Les engagements de financement et de garantie (loan commitments) constituent un segment important de l’activité contemporaine des banques et représentent une part significative de leurs opérations de hors-bilan.
On peut définir ces engagements comme des promesses données par la banque à ses clients (ou aux créanciers de ces derniers), en vertu desquelles, celle-ci s’engage à les financer ou à s’acquitter de leurs dettes, si certains événements (prédéfinis dans le contrat) viennent à se produire. La banque perçoit, à l’occasion de l’octroi de ces engagements, des revenus essentiellement sous forme de commissions d’engagement.
Plus précisément, les engagements de financement correspondent à des promesses de concours en trésorerie qui sont faites en faveur, soit d’une autre banque (accords de refinancement, acceptations à payer ou engagement de payer, confirmation d’ouverture de crédits documentaires, etc.), soit de la clientèle régulière (ouverture de crédits confirmés, crédits stand-by, lignes de substitution des billets de trésorerie, engagements sur facilités d’émissions de titres, etc.). S’il arrive qu’une banque rejoigne un syndicat bancaire (consortium) ayant accordé des promesses de financement, elle n’inscrit dans son hors-bilan que la quote-part qu’elle s’est engagée à financer.
Pour leur part, les engagements de garantie, également connues sous l’appellation « engagements par signature », correspondent pour l’essentiel à des cautions et avals qui font intervenir trois parties : le garant (la banque), le donneur d’ordre (le client) et le bénéficiaire (un tiers). A ce titre, le garant s’engage en faveur du bénéficiaire à assurer la charge d’une obligation souscrite par le donneur d’ordre en cas de défaillance de celui-ci (recueil Bafi 66 , p.138001). En règle générale, les engagements de garantie sont classés suivant la qualité du donneur d’ordre. Lorsque celui-ci relève de la clientèle régulière, on y trouve : les cautions immobilières, les cautions administratives, douanières et fiscales, les garanties financières, etc. Ces engagements peuvent soit différer certains décaissements ou les éviter, soit encore, accélérer certaines rentrées de fonds. Lorsque le donneur d’ordre est une banque, ces engagements de garantie prennent la forme de : confirmations d’ouverture de crédits documentaires, acceptations à payer, etc.
L’analyse de l’évolution des hors-bilans bancaires permet de constater l’impressionnante croissance des engagements de financement et de garantie. En France, il apparaît sur le graphique n°39 que, de 1993 à 2003, les engagements de garantie et de financement accordés à la clientèle régulière ont augmenté de 47% à 68% par rapport aux crédits réellement accordés à cette clientèle. Au cours de la même période, les engagements de garantie et de financement consentis aux établissements de crédit sont passés de 17% à 30% relativement aux prêts octroyés à ces mêmes établissements.
Source : Commission Bancaire, Rapports annuels 1993-2003.
Aux Etats-Unis, les loan commitments and guarantees (credit revolving commitments, confirmed credit lines, backup lines of credit on commercial papers, note issuance facilities, banker’s acceptances, etc.), qui sont l’équivalent en France des engagements de financement et de garantie, ont également connu une évolution très significative comme on peut le constater à travers le graphique n°40. Alors qu’ils ne représentaient que 20% relativement aux crédits réellement consentis par les banques américaines au début des années soixante-dix (LeRoy Miller et Vanhosse, 2001, p.448), ils surpassent aujourd’hui ces crédits grâce à une très forte ascension qui s’inscrit dans le temps. En effet, en 2003, les loan commitments représentaient plus de 1,2 fois (5396 milliards de dollars) le total des crédits accordés par les banques américaines (4352 milliards de dollars).
Source : FDIC, Quarterly Banking Profile, différents numéros, 1993-2003 ( http://www2.fdic.gov/qbp ).
Le tableau n°24 qui suit reprend les principaux engagements de financement et de garantie consentis par les banques américaines en 2003. On remarque la prédominance des engagements sous formes de crédits à la consommation (Credit card lines) qui représentent un peu moins de 59% du total des engagements.
| Total des engagements | 5772,6 |
| Engagements de financement non mobilisés 1 , dont : | 5398,9 |
| - Engagements renouvelables et hypothécaires2 | 317 |
| - Engagements de cartes de crédit3 | 3385,8 |
| - Engagements immobiliers et agraires4 | 187,8 |
| - Engagements de souscription5 | 2,5 |
| - Autres engagements | 1505,8 |
| Lettres de crédit 6 | 373,2 |
| Acceptations 7 | 0,5 |
1) Total unused commitments, 2) Revolving, open-end lines secured by 1-4 family residential properties, 3) Credit card lines, 4) Commercial real estate, construction, and land development, 5) Securities underwriting, 6) Letters on credit, 7) Participations in acceptances.
Source : FDIC, Quarterly Banking Profile, 2003 ( http://www2.fdic.gov/qbp ).
Sur le plan comptable, il faut préciser que dés le moment où les engagements de financement et de garantie sont contractés, et aussi longtemps qu’ils ne sont pas mobilisés – avant leur expiration – ils sont enregistrés au niveau du hors-bilan. En revanche, aussitôt qu’ils sont mis en œuvre, ils intègrent automatiquement l’actif du bilan bancaire, et sont annulés du hors-bilan. Ces engagements se transforment alors en crédits classiques donnant lieu – pour l’essentiel – à des rémunérations sous forme d’intérêts et non plus sous forme de commissions.
Sur le plan économique, les engagements de financement et de garantie sont à l’origine d’importants avantages, partagés entre les entreprises clientes qui les souscrivent et leurs banques. Pour les premières, ces engagements représentent un matelas de sécurité en cas de difficultés financières. En outre, ils valorisent leur image de marque et leur notoriété en transmettant un signal positif à leurs partenaires économiques. Ceux-ci, et notamment les fournisseurs, sont plus en confiance lorsqu’ils savent qu’une entreprise cliente pourra compter sur le soutien financier de sa banque en cas de problème. Dans la même optique, les engagements de financement et de garantie rassurent les investisseurs potentiels qui souhaitent acquérir les titres d’une entreprise 67 (Greenbaume et Thakor, 1995, p.334, p.340). On constate d’ailleurs que beaucoup de firmes souscrivent ce genre d’engagements juste avant une introduction en bourse ou l’émission de titres de créances sur les marchés de capitaux.
Par ailleurs, ces engagements permettent une gestion plus rationnelle de la trésorerie et diminuent sensiblement les coûts financiers qui se réduisent souvent à de simples commissions, tout en garantissant l’obtention de financements avec des conditions prédéfinies. Dans ce cadre, une entreprise qui prévoit d’emprunter dans l’avenir, mais qui craint d’être rationnée au moment de l’emprunt, peut souscrire un engagement de financement qui l’assurera d’un accès au crédit lorsqu’elle en aura besoin. Ce moment venu, si les taux débiteurs du marché deviennent supérieurs au taux de référence de l’engagement contracté (celui-ci étant supposé à taux fixe), l’entreprise tirera un avantage certain en empruntant, et réduira d’autant ses charges financières.
En revanche, si les taux débiteurs baissent, elle pourra toujours emprunter sur le marché et ne perdra que les commissions versées à la banque.
Du point de vue de la banque maintenant, on constate que les engagements de financement et de garantie représentent une source idéale de revenus hybrides. Ils génèrent des commissions tant qu’ils ne sont pas mobilisés et produisent des intérêts lorsqu’ils se transforment en crédits classiques. En outre, leur nature contingente en tant qu’élément du hors-bilan fait d’eux de faibles consommateurs en fonds propres.
Par ailleurs, avec le développement de la titrisation et la vente des créances bancaires, ils peuvent facilement être cédés entre les banques. Certaines de celles-ci peuvent alors les consentir et les vendre aussitôt que les clients demandent la concrétisation de ces engagements, laissant ainsi la charge de leur financement à d’autres banques.
Dans ce cadre, il ne faut pas oublier le fait que sous certaines conditions contractuelles, les banques peuvent faire valoir la clause du « Material Adverse Change » (MAC) qui les dispense de respecter leurs engagements en cas de détérioration majeure de la situation financière du client entre la date de la signature de l’engagement et sa date d’exécution.
A ce sujet, plusieurs auteurs (Lewis, 1990, p.232 ; Goux, 1990, p.680 ; Greenbaume et Thakor, 1995, p.345) considèrent que l’octroi d’un engagement de financement par une banque s’apparente à la vente d'une option non négociable de vente, c’est-à-dire d'un put (le client, moyennant paiement d’une commission à la banque – le prix de l’option – achète le droit de lui vendre un titre de dette primaire, à un prix fixé et durant un certain intervalle). Toutefois, à la différence d’une option de vente classique, la banque peut ne pas s’exercer et refuser de financer l’acquéreur de l’engagement, en vertu de la clause MAC.
Toujours dans le prolongement des nouvelles activités bancaires génératrices de commissions et de revenus divers, nous allons maintenant nous intéresser aux opérations bancaires sur instruments dérivés qui ont enregistré, ces dernières années, une croissance très rapide.
Base de Donnée des Agents Financiers (entrée en vigueur le 1er janvier 1993).
Lorsque certaines informations sur une entreprise ne sont pas disponibles, des investisseurs potentiels peuvent déduire de la souscription d’un engagement de financement ou de garantie par cette entreprises auprès d’une banque réputée, qu’elle est viable et potentiellement rentable (du fait de la supériorité informationnelle de la banque qui a accès à des informations privatives). Les investisseurs potentiels peuvent alors investir dans ladite entreprise et économiser d’importants coûts d’information et de transaction.