2. La circulation des termes dans le domaine d’Internet

S’il est indéniable que la langue source du vocabulaire d’Internet est l’anglais, le sens de circulation des termes entre l’anglais, le français et l’espagnol n’est, lui, pas avéré. Trois hypothèses seront examinées dans le but de le déterminer.

Les termes anglais passent directement en français et en espagnol, c’est-à-dire sans langue intermédiaire. Les procédés de traduction sont le plus souvent le calque et l’emprunt. Les lexies françaises et espagnoles sont des équivalents de traduction des lexies anglaises.

Les terminologies françaises et espagnoles sont, dans H2 aussi, constituées d’équivalents de traduction des lexies anglaises. Mais contrairement à H1, seuls les termes français sont créés directement à partir des termes anglais. Les termes espagnols sont des adaptations indirectes des termes anglais, le français est la langue intermédiaire.

Les termes français et espagnols sont majoritairement des équivalents de traduction des termes anglais, mais cette fois il y a un échange entre les trois langues. Certaines lexies formées en français peuvent être adaptées en anglais et en espagnol et des lexies espagnoles peuvent entrer en français et en anglais. Le manque d’exemples rend cette hypothèse difficilement concevable. H3 pourrait expliquer la présence de synonymes et l’instabilité de certains termes dans les trois langues – mais un flou terminologique existe souvent dans les vocabulaires récents même sans échange entre langues.

Dans H1, H2 et H3, la langue source des lexies d’Internet est l’anglais. H1 semble l’hypothèse la plus probable dans la mesure où l’anglais est la langue véhiculaire du domaine, le vecteur de transmission des termes pour des raisons historiques et de diffusion 157 mais aussi la langue de fabrication. Un exemple parmi tant d’autres, Lavasoft, une entreprise suédoise, a lancé un produit avec un nom anglais : AD-aware personal. 158 Ces observations desservent H3 qui ne peut être retenue. Il est très difficile de trouver des termes créés en français ou en espagnol et ensuite « transposés » en anglais puisque les produits français ou espagnols sont issus de technologies déjà existantes développées aux États-Unis. 159 H2 est peu envisageable, l’Espagne d’aujourd’hui ne vit plus tournée vers la France. Selon Pratt (1980), les néologismes entrés en espagnol entre 1800 et 1950 sont des adaptations de modèles français et ceux entrés depuis 1950 sont des adaptations de modèles anglais. Il affirme que, depuis deux cents ans, la langue espagnole ne crée pas de néologismes. Elle se limite à copier et à adapter les lexies étrangères :

‘Hay muchas pruebas (aunque lingüísticamente no son incontrovertibles) que apoyan la opinion de que en los dos cientos últimos años el español apenas ha acuñado una voz nueva, ni ex nihilo (es decir, de raíces latinas, griegas, etc.), ni de palabras existentes, por muy polémica que resulte esta afirmación. Lo que sí ha hecho es copiar y adaptar neologismos extranjeros, anglicismos en la epóca de la posguerra, y galicismos en los dos siglos anteriores. (1980: 45).’
Notes
156.

Légende : t = terme, ét = équivalent de traduction, EN = anglais, FR= français et ES = espagnol.

157.

Les agences de presse sont en grande majorité anglaises (Humbley 1988).

158.

Ad-aware est un utilitaire qui scanne la mémoire, la base de registre et les disques durs pour détecter les spyware connus et qui permet de les enlever (www.telecharger.01net.com).

159.

C’est le vocabulaire relatif aux FAI qui se développe le plus en France et en Espagne à cause des enjeux commerciaux. Il ne semble pas y avoir de retour vers la langue source.