De nos jours, la gestion des moyens de paiement représente l’une des fonctions clés du secteur bancaire 142 . Quelques chiffres pour s’en convaincre. D’après les dernières statistiques de la FBF, on comptait en France, à la fin 2003, 25 789 guichets bancaires, 41.988 DAB/GAB 143 , 770 000 terminaux de paiement installés chez les commerçants et 230 000 automates de paiement (publiphones, distributeurs de titres de transport, etc.). Aujourd’hui, le taux de bancarisation des Français est de 99%, alors qu’il ne dépassait pas les 20% à la fin des années soixante 144 .
Pour l’année 2003, le nombre de comptes ordinaires à vue entretenu par la clientèle non financière dans les banques en France était proche de 57,4 millions, pour une population de près de 62 millions d’habitants. Ces derniers disposent de près de 47,6 millions de cartes bancaires et ont réalisé 5,6 milliards d’opérations (paiements et retraits), soit 16 millions d’opérations par jour. On estime ainsi que 9 personnes sur 10 détiennent une carte (parmi celles qui sont en âge d’en détenir une) et que chaque carte enregistre 124 opérations par an.
Au cours de la même année, 4,3 milliards de chèques ont été émis en France, soit 17 millions de chèques échangés quotidiennement par les banques (on comptait 75 chèques par an et par habitant en 2002). Le montant total de ces chèques représente 2 567 milliards d’euros, soit plus d’une fois et demi le PIB de l’économie nationale estimé à 1 557 milliards d’euros en 2003. Ceci dit, il suffit de moins d’une semaine pour que les transferts interbancaires via le système de paiement représentent un montant équivalent au PIB annuel.
Ces quelques chiffres suffisent à monter le rôle vital des banques en matière de gestion des moyens de paiement. En fournissant aux agents économiques des services de liquidité et de compensation, les banques contribuent à l’efficience macroéconomique à travers deux externalités positives ; la première a trait à la réduction des coûts d’information et de transaction inhérents aux paiements. La seconde découle de l’accélération de la vitesse de circulation de la monnaie, directement liée au volume général des affaires (Lobez, 1997, p.07). Le fait que les banques aient été amenées à offrir des services de paiement nous semble être lié à trois types de considérations : historique, fonctionnelle et institutionnelle.
L’histoire économique s’accorde sur le fait que la monnaie scripturale soit apparue bien avant la monnaie de billet. En effet, dés le 11e siècle, les banquiers italiens (génois) permettaient à leurs clients de régler leurs dettes par de simples virements entre comptes 145 . Par la suite, la création de « banques de transfert » dans tous les grands centres commerciaux européens encouragera l’invention de nouveaux instruments bancaires transférables et négociables.
Au fil des années, le billet de banque, le chèque, la carte à puce et aujourd’hui, la monnaie électronique font leur apparition. La compensation monétaire est ainsi devenue l’une des caractéristiques clés de l’activité bancaire, voire l’un de ses avantages absolus ; le secteur bancaire assure de ce fait, le rôle de « comptable social » (Stiglitz et Weiss, 1990, p.90 ; Lewis, 1992, p.203) de toute la nation 146 . Il semble évident que cette mission ne pouvait être convenablement assumée que par ce secteur, étant donnée la particularité de ses passifs liquides, qui endossent parfaitement le rôle de moyen de paiement.
Cependant, la large dépendance des agents économiques vis-à-vis des services de paiement bancaires ne peut être uniquement attribuée à des considérations d’ordre historique et fonctionnel. En effet, l’aspect institutionnel est tout autant important puisque, comme nous l’avons déjà noté, la confiance, noyau dur du rapport monétaire, ne pouvait durablement se manifester qu’à travers la garantie de l’Etat (le marché étant source de méfiance). C’est ainsi que l’implication du secteur bancaire dans les paiements monétaires lui a valu une attention toute particulière de la part des autorités publiques.
Dans ce cadre, Plihon (1995, p.144) souligne que ‘: ’ ‘«’ ‘ La contrepartie de cette place particulière des banques est leur mise sous tutelle publique ’ ‘»’ ‘.’ Aussi, compte tenu des effets pervers que le système de paiement peut véhiculer en tant que canal de transmission des chocs monétaires et financiers (voir la seconde section), les autorités publiques, garantes de l’intégrité économique nationale, ont vite fait de soigneusement l’encadrer et d’en limiter l’accès. A titre d’exemple, les banques autorisées à y intervenir, sont tenues par le respect de normes prudentielles strictes, telle que la constitution de sûretés 147 .
Par ailleurs, la gestion opérationnelle et la supervision du système de paiement, sont historiquement confiées à la BC, puisqu’elles découlent de son rôle de fournisseur en dernier ressort de moyens de paiements sûrs 148 . En outre, afin de promouvoir une circulation rapide de la monnaie centrale entre les banques, la BC intervient souvent dans le système, à la fois en tant « qu’opérateur » et « agent de règlement » 149 . Il faut dire que l’extrême attention accordée aux systèmes de paiement procède surtout des caractéristiques de biens collectifs qu’ils renferment.
Au sens de la mise à la disposition de la clientèle des moyens de paiements conventionnels et de la compensation des règlements.
Soit, environ 657 automates pour un million d’habitants. Aux Etats-Unis, on comptait 1 220 automates pour un millions d’habitants en 2002 (FBF, la banque en chiffres, 2004).
Cette ascension fulgurante est essentiellement liée à la mensualisation des revenus et l’élévation du niveau de vie.
A condition que le compte du débiteur et celui du créancier soient tous deux gérés par le même banquier.
Historiquement, c’est la recherche de sécurité (contre le vol et la fraude) et de disponibilité (des fonds entreposés) de la part des individus qui a fait que les banques jouent ce rôle aujourd’hui (Hicks, 1989, p.56).
Celles-ci protègent la BC d’éventuelles pertes en couvrant ses soldes débiteurs. Par ailleurs, elles épargnent aux intervenants le souci d’évaluer la solvabilité de chaque contrepartie. Ces sûretés prennent la forme d’espèces, d’obligations du Trésor et d’actions entrant dans les principaux indices (BRI, 2001, p.38).
La surveillance des systèmes de paiement et des systèmes de compensation et de règlement de titres comprend la définition de principes ou de standards pour leur conception et leur fonctionnement, la vérification de leur mise en œuvre et enfin, la surveillance des conditions effectives de fonctionnement et d’utilisation (Banque de France, 2000). Pour la zone Euro, l’article 22 des statuts du SEBC dispose que « […] la BCE peut arrêter des règlements, en vue d’assurer l’efficacité et la solidité des systèmes de compensation et de paiement au sein de la communauté et avec les pays tiers ».
L’opérateur assure la gestion régulière du système de paiement (calcul des positions débitrices et créditrices), alors que l’agent de règlement effectue le paiement définitif. Habituellement, la BC assure les deux fonctions, mais l’on trouve dans certains pays comme les Etats-Unis et la Grande-Bretagne des opérateurs privés. Il faut signaler que la surveillance de la BC s’étend également aux Systèmes de Compensation et de Règlement de Titres (SCRT), qui ont connu un véritable essor ces dernières années, compte tenu de l’importance croissante des titres dans le financement des agents économiques. En France, cette surveillance est conjointement assurée par la BC et le l’Autorité des Marchés Financiers (AMF).