II.2.2.2.Nouveau-nés

Le filtrage passe-bas de la parole permet d’extraire la prosodie (Schaffer, 1984 ; den Os, 1988 ; Mehler et coll., 1988 ; Dehaene-Lambertz, 1995 ; Nazzi et coll., 1998). L’effet obtenu correspond à la parole traversant un mur. Ainsi certains phonèmes et syllabes, parfois des mots restent audibles. Ce filtre a été appliqué sur différentes langues (Nazzi et coll., 1998). Les nourrissons distinguent l’Anglais du Japonais, mais pas l’Anglais du Néerlandais, ils sont donc capables d’utiliser les propriétés prosodiques des langues pour les différencier, puisque la majorité des informations phonétiques et phonotactiques est rendue inexploitable par le filtrage.

Ainsi, la discrimination est possible uniquement quand les langues appartiennent à des classes rythmiques distinctes. En outre, ils ont prouvé qu’un changement de langue et de classe rythmique est plus significatif qu’un changement de voix. L’hypothèse de discrimination des langues en fonction de leur classe rythmique ne peut être confirmée pour les nouveau-nés dans la mesure où peu de langues ont été testées.

Les nourrissons discriminent également le Néerlandais du Japonais, sur la base du rythme produit par la succession des consonnes et des voyelles rendue par resynthèse vocale. Dans le cas de la parole naturelle, l’augmentation du nombre de locuteurs réduit les facultés de discrimination (Ramus, 1999). Jusczyk, Pisoni et Mullenix (1992) avaient postulé que la variabilité des voix induit un coût de traitement supplémentaire. Effectivement après une mémorisation de 2 minutes, les bébés de 2 mois ne pouvaient plus discriminer des syllabes, lorsqu’elles étaient prononcées par plusieurs locuteurs. L’utilisation de la resynthèse vocale permet d’éliminer les différences inter-locuteurs, tout en conservant les particularités rythmiques des langues étudiées, puisque les nouveau-nés distinguent le Néerlandais du Japonais lors de la resynthèse avec les classes SALTANAJ (Ramus, 2002b). Est-ce que les propriétés rythmiques de la parole peuvent être perçues par des primates non humains ?