainement pas étrangère à cette différence (Ahronian, 2001 : 19-20). Dans les deux langues cibles, les emprunts occupent une faible place malgré le fait a) qu’Internet soit un des domaines les plus marqués par l’anglais, b) que son développement et sa diffusion soient rapides et c) que sa médiatisation soit importante. Les raisons de la place minime des emprunts sont : 130

  • La nature des unités lexicales étudiées. Nous analysons des termes longs alors que les emprunts sont généralement des lexies courtes.
  • La nature de notre corpus. Il est écrit et constitué de revues grand public.
  • Notre manière de comptabiliser les emprunts. Nous comptons les emprunts morphosémantiques uniquement.

Avec 46,04%, les composés hybrides sont les plus nombreux parmi les binaires. Ce pourcentage est de deux points supérieurs au français (44,26%). Le taux élevé de termes hybrides s’explique par la diffusion rapide du vocabulaire par les médias. En effet, les emprunts sont implantés avant que les spécialistes n’aient le temps de créer des équivalents espagnols. Les éléments anglais des termes hybrides sont des sigles (cliente FTP, fichero MP3, mensajería SMS), des amalgames (Internet móvil, módem analógico) et des pseudo-confixes (email comercial, e-compra, gestor web). Ces emprunts sont monosyllabiques (chat, mail, news) ou dissyllabiques (cookie, software, hacker), sauf certains amalgames. Ces formations hybrides distinguent le lexique d’Internet des lexiques spécialisés soutenus. L’absence manifeste de frontières entre la langue populaire et la langue scientifique dans le domaine d’Internet se retrouvant dans les deux langues cibles, on peut sans doute parler d’anglicisation des langues.

Tableau 48 : Structures compositionnelles endogènes des composés binaires du corpus espagnol
  Structures Fréquence « type » %
1 N + de + N 152 34,94%
2 N + A 101 23,22%
3 N + N 85 19,54%
4 PS + N 56 12,87%
5 N + PS 25 5,75%
6 7 structures mineures 131 16 3,68%
  TOTAL 435 100,00%

Douze patrons syntaxiques endogènes sont recensés. Les composés les plus fréquents sont ceux formés de deux substantifs reliés par de (type página de inicio, contador de visitas, grupo de discusión), ceux constitués d’un substantif et d’un adjectif (type página inicial, sitio visitado, ADSL multipuesto) ou de deux substantifs (type código fuente), les pseudo-confixes précédant un nom (type ciberterrorista, e-compra, teletrabajo) et les noms suivis d’un pseudo-confixe (type dirección web, jubilnauta, navegador web). Ces cinq structures représentent 96,32% des composés. Les sept autres se partagent les 3,68% restants.

N + de + N est, comme en français, le type le plus fréquent, mais le pourcentage relevé pour l’espagnol est plus important (34,94% contre 28,42% pour le français). Cet écart est compensé par la proportion de N + N plus élevée en français (25,38%) qu’en espagnol (19,54%). L’espagnol usant moins de la juxtaposition, au moins dans la terminologie d’Internet, il crée beaucoup de composés syntagmatiques. À cet égard, les avis des auteurs divergent. Pour Belot (1987 : 47), « on assiste, aussi bien en France qu’en Espagne, à un mode de création par gémellation ou juxtaposition » sous l’influence de l’anglo-américain alors que pour Bustos (1986 : 182) les N + N sont peu fréquents en espagnol – et dans les langues romanes – par rapport aux langues germaniques pour des raisons historiques (pérennité du génitif) et formelles (ordre déterminant/déterminé).

Dans les composés syntagmatiques, la relation syntaxique est le plus souvent rendue par la préposition de.Les éléments peuvent également être reliés par a, – probablement sous influence étrangère (Alvar Ezquerra, 1999 : 22). Cette influence est peu marquée ici puisque seulement 1,15% des composés ont la préposition a. Toujours selon Alvar, la présence d’autres prépositions, comme en, est rare. Notre corpus corrobore cette affirmation : 0,23% des termes sont formés avec en et aucune autre préposition n’a été relevée.

Les composés de type N + A sont légèrement plus fréquents (23,22%) qu’en français (22,13%) et qu’en anglais (18,09%). La différence de pourcentage entre l’espagnol et le français n’est pas significative au regard du nombre de termes. 132

En espagnol, les pseudo-confixes sont, comme dans la terminologie française, le quatrième patron le plus fréquent, mais les pourcentages diffèrent (respectivement 14,75% et 12,87%). La totalité des composés ayant un pseudo-confixe représente 19,54% des binaires. Ce mode de formation est passé de l’anglais (26,14% des binaires) au français (20,38%) et à l’espagnol. La fréquence est plus faible en espagnol qu’en anglais puisqu’une partie des composés pseudo-confixés sont des créations exogènes (adware, e-business, webmaster, etc.).

Notes
130.

Ces raisons ne sont que brièvement rappelées ici (Part. II, Ch. 3, Sec. 1.1.1.).

131.

Il s’agit de : N+a+N (1,15%), PS+A (0,92%), Fdiv (0,69%), A + N (0,23%), no+N (0,23%), V+N (0,23%), N+en+N (0,23%).

132.

Le corpus espagnol compte 100 composés N + A et le corpus français 101. La différence de pourcentage est due au fait que le corpus espagnol compte moins de binaires (493) que le corpus français (536).