Section 3 : La reconsidération de la nature de la production bancaire

Introduction

La section précédente nous a permis de saisir la nature et les paramètres des activités d’intermédiation et hors intermédiation exercées par les banques contemporaines. A présent, nous allons nous intéresser, plus concrètement, au cadre d’analyse de la production bancaire. Nous entrons dès lors dans le champ de l’économie industrielle de la banque. Cette branche a pour objet l’étude du comportement de la banque en l’assimilant à une « firme » ou une « industrie » quelconque, transformant des « inputs » en « outputs ».

L’approche industrielle de la banque s’est principalement développée aux Etats-Unis, à partir des années cinquante, grâce aux travaux des économistes de la FED (Alhadeff, 1954 ; Horvitz, 1963, par exemple). L’assimilation de la banque à une simple firme soumise aux contraintes classiques d’optimisation de sa fonction objectif s’est appuyée sur des techniques économétriques et quantitatives qui avaient déjà fait leurs preuves dans les industries réelles 105 . Berger et Humphrey (1997, p. 01) identifient trois motivations majeures à ces recherches :

  1. informer les autorités de régulation bancaire et leur fournir un outil d’aide à la décision en matière de déréglementation, de fusions/acquisitions, de structure de marché, etc. ;
  2. faire avancer l’état de l’art sur la firme bancaire ;
  3. améliorer la performance managériale des banques en identifiant les « bonnes » et les « mauvaises » pratiques de gestion, en fonction des estimations d’efficience réaliséesParmi les questions qui intéressent les banquiers, on peut citer : est-il avantageux d’accroître sa taille ? Si oui, cette croissance doit-elle être interne ou externe ? Faut-il privilégier une intégration verticale ou horizontale ? etc..


Etant donnée l’étendue de ce champ de recherche, nous nous limiterons à l’analyse du processus de production dans la banque, en mettant l’accent sur ses inputs et outputs. L’objectif poursuivi ici est de montrer, qu’en tant que composant important de la théorie bancaire contemporaine, le corpus de travaux portant sur la modélisation de la production bancaire est aujourd’hui dans l’impasse. Il semble dès lors nécessaire d’envisager de nouvelles approches de la production bancaire. L’approche « servicielle » nous semble représenter l’une des approches les plus prometteuses en la matière.

Cette troisième section est organisée comme suit. Dans un premier temps, nous nous intéressons à l’analyse industrielle de la production bancaire et évoquons ses limites (3.1). Dans un second temps, nous faisons appel à l’économie des services pour tenter de modéliser de façon opérationnelle la production bancaire (3.2).

Notes
105.

Les techniques d’estimation de la fonction de coûts bancaires ont beaucoup évolué : fonction de type CES (à élasticité constante), fonction de type Cobb-Douglas, fonction de coût multi-produits de type Translog, et maintenant, méthodes d’analyse non paramétriques comme la DEA (Data Envelopement Analysis) ou la FDH (Free Disposal Hull). Pour une revue de la littérature sur ces techniques, voir Berger et Humphrey (1997).