V.3.2.Simulation de la tâche

Pour pouvoir effectuer cette tâche, il faut seulement que les réseaux fournissent des vecteurs distincts pour chacun des stimuli. Dans le cas contraire, le réseau ne pourra pas distinguer les stimuli.

Figure 6.4 Discernabilité des stimuli pour la tâche de discrimination des tons purs (moyenne obtenue sur 50 réseaux, les écart types sont indiqués par les barres verticales). La durée entre les deux stimuli est présentée en abscisse en millisecondes (ISI). Trois populations avec des constantes différentes (contrôles 0.01, 0.1 et altérés 0.5) sont représentées.
Figure 6.4 Discernabilité des stimuli pour la tâche de discrimination des tons purs (moyenne obtenue sur 50 réseaux, les écart types sont indiqués par les barres verticales). La durée entre les deux stimuli est présentée en abscisse en millisecondes (ISI). Trois populations avec des constantes différentes (contrôles 0.01, 0.1 et altérés 0.5) sont représentées.

Notre approche se fera en trois temps. En premier lieu, nous indiquerons les distances obtenues entre les vecteurs de chaque stimuli, en fonction de la durée ISI et aussi des valeurs des constantes de temps des réseaux (contrôles : 0.01 et altérés : 0.5). Ensuite, nous testerons l’impact d’une modification de la constante de temps, pour un seuil d’apprentissage donné. Enfin, nous indiquerons les valeurs obtenues par les réseaux contrôles, lorsque le seuil d’apprentissage est trop élevé, i.e. un entraînement insuffisant est simulé.

La section précédente nous a enseigné que l’identification lexicale était perturbée lorsque les constantes de temps étaient augmentées. En effectuant ce seul changement nous ne constatons pas de dégradations des résultats, pour l’identification des stimuli auditifs. En revanche, un indice de discernabilité des stimuli A et B peut être obtenu en calculant la distance euclidienne entre le vecteur du stimulus A et celui du stimulus B. Cette distance est indiquée dans la figure 6.4.

Ainsi il est possible de simuler les résultats observés par Tallal et Piercy (1973a) en fixant un seuil en dessous duquel deux vecteurs ne peuvent être distingués. Les motifs obtenus pour les stimuli sont plus proches pour les réseaux altérés que pour les contrôles, quelle que soit la durée de l’intervalle ISI. Le modèle donne également des représentations des stimuli A et B plus proches lorsque l’intervalle entre les deux tons est bref, et cette proximité est encore plus importante pour les réseaux altérés. Il s’ensuit que les réseaux altérés ont plus de difficultés pour discriminer les stimuli contenant un intervalle bref, que les réseaux contrôles.

Il ne reste donc qu’à choisir une valeur de seuil. Celui-ci devra permettre de refléter les résultats observés avec les enfants SLI et contrôles. De plus, ce seuil permet de simuler un apprentissage progressif des stimuli. Une façon un peu plus complexe de le simuler serait d’employer un réseau supplémentaire (mémoire associative, carte de Kohonen) pour apprendre les vecteurs donnés par le réseau TRN. Les cycles d’apprentissage successifs correspondraient à une diminution progressive de ce seuil. Il a été déjà été démontré que des enfants SLI peuvent répondre correctement à cette tâche, après un entraînement plus long que celui des enfants normaux (Tomblin et Quinn, 1983 ; Tallal et coll., 1981).

Les réseaux altérés ont en moyenne plus de mal à faire la distinction entre les stimuli pour des intervalles inférieurs à 150 ms (Blanc et Dominey, 2002 ; Blanc et coll., 2003 a&b). Pour retrouver la valeur de 300 ms annoncée par Tallal et Piercy (1973a), il faudrait rechercher les constantes de temps et le seuil d’apprentissage du réseau de façon systématique.

Nous souhaitons maintenant examiner le comportement des réseaux contrôles lorsque le seuil d’apprentissage est fixé à une valeur trop élevée, simulant ainsi un entraînement insuffisant. Ainsi, le déficit est simuler par un manque d’apprentissage et non par un défaut du mécanisme de perception. Dans ce cas, les performances croissent progressivement, et le schéma de réponse des enfants SLI n’est pas retrouvé (Figure 6.7). Effectivement, les réponses des réseaux augmentent progressivement et non brutalement entre 150 ms et 425 ms.

Figure 6.5 Performances des enfants (SLI et contrôle) pour la tâche de perception rapide (Tallal et Piercy, 1973a).
Figure 6.5 Performances des enfants (SLI et contrôle) pour la tâche de perception rapide (Tallal et Piercy, 1973a).
Figure 6.6 Performances des deux populations de 50 réseaux TRN (altérés et contrôles) pour la tâche de perception rapide (Tallal et Piercy, 1973a) avec un seuil fixé à 150.
Figure 6.6 Performances des deux populations de 50 réseaux TRN (altérés et contrôles) pour la tâche de perception rapide (Tallal et Piercy, 1973a) avec un seuil fixé à 150.

Ainsi, pour simuler le comportement des enfants SLI, il faut tenir compte d’un seuil d’apprentissage (simulant l’entraînement) et d’une constante de temps augmentée (pour modéliser le trouble de traitement).

Des études expérimentales complémentaires ont précisé que les déficits de traitement rapide des enfants SLI apparaissent lors du masquage d’un ton pur par un bruit. La modélisation par le réseau TRN peut-il permettre de retrouver ce phénomène ?

Figure 6.7 Performance d’une population contrôle (constante de temps 0.01)
Figure 6.7 Performance d’une population contrôle (constante de temps 0.01) de réseaux TRN soumis à deux seuils différents pour l’apprentissage.