Section 2 : L’encadrement des risques bancaires

Introduction

Comme nous l’avons noté précédemment, les banques sont à l’origine de deux types d’externalités collectives : positives et négatives 175 . Les premières ont trait aux diverses fonctions qui contribuent à l’efficience de l’économie, qu’elles soient liées à l’intermédiation de bilan, à l’intermédiation de marché ou aux activités de hors-bilan. Les secondes sont, en quelque sorte, le « revers de la médaille » et prennent la forme des risques inhérents à toutes ces fonctions. Il faut dire que ces risques ne sont pas des moindres puisqu’ils peuvent avoir de graves répercussions sur l’activité économique tout entière. C’est pourquoi, la réglementation bancaire focalise une grande partie de ses dispositifs sur l’encadrement dit prudentiel. Ce dernier s’articule autour de deux niveaux : Le risque systémique et le risque idiosyncratique.

Le risque systémique (2.1) renvoie au danger que fait encourir le système bancaire à toute une économie. Dans le passé, il était circonscrit au niveau national. Mais, la configuration actuelle de la sphère financière internationale l’a doté d’effets de contagion susceptibles de déstabiliser plusieurs systèmes bancaires à la fois. Lorsque ses signes se font ressentir, le salut de l’économie ne tient souvent qu’à l’intervention du PDR.

Le risque idiosyncratique (2.2), quant à lui, fait référence au danger que renferme en elle, chaque banque isolément. Il est aussi important que le risque systémique car il en est la manifestation microéconomique. Lorsque la banque est de petite taille, son risque idiosyncratique peut être neutralisé, et elle peut donc disparaître. Cependant, si la banque est de taille importante, c’est souvent la doctrine du too big to fail qui prévaut 176 .

Or, c’est précisément cette doctrine qui, du fait de l’accélération des opérations de fusions-acquisitions, caractérise aujourd’hui les systèmes bancaires nationaux. Plus concrètement, le risque idiosyncratique renvoie à une série de risques découlant de la gestion courante bancaire. Il s’agit, entre autres, du risque d’illiquidité, du risque d’insolvabilité et du risque de marché. Ceux-ci sont le plus souvent gérés par le biais de contraintes réglementaires prudentielles, continuellement mises à jour comme c’est le cas actuellement avec la réforme Bâle II.

Notes
175.

D’après l’analyse empirique des économistes de la Banque Mondiale : Barth, Caprio et Levine (2001), il ressort que les systèmes bancaires à mauvais fonctionnement peuvent empêcher le progrès économique, aggraver la pauvreté et déstabiliser les économies, tandis que les systèmes bancaires à bon fonctionnement accélèrent la croissance économique de longue durée.

176.

Au cours de la dernière décennie, la vague de fusions-acquisitions a renforcé la concentration des secteurs bancaires nationaux. Cela s’est surtout traduit par la baisse du nombre de banques et par une forte augmentation de la taille des bilans bancaires. Par exemple, aux Etats-Unis, le nombre de banques commerciales a chuté de 10.960 à 7.769 entre 1993 et 2003. A la fin 1993, on comptait 64 banques avec un bilan supérieur à 10 milliards de dollars. Ces banques représentaient respectivement 48,4% et 43,8% de la situation globale et des dépôts de l’ensemble du secteur bancaire. A la fin 2003, on comptait 83 banques avec un bilan supérieur à 10 milliards de dollars. Celles-ci représentaient respectivement 73% et 69% de la situation globale et des dépôts de l’ensemble du secteur bancaire (Source : FDIC, Quarterly Banking Profile, 1993 et 2003, http://www2.fdic.gov/qbp/qbpSelect.asp?menuItem=QBP ). En France, le nombre de banques a chuté de 590 à 432 de 1993 à 2003. Relativement à l’ensemble des banques, les cinq premières banques françaises (Crédit Agricole, Crédit Lyonnais, BNP-Paribas, Société Générale, Crédit Mutuel) représentaient à la fin 2003, 60,1% de la situation globale, 68,8% des dépôts et 60% des crédits. L’estimation de l’indice Herfindahl-Hirschman permet de rendre compte de cette concentration. En effet, on peut considérer qu’une valeur inférieure à 0,10 reflète un marché peu concentré ; comprise entre 0,10 et 0,18 d’un marché modérément concentré et supérieure à 0,18 d’un marché fortement concentré. Au 31.12.2003, la concentration du secteur bancaire français apparaît modérée pour le total de la situation (0,11) et pour l’activité de crédits au particuliers (0,15). En revanche, l’activité de collecte des dépôts est caractérisée par une concentration marquée (0,21). Pour plus de détails, voir le Rapport annuel de la Commission bancaire (2003, p.35, http://www.banque-france.fr/fr/publi/main.htm ).