3.1. La référence aux croyances dans la société

Dans le cadre de cette recherche, de nombreux facteurs à l’origine de la référence aux croyances dans la société ont été mis en évidence. On peut constater que la référence aux croyances peut être liée au désir de vite guérir, à l’inefficacité des thérapies ou encore à la volonté de valoriser la culture. Ce qui soulève les questions de l’immédiateté des résultats, de l’inadaptation de la prise en charge et de l’influence des facteurs culturels.

En ce qui concerne l’ « immédiateté des résultats », on peut noter que lorsque les individus vont consulter et se faire « soigner », l’objectif est d’obtenir des résultats immédiats par rapport aux thérapies utilisées. Cette immédiateté des résultats que réclament souvent les patients pose la question de l’efficacité des thérapies utilisées dans la prise en charge du sujet. Cette efficacité va dépendre du type de prise en charge et de la forme de la maladie à prendre en charge. Par exemple, la médicine occidentale a une efficacité sur les maladies organiques ou dites naturelles. Dans cette perspective, lorsque certains individus sont confrontés à la maladie mentale, ils ont recours automatiquement aux thérapies traditions car ce sont les « choses de la tradition ». Mais ce recours dépendra des croyances du sujet ou des membres de sa famille. Par exemple, si le sujet est chrétien, il se dirige d’abord vers les églises. S’il croit aux traditions, il ira consulter les thérapeutes traditionnels en premier.

Seulement, le problème commence à se poser lorsque la prise en charge proposée n’apporte pas d’amélioration. L’approche traditionnelle est prise en compte lorsque les signes objectifs désignant la maladie ne sont pas décelés. Face à cette situation, le sujet et son entourage (famille, amis) vont à la recherche d’un certain nombre de prises en charge, pourvu que la guérison soit trouvée. Dans ce sens, les croyances personnelles du sujet ne sont parfois plus pris en compte, même celles les plus contradictoires sont utilisées dans l’espoir de guérir. Par exemple, un sujet chrétien qui ne voit aucune amélioration au niveau de sa thérapie spirituelle (prière, exorcisme) pourra se mettre à utiliser certaines pratiques traditionnelles (initiation par exemple) qui étaient condamnées auparavant. Cela se passe parfois avec ou sans le consentement des parents ou des membres de la famille.

De ce fait, il peut se poser alors une conflictualité des valeurs et des croyances chez le sujet à l’origine d’un écartèlement de son Moi.

Au-delà de l’efficacité des thérapies, se pose aussi la question de la durée dans la prise en charge du sujet. En effet, il existe des maladies qui guérissent rapidement. Ce sont des maladies dites « naturelles ». Dans ce cas, c’est la médecine moderne ou encore d’autres techniques traditionnelles en relation avec la phytothérapie qui sont les plus utilisées. Cependant, lorsque la maladie ne trouve pas de solutions immédiates, il commence alors à se poser le caractère « mystique » de la maladie. C’est le cas par exemple lorsqu’un individu va à l’hôpital et ne voit pas son état de santé évoluer favorablement. Dans cette perspective, soit il prend seul la décision d’aller consulter un tradithérapeute, soit il s’entend dire par un médecin qu’il s’agit d’une « maladie des noirs », et par conséquent, il doit consulter un nganga.

Dans le cas de l’« inadaptation des prises en charge », elle repose différents facteurs à l’origine de la maladie mentale et de la référence aux thérapies. En effet, parmi les trois formes de thérapies citées ci-dessus, il convient de noter que chacune est spécialisée dans une forme de maladie précise. Les maladies dites « naturelles » sont prises en charge par les thérapies modernes ou médicales. Alors que les maladies dites « mystiques » nécessitent une approche traditionnelle de la guérison. Autrement dit, les thérapies occidentales ne peuvent pas prendre en charge les phénomènes en relation avec la sorcellerie. Cependant, on peut voir que les tradithérapeutes ou les thérapeutes spirituels se réfèrent au médecin psychiatre pour calmer les symptômes des patients. Par exemple, lorsque certains patients sont dans une phase maniaque, avec agressivité, le médecin sera solliciter pour calmer les symptômes les gênants comme l’agressivité, avant de commencer leur traitement..

L’une des conséquences de cette inadaptation des thérapies est l’illusion de la « guérison » qui peut se produire. Dans le cas des chrétiens par exemple, on parle de « guérison par la foi ». Celle-ci implique une foi en Dieu pour être sauvé. Dans ces religions, il y a la croyance en une image salvatrice qui est celle de Jésus-Christ sur qui il existe une identification. D’un point de vue psychodynamique, comment comprendre les guérisons rencontrées dans ces différentes thérapies (traditionnelles et spirituelles) ?

Au niveau de l’« influence facteurs culturels », on a pu observer que certaines formes de maladies mentales ne peuvent être guéries que par la référence aux traditions. C’est le cas des « attaques mystiques », de l’ensorcellement, la malédiction et autres phénomènes traditionnels à l’origine de la maladie mentale. Ce qui veut dire que, pour certains, la maladie mentale est en rapport avec la culture. Dans ce sens, la référence aux formes de thérapies n’est que peine perdue. Dans ce sens, la culture apparaît comme un élément important dans la compréhension de la maladie mentale.

Après avoir saisi les facteurs qui sont à l’origine de la référence aux croyances, il convient maintenant de comprendre la perpétuation de ces croyances dans la société.