II.3.1.2.Traitement des phonèmes et des syllabes

Les enfants SLI ne peuvent couramment pas identifier des stimuli rapides à l’intérieur de la parole. Des durées inférieures à quelques dizaines de millisecondes ne peuvent être traitées par ces enfants. Or, cette durée correspond justement à de nombreux contrastes phonétiques 111 . Les enfants SLI peuvent identifier les deux phonèmes [t∫] et [∫] lorsqu’ils sont présentés isolément (Leonard, 1998). Il ne s’agit donc pas d’un problème de discrimination des phonèmes.

Tallal (2000) exprime la même hypothèse pour une fenêtre temporelle plus large (de l’ordre de quelques centaines de millisecondes). Dans ce cas, la perception des syllabes est perturbée. Ces difficultés de traitement pourraient être issues d’une capacité de segmentation détériorée. La plus petite unité de traitement de la parole serait de l’ordre de la syllabe et non du phonème (Bishop, 1997). Leonard (1998) stipule que les enfants SLI rencontrent des difficultés avec des inflexions grammaticales (le suffixe du passé –ed en anglais) et aussi des mots de fonction (l’auxiliaire is), mais ont la capacité de comprendre les principes grammaticaux. Les mots et les morphèmes fonctionnels sont moins saillants perceptuel-lement. Dans ce cas, un système de traitement auditif aurait plus de difficulté pour les percevoir. Du coup, les enfants recrutent plus de ressources pour les percevoir et les produire.

Dans ces deux cas, l’hypothèse d’un déficit dans le traitement auditif temporel est retenue au détriment de l’explication d’un déficit de traitement cognitif de haut niveau. De nombreux études ont d’ores et déjà validé ces hypothèses pour au moins un sous-groupe d’enfants SLI. Effectivement, elles montrent que ces enfants ont des difficultés pour discriminer des stimuli acoustiques (verbaux ou non), en particulier lorsque la différence réside dans des durées inférieures à la centaine de millisecondes. Tallal et coll. (1985) concluent que les caractéristiques temporelles des stimuli acoustiques sont critiques pour les enfants atteints de troubles du langage. Quand les stimuli sont brefs ou présentés rapidement, les enfants SLI ont des difficultés pour les différencier, alors qu’ils n’en ont pas pour les distinguer lorsqu’ils sont allongés ou présentés plus lentement. Ce déficit est désigné par les termes d’un trouble du traitement auditif temporel (Benasich et Tallal, 2002).

En outre, le lien entre les facultés de traitement des événements rapides et les facultés pour le langage (richesse du vocabulaire, structure des phrases plus complexes, plus de mots irréguliers employés) a été établi également pour des enfants normaux, qui effectuait une tâche de détection d’intervalle (« gap detection ») avec des scores supérieurs à la médiane (Trehub et Henderson, 1996).

Notes
111.

La distinction des phonèmes se fait par des indices qui varient très rapidement dans le temps (moins de quelques centaines de millisecondes).