Avant même la production des diagnostics urbains et la formalisation des résultats concernant les disparités spatiales des différents critères de la qualité de vie quotidienne, cette méthode d’évaluation a suscité des émulsions à la fois scientifiques et professionnelles. Le cadre institutionnel d’encadrement et de production de ce travail de recherche est sans contexte à la base d’une enrichissante connexion. De vocation à la fois scientifique et opérationnelle, cette recherche appliquée investit une problématique universitaire tout en répondant aux préoccupations opérationnelles des collectivités locales. L’élaboration d’une recherche appliquée alliant rigueur scientifique et exigence technique d’opérationnalité a suscité un vif intérêt. Comme nous l’avons déjà évoqué, la qualité de vie a été reconnue comme une notion fédératrice. À cet égard, nous avons pu vérifier son pouvoir rassembleur. La problématique de la qualité de vie quotidienne et le projet de son évaluation ont ainsi motivé de nombreux échanges interprofessionnels. Cette recherche méthodologique, de ses balbutiements à sa finalisation, a joué un rôle moteur pour le partage des connaissances. Cette expérimentation jugée novatrice a ainsi rapidement été sollicitée par des réseaux d’acteurs très différents. Elle a ainsi permis de mobiliser un public aux multiples compétences et de débattre sur des éléments essentiels concernant l’observation urbaine, la construction d’indicateurs, les méthodes d’analyse et de réflexion intra-urbaine, les fondements méthodologiques de l’évaluation de la qualité de vie ou les outils de sa mesure.
Dans un premier temps, nous avons été sollicités, en juin 2002, pour participer au colloque « Indicateurs de développement durable » organisé par le Grand Lyon dans le cadre du programme européen PASTILLE (Promoting Action for Sustainibility Through Indicators at Local Levels in Europe). Ce colloque avait pour vocation de susciter un débat entre différents types d’acteurs confrontés à la question de la mesure en général et à celle de la mise en œuvre d’indicateurs en particulier. L’émergence de la thématique de développement durable, au travers de l’exigence d’évaluation qu’elle suppose, renforce la nécessité d’élaborer des indicateurs. Le premier atelier de ce colloque se proposait de convier un large public (élus, techniciens des collectivités locales et des bureaux d’études, chercheurs, citoyens) afin de débattre autour des questions concernant l’élaboration et l’utilisation des indicateurs. L’objet était alors de mettre à jour les différents types d’offre et de demande générés par ces outils d’observation. Le second atelier avait pour but de faire le point sur la question de la comparaison (pour ne pas dire du palmarès) qui apparaît comme une tentation sinon une des perspectives de l’usage des indicateurs. La diversité des définitions et usages des indicateurs était l’un des points de départ de la réflexion des organisateurs du colloque. S’interroger sur les indicateurs de développement durable a conduit les débats sur les indicateurs de la qualité de vie. L’expérience menée au sein de la ville de Marseille et l’analyse concernant les palmarès des villes élaborés par la presse en fonction de différents « niveaux de qualité de vie », nous ont permis d’exposer notre démarche d’identification d’indicateurs de mesure et d’en expliquer la légitimité.
Pour mener à bien notre projet d’évaluation de la qualité de vie, nous avons clairement expliqué notre refus d’utiliser des indicateurs déterminés a priori. Nous avons par conséquent présenté les rouages de leur identification. Nous avons ainsi légitimé le choix des critères de qualité de vie par la connaissance des représentations des acteurs interrogés. En interrogeant directement les individus (professionnels et citadins) sur les éléments qu’ils jugent nécessaires à l’évaluation de la qualité de vie, l’occasion est donnée de justifier avec poids et assurance la construction des différents indicateurs de la qualité de vie lyonnaise. La présentation de cette démarche a recueilli un écho fort favorable. Cette alternative de construction transversale des indicateurs d’évaluation s’est imposée par sa pertinence et son efficacité. Il a été admis que cette méthode d’élaboration critériologique partagée permet à l’analyste d’asseoir ses travaux de mesure sur des matériaux à la fois rationnels, légitimes et justifiables. « Nombre d’intervenants et de participants plaident pour une ouverture du processus de construction des indicateurs, voire pour une co-production de ces derniers par le biais d’une participation active de tous les acteurs : élus, scientifiques, techniques et citoyens. Cette ouverture mettrait à mal la dissymétrie des relations entre savants et profanes, élaboration et diffusion, pédagogie et compétence, … caractéristique des modalités actuelles de construction des indicateurs. En d’autres termes, la validation claire d’indicateurs approximatifs est jugée préférable à un parachutage d’indicateurs élaborés de manière cloisonnée » 185 . L’opportunité qui nous a été donnée d’exposer les principes méthodologiques de notre recherche, nous a permis de mesurer la richesse de notre démarche. La validité des indicateurs est apparue, au cours de ce colloque, comme une question fondamentale à laquelle nous avions en partie trouvé une réponse.
Dans le cadre des XIVèmes journées scientifiques de la Société d’Ecologie Humaine (S.E.H.) de l’Université de Provence-Centre Saint Charles (Marseille), nous avons ensuite été contacté en juillet 2002 pour présenter nos travaux de recherche lors du colloque international intitulé « La qualité de vie au quotidien : cadre de vie et travail ». La S.E.H. est une société pluridisciplinaire pour la connaissance et l’étude des interactions entre l’homme et son environnement. L’objectif de ce colloque était d’envisager comment « la qualité de vie est devenue un objet de connaissance scientifique pouvant servir de fondement à des programmes opérationnels et à des interventions concrètes, notamment dans les domaines des affaires sociales, de la santé, du travail, de l’aménagement » 186 . Dans une optique très pragmatique, ce colloque voulait présenter un état des lieux des connaissances et des pratiques qui abordent, à travers le monde, la notion de qualité de vie. Il s’agissait d’instaurer une interaction entre ceux qui développent des expériences ou des actions en faveur de la qualité de vie et ceux qui entreprennent des recherches sur cette question. Ces journées de réflexion se sont ainsi attachées à parcourir les thématiques du cadre de vie et du travail à travers la présentation de recherches théoriques et d’études de cas.
Notre travail a été présenté dans le cadre des réflexions menées sur les méthodes et les indicateurs nécessaires à la mesure de la qualité de vie. Aux côtés d’expériences conduites au Canada, en Allemagne, au Brésil, en Belgique et de plusieurs études françaises, l’occasion nous a été donné de comparer notre approche aux recherches internationales. Tantôt appréhendée au travers des conditions matérielles de vie, de la qualité des cadres de vie, de la satisfaction et du bien-être, la qualité de vie oppose de manière récurrente sa dimension objective et subjective. La confrontation des différents travaux a permis de confirmer un objectif commun partagé par la majorité des intervenants : la recherche de l’intégration des caractéristiques objectives et subjectives de la qualité de vie. L’organisation du partage des connaissances a eu le grand avantage de positionner notre recherche dans une dynamique globale et partagée. Notre détermination à vouloir évaluer la qualité de vie au travers à la fois d’une approche subjective et objective correspond à une véritable volonté scientifique qui anime une large part du corpus universitaire traitant cette problématique. Nos travaux ont été retenus pour l’originalité de la démarche empruntée. En effet, les cas d’études présentés lors de ce colloque ont évoqué la possibilité d’intégrer sur le plan conceptuel et empirique ces deux approches afin de produire une vision plus générale de la qualité de vie et en ont illustré la faisabilité. Les exercices ont consisté à dresser une évaluation objective de la qualité de vie en utilisant des critères d’évaluation préalablement définis par les analystes. Ces résultats objectifs ont ensuite été comparés à l’évaluation subjective du bien-être des habitants par le biais d’enquêtes auprès de la population. L’expérimentation menée sur la ville de Lyon a cependant utilisé un angle d’approche fondamentalement différent de ceux exposés. Notre volonté de construire les critères de la qualité de vie sur la connaissance subjective des représentations citadines, puis de baser le diagnostic sur ces indicateurs a été accueillie comme une véritable innovation. Le processus qui consiste à « objectiver le subjectif » est ainsi apparue comme une alternative audacieuse mais conceptuellement efficace. Ces journées ont par conséquent permis de positionner notre démarche par rapport à un échantillon international d’expérimentations. Elles ont également concouru à faciliter la mise en réseau et la formalisation d’échangesd’expériences entre professionnels investissant de manière dissemblable un même objet.
Cette méthode d’évaluation a également attiré l’attention du Réseau R.E.S.P.E.C.T. (Référentiel d’Evaluation et de Suivi des Politiques Environnementales des Collectivités Territoriales). Cette association regroupant une trentaine de collectivités de l’Union Européenne (villes, communautés urbaines, départements, régions) a pour objet, dans les domaines de l’élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques territoriales des collectivités, d’entreprendre tous types d’actions ayant notamment pour finalité « l’aide à l'utilisation, la diffusion et au développement d'outils d'évaluation des politiques territoriales »603. Cette association est animée par la volonté de promouvoir les actions, les méthodes et les pratiques « exemplaires » ou « innovantes » des collectivités membres tant auprès d'autres collectivités qu'auprès d'instances nationales et européennes. « Basé sur le partage d’expériences, l’échange de pratiques entre collectivités partenaires et le fonctionnement en réseau, ce projet a permis la mise à disposition d’un outil de suivi et de pilotage des politiques environnementales, transférables à toutes collectivités » 187 . Comme l’explique la plaquette de présentation de l’association jointe en annexe 9, cette structure se propose, entre autres, de développer de nouveaux outils et méthodologies liés à l'évaluation environnementale des politiques des collectivités locales. Elle axe son action sur le développement de partenariats entre collectivités françaises et européennes pour favoriser le montage et la réalisation de projets communs relatifs à la définition, la mise en œuvre et l'évaluation des politiques environnementales locales. En octobre 2002, nous avons ainsi été contactés pour mettre à la disposition de ce réseau les premiers résultats de nos travaux de recherche. Cette opportunité, au-delà de l’assurance de la reconnaissance de nos travaux, est apparue comme une véritable confirmation du caractère opérationnel de notre démarche. L’intérêt porté à notre travail par ce réseau partenarial constitue la preuve que la problématique de la qualité de vie demeure une préoccupation politique avérée des collectivités locales. Le projet de son évaluation est, de plus, apparu comme une pratique capable d’intéresser différentes collectivités territoriales. Cette mobilisation a attesté de l’enjeu que représente la qualité de vie pour les orientations et les actions politiques locales et témoigne du pragmatisme et de la faisabilité de notre méthode d’évaluation.
Notre problématique et la méthode d’évaluation qu’elle a suscitée nous ont permis de travailler en étroite collaboration avec l’équipe du CERTU (Centre d’Etudes sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques) en charge de l’observation urbaine (Département Urbanisme). Cette coopération tout d’abord initiée par l’échange des principes méthodologiques de cette méthode d’évaluation de la qualité de vie quotidienne, a ensuite donné lieu à notre participation au séminaire de l’observation urbaine concernant les « Outils et méthodes pour l’infracommunal ». Organisé dans le cadre du « Programme Acteur » 188 mené par le CERTU en tutelle avec la FNAU (Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme) et l’INSEE, ce séminaire de l'observation urbaine du 30 octobre 2003 a privilégié l'échange entre professionnels de différents horizons, partageant des enjeux méthodologiques et techniques communs autour de la connaissance de l’échelle infracommunale. L’objectif de ce séminaire était d’organiser une plateforme d'échanges d'expériences et de méthodes partenariales relatives à l’analyse intra-urbaine. Cette journée se proposait dans un premier temps d’aborder les problématiques spatiales de l’analyse infracommunale. L’enjeu était alors de s’interroger sur la nature du découpage de l’espace à retenir et d’évoquer la pertinence et les limites des échelles existantes. Nous avons été sollicités pour l’originalité de notre approche géographique. L’enjeu a été de démontrer qu’il existe un territoire pouvant avoir du sens pour ceux qui l’habitent tout en répondant aux exigences de la contrainte statistique nécessaire à l’observation urbaine. Nous avons ainsi expliqué les processus de construction de notre système de référence spatiale. Nous avons par conséquent montré que le test de différents découpages et diverses méthodes d’analyse (découpages statistiques comme les îlots et les IRIS, méthode du carroyage) a conduit à l’abandon de ces découpages traditionnels au profit de l’élaboration d’un terrain d’étude structuré autour du référentiel bâti et de son unité de voisinage. Nous avons démontré qu’il est possible d’investir l’échelle infracommunale et de travailler sur des terrains d’étude sensés, cohérents et statistiquement viables. Cette intervention nous a permis d’exposer une méthode d’analyse spatiale innovante qui a souligné la grande qualité et l’extrême précision du Système Urbain de Référence dont dispose la Communauté Urbaine de Lyon et qui représente une plus value inestimable pour cette approche de la qualité de vie. Notre participation à ce séminaire nous a également permis de valider, au moins en principe, auprès de l’INSEE, notre mode d’attribution des données statistiques issues du recensement de la population qui consiste à attribuer une valeur estimée à chaque bâtiment habité de l’îlot en fonction de sa volumétrie. Ce processus a été clairement identifié comme pouvant affiner la connaissance de la structure sociale à l’échelle infracommunale et éclairer par conséquent la compréhension de ce territoire. La nécessité de disposer pour l’observation urbaine de données locales a d’ailleurs été confirmée par les représentants de l’INSEE qui ont affirmé développer des principes d’analyse comparables. Ce séminaire a donc permis de mettre en débat les exigences géographiques de l’analyse intra-urbaine et de formaliser des échanges d’expériences enrichissantes.
Cette démarche de mesure de la qualité de vie urbaine s’est également imposée comme un élément moteur pour l’animation du partenariat des agences d’urbanisme. La Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme (FNAU) a pour vocation de fédérer un certain nombre de réflexions et de formaliser l’échange des expériences menées au sein des agences au travers de « clubs » thématiques. Le club en charge des activités économiques appelé le « Club Eco-FNAU » s’est saisi de la problématique de la qualité de vie. Les membres du club ont constaté que la qualité de vie se trouve au centre d’enjeux territoriaux de premier ordre. Elle semble contribuer à la qualité urbaine et à l’attractivité des territoires. En tant qu’économistes, les professionnels des agences sont de plus en plus sollicités par les acteurs des collectivités locales afin de mesurer la qualité de vie des territoires qu’ils administrent. À l’heure où les territoires luttent ardemment pour défendre une image valorisante et s’adonnent à une concurrence exacerbée, les notions de marketing urbain, d’attractivité, de qualité de vie intéressent par nature l’ensemble des élus. Seulement, les agences d’urbanisme sont majoritairement restées en marge de ces problématiques. Face à la pression de la demande politique et à l’inadaptation des réponses actuellement formulées par les agences, les économistes de ces structures ont choisi de s’interroger sur les différentes approches de la mesure de la qualité de vie.
Nous avons ainsi été sollicités pour présenter nos travaux de recherches lors du séminaire du club Eco-FNAU qui s’est tenu à Marseille les 8 et 9 juillet 2004. L’objectif de cette rencontre était de partager un certain nombre d’expériences liées à la mesure de la qualité de vie. Bien que constatant que de nombreux acteurs (universités, chercheurs, consultants, instituts nationaux de statistiques, …) aient investi le champ de la qualité de vie en orientant leur démarche vers sa mesure, les organisateurs de ce séminaire ont initié ces journées de travail avec une réelle inquiétude : « la diversité des démarches amène à s’interroger sur les causes, les usages et les méthodes d’évaluation liées à la mesure de la qualité de vie. L’analyse des tenants et des aboutissants des expériences en la matière interpellent sur la pertinence de cet exercice difficile dont le caractère « scientifique » ne fait pas l’unanimité. Au-delà des réserves méthodologiques, l’utilisation des résultats obtenus laisse parfais perplexe » 189 . Le discrédit initialement porté sur l’exercice de la mesure de qualité de vie est directement lié aux classements des villes communiqués par la presse grand public. Les palmarès relatifs à la qualité de vie et au bien-être semblent ainsi cristalliser les possibles détournements des systèmes d’évaluation de la qualité de vie. Au-delà des problèmes méthodologiques et de l’interprétation des résultats, les débats se sont montrés préoccupés par les dérives liées à une « mise en marchandisation » des territoires. La représentation de la « qualité de ville » diffusée par les médias demeure la plus préoccupante : « non pas parce que la presse-magasine généraliste soit forcement la plus critiquable dans ce domaine, mais tout simplement parce que c’est elle qui a le plus d’échos »606. Les palmarès des villes édités par la presse semblent donc contribuer le plus activement à l’apologie ou la stigmatisation des territoires. Pour illustrer les dangers de cette tendance, le quotidien « Libération » a consacré un article intitulé « Ville classée, ville cassée » développant les « dommages collatéraux » occasionnés par le classement des villes. De longs débats ont ainsi été consacrés aux effets pervers des actes classant. Ces palmarès ont été accusés d’annihiler les efforts réalisés par un territoire et son équipe technique pour améliorer sa qualité de vie. « En effet, par effet miroir, les villes mal classées renvoient à leurs habitants une image dévalorisée de leur territoire ». Lors des échanges, P. FALGA, journaliste à l’Express et auteur de la majorité des classements des villes en fonction de leur qualité de vie, a reconnu les limites de l’exercice qu’il mène.
Cependant, l’ensemble des participants s’accorde à penser que refuser le classement des villes ne signifie pas qu’il soit pour autant nécessaire de « casser le thermomètre » et d’abandonner la mesure de la qualité de vie. Il est au contraire apparu essentiel que les agences d’urbanisme, trop longtemps en marge de ce type d’exercice, investissent ce domaine. Deux constats se sont alors imposés. Premièrement, la diversité des organismes qui se sont penchés sur cette question relève l’importance qu’occupe aujourd’hui la problématique de la qualité de vie dans notre société. Cette observation met en lumière l’absence remarquée du positionnement des agences d’urbanisme en la matière. En second lieu, l’évaluation de la qualité de vie semble être en capacité de « transcender les schémas d’observation » des agences. Pour cela, il convient qu’elles acceptent de renouveler leurs pratiques, consentent à élargir leurs champs d’investigation et se libèrent du « carcan des approches thématiques » : « ce n’est qu’au prix de la mise en place d’une approche transversale de l’observation que les agences seront en capacité d’investir le champ de la qualité de vie »606. La présentation de la méthode d’évaluation élaborée pour la ville de Lyon a démontré la faisabilité et la pertinence d’une telle démarche : « l’exemple de l’Agence pour le développement de l’agglomération lyonnaise montre que les agences ont leur mot à dire dans ce domaine » 190 . Notre exposé a ainsi fait la démonstration de l’opérationnalité de la mesure de la qualité de vie. Cette approche a été jugée capable de fournir les bases d’une expérimentation transposable à l’ensemble des agences intéressées : « ce qui ressort en priorité du débat est que les agences d’urbanisme doivent tirer partie de leur fonctionnement en réseau 607». Notre méthode d’évaluation de la qualité de vie a donc été jugée capable d’animer ce réseau partenarial et constitue par conséquent un apport conceptuel et méthodologique pouvant être partagé. Ce séminaire a donné la preuve de l’intérêt technique de notre approche, témoigne de la possible appropriation de la méthode par des instances opérationnelles au service de l’observation urbaine et démontre la possible reproductibilité de la démarche.
Cette méthode d’évaluation de la qualité de vie a enfin retenu l’attention de la Direction des Relations Internationales, du Tourisme et de la Coopération Décentralisée de la Ville de Lyon. Dans le cadre du réseau EUROCITES, la Ville de Lyon associée à la Ville de Porto s’est proposée de travailler sur le thème de la sécurité urbaine et de l’insertion sociale. Cette journée de travail organisée le 29 septembre 2004 avait pour objectif de formaliser le partage des expériences menées au sein des deux villes. Le champ d’investigation était alors assez vaste. Il s’agissait d’aborder les projets d’observation de la sécurité urbaine, les dispositifs de prévention en santé mentale et ceux élaborés en lien avec l’insertion sociale ainsi que les expériences de chacun en matière d’observation et d’évaluation de la qualité de vie. Nous avons par conséquent été sollicités pour animer les débats relatifs aux indicateurs de la qualité de vie et présenter la démarche d’évaluation lyonnaise. L’enjeu de cette journée était d’organiser le partage d’expériences, de comparer et d’enrichir chacune des démarches. Le Docteur I. MARTINS a présenté le projet de mesure de la qualité de vie élaboré par la municipalité de Porto 191 . Ce système d’évaluation a été mis en place pour améliorer la qualité de vie locale des habitants mais aussi pour améliorer et optimiser la gestion municipale. La Ville de Porto a donc expérimenté l’exercice de mesure de la qualité de vie en s’appuyant sur une batterie considérable d’indicateurs identifiés a priori. Les quatre domaines d’observation concernent les conditions de l’environnement (climat, espaces verts, nuisances sonores, …), les conditions matérielles collectives (équipements scolaires, équipements de la santé, …), les conditions économiques (marchés de l’emploi, unités de production, …) et les critères en lien avec la société (données relatives à la démographique, l’éducation, la santé, la sécurité, …). À partir de ces grands axes d’analyse, le projet a nécessité d’identifier les indicateurs les plus caractéristiques. Pour ce faire, l’ensemble de l’équipe municipale a participé à l’effort de mobilisation des données statistiques grâce à l’analyse de la disponibilité de l’information et à la structuration de l’échange de la donnée au sein des différents services municipaux. À l’issue de cette approche quantitative, une approche subjective par enquête auprès de la population a été menée pour savoir ce que les citoyens pensent de leur ville et d’éclairer la municipalité sur la hiérarchie des problèmes relatifs à la qualité de vie. Cette enquête est menée auprès de 2 400 ménages de quatre secteurs géographiques de la ville de Porto. Ce projet se propose ensuite de croiser les approches quantitatives et les résultats de cet audit des perceptions citadines.
Cette démarche d’évaluation de la qualité de vie des « portuenses » (les habitants de Porto) prend le contre-pied de l’étude élaborée sur la ville de Lyon puisque celle-ci se base sur les représentations des habitants et des professionnels pour identifier, en amont, les critères légitimes de la mesure de qualité de vie. Cependant, la présentation de ces deux initiatives et les débats qui leur ont fait suite témoignent à la fois de la nécessité et de la difficulté de l’évaluation de la qualité de vie. La mise en perspective des expériences menées au sein des villes de Porto et de Lyon confirme que les problématiques des uns et des autres (légitimité des indicateurs, disponibilité des données statistiques, comparaison des approches subjectives et objectives de la qualité de vie, …) restent globalement identiques et tentent de répondre à un même objectif : « comment construire des outils d’évaluation qui décrivent au mieux la réalité des phénomènes urbains ? ». Cet échange a également permis d’interroger les acteurs présents, qu’ils soient politiques ou techniques, sur l’utilité et l’opérationnalité de ces observatoires et d’évoquer la nécessité d’organiser, de manière efficiente, l’intégration des diagnostics aux différents systèmes d’actions. Cette expérience nous a permis de prendre connaissance des modes de résolution de problématiques similaires aux nôtres, de promouvoir des échanges d'expériences et de participer au réseau des métropoles européennes.
Comme nous venons de le montrer, l’élaboration de cette méthode d’évaluation de la qualité de vie quotidienne a été au centre d’une multitude d’échanges aussi variés qu’enrichissants. Sollicitée par des instances à la fois universitaires et professionnelles, sur des principes tantôt conceptuels, tantôt méthodologiques toujours afin d’optimiser l’observation urbaine et de promouvoir la mesure de la qualité de vie, cette démarche a été l’occasion de fédérer des réseaux d’experts très diversifiés. La mise en relation des problématiques, des outils, des méthodes, des savoirs-faire et des limites des travaux d’horizons divers a permis de formaliser l’échange et le partage d’expériences variées. Quelque soit le public ou l’objectif des rencontres, l’ensemble des séminaires auxquels nous avons été conviés ont permis à chacun de progresser tout en participant à la formalisation d’une réflexion sur la qualité de vie de plus en plus aboutie et consensuelle. Cette notion de qualité de vie demeure donc au cœur d’une dynamique de partage, de confrontation, de complémentarité des expériences. Cependant, cette recherche de transversalité dépasse largement le cadre conceptuel et méthodologique. La dimension multithématique de la qualité de vie et la diversité des critères nécessaires à sa mesure induisent un rapprochement technique, cette fois. La réalisation de ce travail a donc été l’occasion de formaliser des collaborations plus techniques en fonction de la spécificité de chacun des indicateurs de qualité de vie.
Grand Lyon, 2002, Synthèse des actes, Colloque « Indicateurs de développement durable : jeux et enjeux ». 101 pages.
Société d’Ecologie Humaine, juillet 2002, XIVèmes journées scientifiques de la SEH. Colloque international, « La qualité de vie au quotidien : cadre de vie et travail ». Marseille, 49 pages.
Site Internet de l’association : www.respect.asso.fr
Ce programme d'Analyse Concertée des Transformations et des Equilibres Urbains (Acteur) a pour objectif « l'élaboration de méthodes et la mise en place d'outils permettant de rationaliser l'observation des mutations urbaines. Il s'appuie sur une approche transversale des problématiques concernées, en vue de sélectionner des indicateurs qui pourront être utilisés pour établir un diagnostic, comprendre l'évolution spécifique d'un territoire ou encore participer à la mise en place d'un projet de développement... ». Site Internet : www.certu.fr/acteur
Club Eco-FNAU, septembre 2004, Document de travail sur l’approche de la mesure de la qualité de vie, 11 pages.
Club Eco-FNAU, septembre 2004, Document de travail sur l’approche de la mesure de la qualité de vie, 11 pages.
PORTO CITY COUNCIL, 2004, Monitoring System on Urban Quality of Life. Coordinators : Isabel MARTINS, Luis DELFIM SANTOS, Studies and Planning Unit, Porto, 144 pages.