2.2. Création et symbolisation chez D. Anzieu

Dans son ouvrage intitulé Le corps de l’œuvre, D. Anzieu (1981) 57 s’intéresse aux processus créatifs chez les artistes (écrivains). Pour cela, l’auteur, propose cinq phases dans cette création, à savoir l’état de saisissement créateur au cours duquel il y a déclenchement du travail créateur ; la prise de conscience liée à l’attention portée à une représentation. Autrement dit, il s’agit pour le créateur de saisir une réalité psychique de moindre importance, de la transformer en « noyau générateur » d’œuvre d’art ou de pensée ; la création d’un code en lui donnant une opérativité, c’est-à-dire qu’un corps est donné au code pour permettre la production de l’œuvre ; la composition de l’œuvre qui se fait par le choix d’un genre, d’un travail de style, d’agencement interne des parties dans une organisation de l’œuvre et la production de l’œuvre au dehors se caractérisant par l’exposition de l’œuvre au public pour affronter la critique ou l’indifférence.

Cependant, ces phases sont des registres de fonctionnement ou des états psychiques qui peuvent se rencontrer dans d’autres domaines que l’art. C’est le cas du domaine psychopathologique ou encore des domaines culturels comme la religion, les systèmes de pensée. Pour cela, en se servant des travaux anthropologiques de C. Lévi-Strauss (1964 58 , 1967 59 , 1968 60 ), D. Anzieu (1989) 61 construit son échelle des symbolisations. Par celle-ci, l’auteur cherche à saisir la mobilisation psychique de chacun. Cette mobilisation peut être superficielle ou profonde, partielle ou totale. A cet effet, l’auteur (1989) différencie-t-il cinq niveaux de symbolisation :

Le premier niveau porte sur les qualités sensibles. Ce sont les « logique des sensations ». Le deuxième niveau porte sur la « logique des formes ». Le troisième niveau s’intéresse aux relations d’opposition et de passage d’un terme à un autre. La quatrième niveau fait ressortir des relations de classifications temporelles, des processus dialectiques, etc. Et le dernier niveau, concerne la pensée dite logique.

Ainsi, pour D. Anzieu (1989), il existe quatre niveaux de structuration de mythes auxquels il ajoute un autre niveau. Ces cinq différents niveaux constituent des échelles des symbolisations permettant de noter les niveaux de fonctionnement psychique de chaque individu, et par conséquent de repérer les failles de fonctionnement psychique chez un patient.

Notes
57.

Didier Anzieu, Le corps de l’œuvre, Paris, Gallimard, 1981, 377 p.

58.

Claude Lévi-Strauss, Le cru et le cuit . Mythologiques I. Paris, Plon, 1964.

59.

Claude Lévi-Strauss, Du miel aux cendres. Mythologiques II. Paris, Plon, 1967.

60.

Claude Lévi-Strauss, L’origine des manières de table. Mythologiques III. Paris, Plon, 1968

61.

Didier Anzieu,, Note pour introduire l’échelle des symbolisations. Revue Française de Psychanalyse, Paris, PUF, 1989, 6, pp. 1775-1778.