I.2.2 Des caractéristiques de fond (le thématique) :

Dans son essai Louise Labé ou la Renaissance au féminin, Rigolot interroge ce « féminin »labéen, sans doute symbolique. La thématique «féminine » va fonctionner sur les mêmes principes que la grammaire du « féminin », c’est-à-dire sur des a priori sexistes et des définitions aléatoires. Les femmes ont une tendance « naturelle » à l’autobiographique (à l’anecdotique) procédant d’un « naturel » besoin d’épanchement. Leur lyrisme doit être toujours teinté de biographique et leur poétique d’invocation involontairement pythique. Leur rapport au langage doit être plus charnel et plus érotique que celui de leurs confrères masculins, puisqu’elles écrivent ce qu’elle sentent. « Il semble que la femme ait une complicité avec l’animal qu’ignore et que réprouve l’homme » 481 , supposition de rapport instinctif et « naturel » au langage que l’on doit à Béatrice Didier, à propos de la spontanéité des vers de Sappho, de la « grande liberté du corps et du langage » de Labé et de la « féminité » de Colette qui « a créé un style spécifique de la femme (…) tout simplement parce qu’elle s’est mise à écrire ce qu’elle sentait » 482 . Les femmes doivent, selon cette logique, développer une thématique du « dedans » contrairement aux hommes, tournés vers l’extérieur, une écriture de « soi » produite dans la chambre ou le boudoir : bien évidemment les femmes, en tant que genre social, n’ont pas, et nous l’avons déjà montré dans leur accès différent au langage, le même rapport à la société que les hommes.

Notes
481.

Béatrice DIDIER, L’Ecriture-Femme, op. cit., p. 21.

482.

Ibid., p. 35.