4.2. Confrontation entre la réalité des phénomènes et leur perception

Notre travail repose sur la volonté d’identifier des critères pertinents de la qualité de vie. C’est à travers cet exercice de légitimité critériologique que nous avons fondé l’évaluation objective de la qualité de vie. L’approche de la qualité de vie s’appuie ainsi sur des connaissances perceptuelles donnant sens à son estimation. C’est en respectant au mieux la connaissance des représentations subjectives des habitants et des professionnels que l’évaluation de la qualité de vie a été menée. La réalisation d’une dizaine de diagnostics thématiques permet par conséquent de mener l’analyse des disparités spatiales des cadres de vie lyonnais. L’approfondissement de cette méthode pourrait aboutir à une restitution de cette évaluation auprès de la population afin de prendre connaissance des réactions occasionnées par cette approche objective des cadres de vie. La boucle pourrait ainsi être bouclée : les perceptions citadines donnent corps aux critères de mesure de la qualité de vie, l’évaluation objective des espaces de vie étant ensuite proposée à l’appréciation des habitants.

Certes, l’approche objective et quantitative des territoires permet de mobiliser une connaissance précieuse, il ne semble pourtant pas dépourvu d’intérêt, à l’issue de cette production, d’envisager une « confrontation » entre l’objectivité des phénomènes et la manière dont ils sont perçus par ceux qui les vivent au quotidien. Il semble donc opportun de s’enquérir de la perception que les résidants ont de leur environnement. Le but de cette démarche est de confronter la territorialisation des indicateurs objectifs de la qualité de vie aux perceptions des habitants. Il s’agit pour cela d’investir le champ de l’appréciation des conditions de vie dont l’ambition est de saisir l’interprétation subjective du monde qui repose sur l’attribution de qualité et de valeur formulée par les individus eux-mêmes.

Le retour auprès de la population pourrait être organisé au travers d’une prise de contact limitée et ciblée avec un échantillon représentatif de certains quartiers de la ville. Pouvant prendre la forme d’entretiens individuels en face à face ou de petits groupes de travail et de suivi, la démarche supposerait un investissement conséquent. L’ensemble des diagnostics urbains ou seulement certains d’entre eux pourraient servir de base, voire de référence, au questionnement subjectif permettant de connaître l’opinion que portent les habitants sur leur territoire de vie. L’enjeu serait de saisir les réactions provoquées par cette représentation de leur territoire et de discuter de la confirmation ou l’infirmation des conditions vécues que cela suscite. L’analyse comparée de l’appréciation de l’existant constitue ainsi un enrichissement considérable. L’étude des niveaux de satisfaction à l’égard de cette connaissance objective peut ainsi devenir une perspective intéressante de développement. Il s’agit de prendre connaissance et d’estimer l’écart, s’il existe, entre la réalité des phénomènes et la manière dont ils sont vécus et perçus au quotidien. D’un point de vue technique et politique, l’approche objective initialement menée permet de dresser un bilan des orientations à mener afin d’améliorer la qualité de vie du plus grand nombre et de prioriser au mieux les orientations de développement. Cependant, cette démarche de retour à la population permettrait aux collectivités territoriales de mieux justifier leur intervention, d’améliorer leur communication et de rendre pédagogique l’action publique. Pour reprendre l’exemple de la propreté des rues, en soumettant la représentation cartographique de l’effort d’entretien des rues de Lyon aux habitants, certains écarts entre réalité des fréquences de nettoiement et perception de la propreté pourraient apparaître. Une telle démarche peut alors permettre soit de redéployer les forces de nettoiement afin de satisfaire des habitants réellement privés d’intervention, soit de démonter l’ampleur de l’effort mobilisé malgré l’éventuel mécontentement à l’égard de la propreté. Il serait alors envisageable de mieux communiquer sur l’intervention publique afin de tendre vers une prise de conscience collective pour confier une responsabilité citoyenne à l’égard de la qualité de l’environnement qui nous entoure. Cette démarche volontariste permettrait alors de formaliser une étroite relation entre les élus, les techniciens et les citoyens pour que chacun, conscient de ses responsabilités, œuvre à son échelle pour l’amélioration de la qualité de vie.