2.8.1 Cadre théorique

Selon le principe élaboré dans la théorie de Calkin et Jellinek (1994), une équipe de chercheurs proposa de masquer l’odeur de l’acide méthyle héxénoïque (composant de la sueur humaine, entre autre) par l’odeur de l’éthyle ester correspondant à cet acide qui possède une odeur relativement agréable (Pierce et al., 1995).

Les auteurs ont postulé que le masquage peut être considéré comme une « adaptation » sensorielle olfactive provoquée par des molécules structurellement proches (Moncrieff, 1956; Engen, 1982). La similarité structurale entre les molécules n’est pas une condition sine qua non au phénomène de masquage olfactif (Köster, 1971) et des molécules de structures différentes mises en mélange peuvent conduirent à un masquage olfactif efficace (Pierce et al., 1993). Cependant, il semblerait que l’adaptation croisée (c'est-à-dire entre deux molécules non identiques) survienne de manière plus probable dans le cas de molécules voisines, c’est à dire qui partageraient un certain nombre de caractéristiques structurales (Pierce et al., 1996).

D’autre part, même dans le cas de molécules structurellement proches, l’adaptation croisée telle qu’elle a pu être observée ne semble pas être réciproque. Si une molécule « A » donnée en masque une seconde « B », il n’est pas obligatoire que la molécule « B » masque la molécule « A » de manière symétrique. Il semblerait qu’une explication de cette asymétrie repose sur les différences physiques (forme et taille) des parties hydrophobes des molécules en jeu. En effet, si le récepteur concerné est hydrophobe, ils devraient avoir plus d’affinité pour des composés encore plus hydrophobes. Selon cette conception les éthyles esters s’opposeraient aux acides : l’odeur d’un acide gras serait masquée par son éthyle ester, alors que l’odeur de l’éthyle ester, bien que réduite, ne serait pas masquée par l’odeur de l’acide correspondant : les récepteurs communs seraient en partie occupés par les esters, limitant l’accès des acides, et donc, dans le cas qui nous intéresse, à la perception de la note malodorante qui les caractérise.

Notre expérience avait pour objectif de contribuer à la compréhension du masquage olfactif selon la théorie avancée par Pierce et al. en 1995. Ainsi, nous avons sélectionné 2 couples acide/ester d’éthyle et avons élaboré un protocole psychophysique original pour tester l’existence d’un phénomène de masquage olfactif.