2.7. La difficile traduction quantitative des critères d’habitat

Pour la qualité de vie quotidienne, l’habitat se décline à travers la taille du logement, la qualité de son isolation sonore et l’exposition de la résidence. La nature de l’exposition des logements, à savoir l’exposition unique, la double exposition et l’identification cardinale (nord, est, sud, ouest) des résidences principales est un élément particulièrement difficile à saisir. Il n’existe aucune donnée disponible recensant et caractérisant l’orientation des logements. Force est de constater l’inadaptation de l’information quantitative à l’expression des représentations subjectives, nous avons du abandonner ce critère d’exposition des logements.

La qualité de l’isolation sonore a bénéficié d’une investigation plus grande. La donnée brute caractérisant les priorités acoustiques des logements ou définissant leur qualité d’insonorisation n’existe pas en état. Nous avons donc cherché à recomposer cette information. Pour ce faire, nous avons exploité un grand nombre de lois, d’arrêtés, de décrets et de circulaires ministérielles relatifs à l’isolation acoustique des bâtiments d’habitation ainsi qu’à leurs caractéristiques acoustiques. Cet exercice de recensement réglementaire a permis de mettre en évidence quelques dates charnières dans l’évolution de la législation acoustique. Par exemple, afin d’inciter les constructeurs à mieux prendre en considération l’intérêt de l’isolation acoustique des bâtiments d’habitation, l’arrêté modifié du 10 février 1972 a créé un label « confort acoustique ». Ce label a ensuite été relayé par le label Qualitel « confort acoustique ». La loi n°92-1444 du 31 décembre 1992, dite la loi « Royal » ou la loi « bruit » est le premier texte global en matière de bruit. Il constitue sans doute le premier effort notable de formalisation d’un texte fondateur renforçant la législation existante sans forcement remanier ni remplacer les textes précédents. Cette loi a pour principal objectif d’offrir un cadre législatif complet à la problématique du bruit et de poser des bases cohérentes de traitement réglementaire de cette nuisance. Sur le plan de l’acoustique des bâtiments, la loi impose une isolation renforcée près des zones affectées par les transports bruyants. L’accès aux niveaux sonores via les documents d’urbanisme informe de plus le citoyen sur les nuisances auxquelles il s’expose en fonction de son lieu d’habitation. L’arrêté du 30 mai 1996 marque une avancée réglementaire dans l’isolation acoustique puisqu’il fixe les dispositions relatives « aux modalités de classement des infrastructures de transports terrestres et à l’isolement acoustique des bâtiments d’habitation dans les secteurs affectés par le bruit ». La nouvelle réglementation acoustique de 1999, instituée par l’arrêté du 28 octobre 1994 relatif aux caractéristiques acoustiques des bâtiments d’habitation s’applique aux constructions neuves dont le permis de construire a été déposé après le 1er janvier 1996. Ce texte est venu remplacer celui de 1969 et ses modifications de 1975 dont les textes étaient devenus trop éloignés des techniques de construction modernes. Plus sévère que sa version précédente, la nouvelle réglementation acoustique de 1999 a introduit de nouvelles exigences concernant des performances d’isolation. Cette réglementation prévoit par exemple une isolation des logements minimum de 30dB contre les bruits extérieurs. Les logements plus anciens construits entre 1970 et 1996 sont soumis à la réglementation acoustique de l’arrêté du 14 juin 1969. Cet arrêté fixe des valeurs de niveau sonore maximum pour les planchers, les cloisons séparatives et les équipements, mais ne précise aucune valeur en ce qui concerne les fenêtres. En substance, cet arrêté indique que pour une émission sonore égale à 80 décibels, le niveau sonore dans un logement donné ne doit pas dépasser 35dB dans les pièces principales et 38dB dans les cuisines, salles d’eau et cabinets de toilettes. Pour les logements antérieurs à 1970, aucune réglementation acoustique n’est alors imposée aux constructeurs. Même dans le cas d’une rénovation actuelle d’immeuble ancien, aucune exigence n’est fixée au promoteur en ce qui concerne la qualité acoustique des logements.

Ces informations sur la législation acoustique font état d’une évolution chronologique de la réglementation et des normes en matière de construction et d’isolation. Compte tenu de la précision successive des textes et du durcissement des exigences, nous avons souhaité nous appuyer sur la date de construction des logements pour leur attribuer un niveau de qualité d’isolation sonore. Cet exercice de recomposition de la donnée aurait pu aboutir si les données concernant les dates de construction des logements mis à disposition par l’INSEE avait été compatibles. Qu’il s’agisse de l’exploitation principale ou de l’exploitation complémentaire du Recensement de la Population de 1999, les époques d’achèvement de la construction des résidences principales ou des logements sont uniquement proposées sous forme de classe : avant 1915, de 1915 à 1948, de 1949 à 1967, de 1968 à 1974, de 1975 à 1981, de 1982 à 1989 et de 1990 ou après. Cette répartition ne permet en aucun cas d’intégrer les différentes dates charnières de la réglementation acoustique. Cette incompatibilité des sources nous contraint à l’abandon de la considération de l’isolation sonore des logements. Cette renonciation, bien que longtemps souhaitée contournable, n’a finalement pu être évitée. Il nous faut donc constater que pour des raisons exogènes de discordance d’information, ce projet de construction d’un indicateur de qualité d’isolation sonore n’a pu être mené à bien. Par conséquent cette donnée ne viendra pas nourrir le diagnostic d’évaluation de la qualité de vie lyonnaise.

La taille des logements a enfin été subjectivement identifiée comme un élément capital pour la mesure de la qualité de vie au quotidien. La taille des logements s’évalue communément en fonction de deux critères que sont le nombre de pièces du logement et sa superficie habitable. Il convient de préciser toute la complexité de l’appréciation de la taille des logements. La grandeur en soi d’une résidence ne constitue pas forcement un gage de qualité. Seule l’adéquation entre la structure de la famille ou le nombre de personnes qui occupent le logement et sa surface habitable ou son nombre de pièces permet réellement d’apprécier l’agrément du logement. Il semble ainsi difficile de distinguer l’espace habité de ses habitants eux-mêmes. C’est pourtant l’enjeu du diagnostic urbain proposé. Celui-ci vise en effet la qualification des cadres de vie. Cette méthode propose d’identifier les potentialités objectives du territoire et d’en discuter les disparités spatiales. Notre démarche de travail consiste alors à considérer l’offre ou la qualité de l’offre disponible sur l’ensemble du territoire. Cette orientation exclue, dans un premier temps, la mise en relation des disponibilités territoriales et de la population résidante. Cette considération, à la fois du « contenant » et du « contenu » permettant de qualifier les correspondances entre « l’offre » et « la demande » fera l’objet d’expérimentations ultérieures. Il s’impose alors de trouver une exploitation satisfaisante pour appréhender cette problématique de taille du logement. Cela ne peut se faire qu’à travers une vision composite des critères de taille (nombre de pièces et superficie) des logements. L’évaluation de la qualité de vie quotidienne se base ainsi sur la prise en compte approfondie de ces deux critères de taille pour mener à bien son exercice de mesure objective.