2.7.7 Discussion

Dans la base « BACIS » (Boelens, 2001) définit l’odeur du benzaldéhyde comme ‘douce’, ‘aromatique’, ‘épicée’ et ‘caractéristique de l’huile d’amande amère’ et l’odeur du guaiacol comme ‘aromatique’, ‘phénolée’ et ‘brûlée’. Selon la définition de l’accord que nous avons admise, et si la prédiction de Turin se vérifiait, c’est à dire qu’un mélange équivolumique de ces deux composés odorants conduise à la perception d’une odeur de vanille, nous aurions un bel « accord fusion », un accord aromatique parfait. On assisterait en effet à l’apparition d’une nouvelle note odorante (de vanille) dans un mélange de deux substances qui flairées seules (hors mélange) ne conduisent pas à la perception d’un note odorante ‘vanillée’.

Dans le premier protocole, en proposant différents mélanges de benzaldéhyde et de guaiacol à évaluer par rapport à l’odeur de vanilline (odeur de vanille communément admise), nous avons voulu vérifier la présence d’une perception d’une note odorante proche de celle de la vanille. Lors de cette expérience, nous avons pu mettre en évidence que le mélange de benzaldéhyde et de guaiacol, dans la mesure où sa concentration est relativement élevée (10-2 et 10-1) peut éventuellement évoquer une légère note odorante vanille (note de 7/10 en similitude par rapport à une référence vanille). Ces résultats vont dans le sens de ceux trouvés dernièrement par une équipe du Laboratoire de neurogénétique et comportement de la Rockefeller University (Keller & Vosshall, 2004). Dans cette étude, des sujets ont évalué la similitude de l’odeur de mélange de benzaldéhyde et de guaiacol (à 2 concentrations différentes : 1/100 et 1/10000) par rapport à l’odeur de vanille sur deux types d’échelles psychophysiques : une échelle en 13 points bornée et labellisée (de ‘pas vanille’ à ‘extrêmement vanille’) et une échelle d’évaluation de la similarité entre mélange binaire et une référence vanilline. Leurs résultats ont montré que les deux mélanges testés ne conduisent pas à la perception ‘extrêmement vanille’ et que ces mélanges sont perçus comme très différents de la vanilline, au même titre que chacun des composants pris individuellement comme l’indique la figure 36.

Fig. 36 : Résultats des évaluations psychophysiques de l’odeur du benzaldéhyde, du guaiacol ainsi que de leur mélange binaire (dilution 1/10 et 1/100). Aucun mélange n’a permis la perception d’une note vanille plus forte que dans les composés flairés séparément (a). De la même manière, l’odeur de chaque composant flairé seul et l’odeur du mélange binaire correspondant n’a jamais été perçue comme similaire à l’odeur d’une référence vanilline D’après (Keller & Vosshall, 2004).

Malgré ce résultat peu encourageant, nous avons voulu poursuivre notre étude en faisant l’hypothèse que l’incertitude de nos sujets quant à la présence d’une note résultante ‘vanille’ pouvait être perturbée par la présence simultanée d’autres notes odorantes dans le mélange. Autrement dit, nous ne serions pas dans un cas d’accord fusion parfait, mais plutôt dans un cas d’accord « partiel ». Ainsi, en ajoutant un nouveau protocole à notre étude grâce auquel les sujets seraient amenés à classer une sélection d’odorants (parmi lesquels des composants du mélange binaire, mais aussi deux références vanille possible), nous avons imaginé pouvoir quantifier la présence de cette note odorante ‘vanille’ dans les mélange binaires présentés.

Ainsi, l’expérience dans laquelle les sujets devaient classer sept odeurs en fonction de leur ressemblance à l’odeur de vanille a positionné le mélange binaire ‘AccF Van 3:1’ en troisième position, juste après les deux références vanille (vanilline et arome vanille). Les mélanges en rapport 1:1 et 1:3 ayant été relégués aux derniers rangs du classement, après les composants flairés séparément (cf. Fig. 33).

Cependant, certains résultats ont posé le doute sur cette observation. L’accord constitué de 75% de Gaïacol et de 25% de benzaldéhyde a obtenu un pseudo-consensus quant à sa note vanillée et a été positionné en 3ème position. Mais ces résultats indiquent que ce placement n’a pas fait l’unanimité. Cette incertitude des sujets quant à cette odeur est de plus renforcée par le fait que l’évaluation de la typicité et de la comestibilité de l’odeur de ce mélange n’a jamais été considérée comme étant meilleure que les autres mélanges ni d’ailleurs comme les composants pris séparément.