1.2.3. La transposition des asymétries d’information à la théorie bancaire

La prise en compte des imperfections de l’information va révolutionner la théorie de la banque. En effet, dès la fin des années soixante-dix, plusieurs travaux théoriques entreprennent d’endogénéiser l’existence et l’activité des banques (ainsi que celles des autres intermédiaires financiers) à partir de leur aptitude à résoudre les problèmes engendrés par les imperfections de l’information : Leland et Pyle (1977), Draper et Hoag, (1978), Townsend (1979), Campbell et Kracaw (1980), Chan (1983), Ramakrishnan et thakor (1984), Diamond (1984, 1996), Fama, (1985), Bernanke et Gertler (1985), Gale et Hellwig, 1985, Boy de Prescott (1986), Williamson, (1986, 1987a,b), Terlizzese (1988), Haubrich (1989), Allen (1990) Seward (1990), Wang et Williamson (1993), Bester (1995), entre autres.

La mise en évidence des phénomènes d’asymétrie d’information va donner une nouvelle dimension à la traditionnelle relation de marché entre prêteur et emprunteur.

La plupart des modèles proposés vont faire du contrat de financement d’un projet d’investissement (financement par la dette mais également par la prise de participations), le cadre d’analyse privilégié de l’asymétrie d’information sur le marché financier.

De fait, l’emprunteur dispose naturellement d’une meilleure information que le prêteur (ou actionnaire) sur les divers paramètres de son projet (capacité réelle de production, nature du marché, distribution des cash-flows, etc.). Or, ces paramètres déterminent directement les résultats du projet de l’emprunteur qui, à leur tour, déterminent l’espérance de rendement du prêteur.

L’asymétrie d’information apparaît dès lors sous deux formes :

  1. Une anti-sélection liée au fait que le prêteur, incertain de la réelle nature de l’emprunteur (bon ou mauvais), encourt le risque de sélectionner et de financer un projet de mauvaise qualité (trop risqué).
  2. Un aléa moral, lié à l’incertitude sur l’utilisation que l’emprunteur va faire des fonds qui lui ont été prêtés, une fois le contrat signé. En effet, le résultat final de l’activité de l’emprunteur n’est parfaitement connu que par celui-ci. C’est pourquoi, le prêteur encourt le risque d’une exécution partielle du contrat ou tout simplement, de sa non-exécution.

Les nombreux travaux théoriques portant sur ces problèmes d’asymétrie d’information vont se focaliser sur les avantages dont disposent les banques (et les autres intermédiaires financiers), relativement à la finance directe, en ce qui concerne la production d’information, la sélection et le contrôle des emprunteurs. Ils montrent qu’en réduisant les asymétries d’information, les banques économisent d’importants coûts et contribuent significativement à une meilleure allocation des ressources financières au sein de l’économie, chose qui rend leur activité très utile.

Dans ce qui suit, nous nous proposons de revenir plus en détail sur l’opacité de l’information qui caractérise la finance directe et qui justifie la présence des banques. Nous verrons dans un premier temps le phénomène de l’anti-sélection (a), puis dans un second temps, celui de l’aléa moral (b).