1.1. Des représentations sociales

La question des représentations de la maladie mentale soulève celle des représentations sociales. En effet, dans la société gabonaise, la compréhension de certains phénomènes comme la maladie mentale repose sur un ensemble de représentations dites « sociales » 68 . Ce sont des théories de sens commun, une « forme de connaissance socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (D. Jodelet, 1989, 53). A cet effet, ces formes de connaissance servent-elles de normes, de valeurs à un groupe. Pour C. Guimelli (1999, 12) 69 , les représentations sont un « ensemble des connaissances, des croyances, des opinions partagées par un groupe à l’égard d’un objet social donné ». Dans ce sens, il s’agit des représentations au pluriel. Pour cela, cette notion renvoie aux représentations culturelles aux systèmes de pensée d’une société.

Par ailleurs, avec la question des représentations sociales se pose aussi celle du symbolique. En effet, en tant que forme générale de toute connaissance, la représentation se caractérise par deux pôles : le représentatif et le représenté qui peuvent être substitués au subjectif et à l’objectif. Dans ce cas, représenter, c’est correspondre à quelque chose d’autre, en être le signe, le symbole ou le terme corrélatif (représentatif/représenté). Ainsi, il existe une relation avec la fonction symbolique. On peut parler de représentation symbolique.

Dans ses travaux sur l’imaginaire, G. Durand (1969) 70 note qu’il existe des symboles universaux (archétypes) ayant chacun une homogénéité du signifiant et du signifié. Sur la base de ces symboles, il se dégage un fonctionnement et un imaginaire commun. Par exemple, la représentation fumée correspond au symbole feu. Dans ce sens, il convient de noter la relation entre le représenté et le représentant. Il s’agit d’une relation dite symbolique.

La particularité des représentations sociales est d’être présentes chez tout individu, qu’il soit « normal » ou malade. Le tout est maintenant de savoir comment ces modes de connaissance, ses symboles passent du social au psychique ? Autrement dit, comment ce qui est social ou symbolique est symbolisé ou réélaboré psychiquement par le sujet ?

D’un point de vue psychique, au-delà de ce symbolisme universel ou collectif, il existe aussi un symbolisme personnel ou individuel ; celui-là même qui est le fruit de la subjectivité du sujet, de sa symbolisation. Dans ce sens, au lieu d’être le symbole du feu, la fumée pourra renvoyer à quelque chose d’autre pour le sujet en fonction de sa problématique personnelle. De ce fait, la représentation désigne une activité, un processus et un contenu d’un acte de pensée. En tant que telle, la représentation se caractérise alors par une absence et une répétition ; elle est témoin d’un double ailleurs avec un risque de déformation. Ce qui soulève la question de reflet de vérité de la représentation.

Notes
68.

Voir Deuxième partie, Chapitre 1.

69.

Christian Guimelli, La pensée sociale, Paris, PUF, QSJ n° 3453, 1999, 127 p.

70.

Gilbert Durand, Les structures anthropologiques de l’imaginaire: introduction à l’archétypologie générale. Paris, Dunod, 1993, 535 p.