introduction

Le fait urbain ne cesse de se développer. La ville initialement perçue comme un lieu attrayant de concentration de richesses et d’emplois ne tarde pas à pâtir de son attractivité. La concentration humaine et la constitution d’une civilisation urbaine permettent de satisfaire le besoin social du vivre ensemble comme la nécessité de concentrer les activités afin d’optimiser la production. Elles ont cependant un impact sur les conditions de vie des citadins. La qualité de vie apparaît ainsi avec la nécessité de gérer au mieux le phénomène urbain. S’imposant comme une revendication collective portée par la société et comme une promesse politique engageant l’Etat puis les collectivités territoriales, la qualité de vie permet de défendre l’amélioration des conditions d’existence de chacun. C’est pourquoi le terme de qualité de vie est aujourd’hui couramment employé mais pour parler de réalités très différentes.

Répondre à la demande sociale du bien vivre, du mieux vivre en ville a un intérêt scientifique. Mais là encore, le consensus se fait rare. Cette notion de qualité vie a eu tendance à se noyer dans sa propre diversité au point d’être parfois controversée en tant qu’objet de recherche. Elle se caractérise en effet par la pluralité de ses définitions, par la variété des approches qu’elle génère et la multitude des disciplines qui s’y intéressent. Pourquoi alors s’interroger sur cette notion de qualité de vie ? Pourquoi faire de cette question un objet de recherche ? Pourquoi s’intéresser à un champ certes investi par les chercheurs mais également revendiqué par les politiques, les journalistes, les promoteurs, les spécialistes du marketing urbain, les chasseurs de palmarès et de classements des villes ? La qualité de vie s’apparente pourtant à un élément fondateur des préoccupations à la fois politiques et sociétales. Elle fait partie des enjeux urbains actuels. À l’heure où l’on tente de maîtriser l’étalement urbain, où l’on parle de renouvellement urbain, où l’on évoque la nécessité d’une densification des centres, la question de la qualité de vie urbaine est au coeur des projets d’aménagement et de développement. Cette notion interroge autant qu’elle motive, elle permet la mesure, la comparaison, l’observation, la communication et demeure par conséquent un enjeu urbain de taille. Même si la difficulté est tangible, la géographie urbaine doit se faire une place afin de participer au débat sur la qualité de vie et faire entendre sa voix sur cette problématique.

À en croire l’importance des palmarès des villes, l’appropriation médiatique de la notion de qualité de vie ne fait aucun doute. Qui n’a pas parcouru ces articles grand public aux titres aussi accrocheurs que dépourvus d’originalité : « Qualité de la vie. Le palmarès des villes », 2001, Le Nouvel Observateur, n°1912 ; « Où vit-on le mieux à Lyon », 2001, L’Express, n°2599 ; « Où vit-on le mieux en France », 2003, çà m’intéresse, n°264 ; « Où vit-on le mieux en France. N°1 Lyon », 2005, Le Point, n°1689 ? Au-delà du pouvoir de communication incontestable que revêt la qualité de vie, il convient de considérer la place grandissante qu’elle occupe aujourd’hui au cœur des réflexions et discours sur la ville.

L’enjeu de ce travail est de trouver une approche scientifique à cette préoccupation sociétale. Le projet est le suivant : expérimenter une nouvelle méthode d’évaluation de la qualité de vie. Cette recherche impose un certain nombre de postulats. À la lumière de la presse grand public qui a récemment classée Lyon comme la ville où l’on vit le mieux en France, les caractéristiques du territoire lyonnais semblent favorables à la qualité de vie de ses habitants. Qu’en est-il vraiment ? Cette expérimentation méthodologique menée sur la ville de Lyon doit permettre de répondre à cette question. À quelles échelles travaillons-nous ? Il ne s’agit pas de comparer la qualité de vie des lyonnais à celle d’autres citadins. Cette analyse a, au contraire, pour ambition la mise en évidence des disparités intra-urbaines de la qualité de vie de la ville de Lyon. Cette approche infracommunale doit ainsi investir et apprécier très finement le territoire urbain. De quelle qualité de vie parlons-nous ? L’analyse intra-urbaine impose une réflexion sur la qualité de vie dans sa dimension quotidienne. L’enjeu est de s’interroger sur les caractéristiques du banal, sur les exigences ordinaires et les besoins journaliers. Cette précision est de taille car il ne s’agit pas de discuter des qualités nécessaires à la ville, observée en tant qu’entité, mais au contraire de s’interroger sur les potentialités et les carences liés à la proximité. Nous sommes loin ici des conditions nécessaires au rayonnement d’une métropole, à la qualité de vie d’une agglomération, il est au contraire question de la nature des cadres de vie résidentiels en lien avec les besoins journaliers et quotidiens de l’habitant. Comment alors mesurer cette qualité de vie quotidienne ? L’objectif de ce travail est de construire une méthode intégrée qui repose sur des critères d’évaluation de qualité de vie validés par d’autres lois que celle de la disponibilité statistique. Ce projet ne doit pas s’arrêter à la démonstration méthodologique mais doit aller jusqu’à la production de résultats. C’est pourquoi ce travail se propose, certes, de tester la faisabilité de cette expérimentation mais vise également la réalisation d’un diagnostic urbain permettant la mise en évidence des disparités intra-urbaines de la qualité de vie quotidienne des lyonnais.