V.3.L’hypothèse d’amorçage prosodique

V.3.1.Les conséquences pour l’acquisition de la syntaxe

Il existe deux façons de répondre aux problèmes de l’acquisition des catégories syntaxiques : la division ou le regroupement. La division peut assister des procédures de regroupement employant la sémantique (Shi et coll., 1998). Notre hypothèse part donc du principe de division. D’une seule catégorie (les mots) le traitement des indices prosodiques permet de discriminer les mots de fonction et les mots de contenu. Une fois cette distinction faite, les enfants peuvent catégoriser les mots de contenu, mais surtout cette première distinction leur permettrait d’appréhender la structure syntaxique. Dominey et coll. (2003) proposent un système artificiel qui apprend la syntaxe en employant cette même distinction. Un tel mécanisme d’apprentissage pourrait incorporer ce système de catégorisation lexicale comme module.

Cette hypothèse d’amorçage prosodique des catégories syntaxique est soutenue par les propriétés prosodiques du parler bébé. Effectivement, celui-ci emploie des pics de F0 particulièrement prononcés (i.e. avec une amplitude de fréquence importante). Dans ce cas, les pics de F0 sont particulièrement saillants dans le signal de parole, et devraient conduire à une représentation des mots de contenu très lointaine de celle des mots de fonction. Il est vraisemblable que l’application du réseau TRN à un tel corpus montrerait que les vecteurs des mots de fonction et de contenu sont plus éloignés dans le cas du discours adressé à l’enfant, que dans le cas du discours adressé à l’adulte.

D’autre part, les indices que nous avons étudiés peuvent servir pour de nombreux autres problèmes lors de l’acquisition d’une langue. Ainsi, nous avons montré que les prototypes prosodiques pouvaient s’appliquer à la distinction des noms et des verbes en Français. Il reste dès lors possible d’appliquer nos techniques à d’autres problèmes posés par l’acquisition de la parole, comme la segmentation du signal de parole.