Les relations que l’individu entretient avec son logement sont une forme spécifique des rapports entre l’homme et son environnement. Le lien au logement est d’abord issu de la construction d’une territorialité. Progressivement, l’espace se structure et se hiérarchise au travers d’oppositions comme le moi, le nous et les autres ou le proche et le lointain. « Ces démarches de structuration et de hiérarchisation de l’espace constituent la base de la valorisation du territoire opérée par un individu ou par un groupe donné » 1 23. Le logement représente ainsi l’espace privilégié qui abrite les comportements humains visant l’appropriation des lieux par la famille en général et par chacun de ses membres en particulier. Compte tenu de l’importance que revêt le logement dans la relation entre l’homme et son cadre de vie, l’évaluation des exigences et de la satisfaction des habitants vis-à-vis de leur espace d’habitation sont des éléments essentiels. Sans entrer dans les détails relationnels et les leviers complexes de la valorisation ou de l’appropriation symbolique de cet espace restreint, notre objet de recherche n’est pas là, il convient néanmoins de saisir le degré d’implication et de satisfaction qu’il génère. Après avoir interrogé les habitants sur les qualités environnementales nécessaires à la qualité de vie, il est ainsi apparu nécessaire de les questionner sur la manière dont chaque individu considère cet espace du logement.
Pour ce faire, nous avons demandé aux habitants de définir la satisfaction vis-à-vis des logements qu’ils occupent actuellement. Les réponses à cette question font état d’une large satisfaction au regard du logement habité. Il convient néanmoins de noter une disparité spatiale du taux de satisfaction. La population du quartier Montchat-Chambovet annonce en effet une satisfaction cumulée quasi-unanime (99% de la population interrogée se sent « très bien » ou « plutôt bien » dans leur logement). Cette grande satisfaction est partagée par 97% des habitants interviewés du quartier Centre Croix-Rousse. La population du quartier du Plateau de la Duchère est plus partagée. Bien que le cumul de satisfaction concerne 77% des interrogés, 18% affirment se sentir plutôt mal dans leur logement et 6% très mal.
© BARBARINO-SAULNIER Natalia, 2004.
Ces résultats témoignent d’un attachement différencié à l’espace habité et à son environnement immédiat. Cette disparité semble être liée aux qualités intrinsèques du logement et à la manière dont elles sont perçues et vécues par ceux qui l’habitent. En effet, le temps d’occupation du logement, l’ancienneté de l’ancrage territorial au sein du quartier, le statut d’occupation ou les caractéristiques sociodémographiques des répondants (sexe, âge, structure de la cellule familiale, catégorie socioprofessionnelle) n’ont pas d’incidence sur le niveau de satisfaction. Il semble ainsi que l’ancienneté et les variables indiquant le niveau socio-économique des interviewés ne sont pas des éléments discriminants pour la satisfaction résidentielle. Elle dépend ainsi de la perception et de l’évaluation de certains attributs environnementaux caractérisants le logement. Il apparaît donc que des situations d’habitations distinctes et des cadres de vie différenciés peuvent présenter des niveaux de satisfaction résidentielle différents.
Bien que la question n’est pas été suffisamment approfondie pour produire des résultats probants et des explications satisfaisantes, l’enquête met en évidence des niveaux de satisfaction résidentielle comparable pour deux environnements différents (les quartiers Centre Croix-Rousse et Montchat-Chambovet) alors que le quartier du Plateau de la Duchère, caractérisé lui aussi par un environnement spécifique, affiche un niveau de satisfaction inférieur. Le rapport à l’espace résidentiel est un phénomène multidimensionnel complexe et le degré de satisfaction varie en fonction de l’adéquation estimée entre les possibilités, les besoins de chacun et leur situation concrète en matière d’habitat. Bien que la satisfaction à l’égard de l’espace d’habitat ne semble pas dépendre uniquement des qualités de celui-ci, ces dernières semblent cependant jouer un rôle déterminant dans les processus de valorisation, d’attachement et de bien-être. Cette relation entre l’individu et son logement, la manière dont il le vit au quotidien et la valeur affective qu’il lui loue sont autant d’éléments qui interviennent dans le système complexe de la qualité de vie. La perception de l’habitat et l’implication des habitants dans ce lieu restreint et intime du logement laissent présager de l’importance de la résidence principale dans la définition et l’évaluation de la qualité de vie quotidienne.
23 E. RATIU, 1996, Attributs environnementaux, dimensions psychologiques et rapports à l’environnement. Les cas de l’habitat et de l’université. Thèse de Doctorat en Psychologie dirigée par le Professeur LEVY-LEBOYER Claude, Université René Descartes - Paris V, 453 pages.