3.3. La négociation des appartenances identitaires et territoriales en Transylvanie

Au-delà du constat qu’une nouvelle utilisation de la Transylvanie constitue le support des formes de mise en commun à Cluj et en Transylvanie, de quoi témoignerait de plus mon étude sur Provincia et sur les autres groupes que j’ai pu observer.

Je rappelle qu’après avoir remarqué l’existence à Cluj d’un espace segmenté et divisé d’un point de vue ethnique, je me suis orientée vers la recherche des pratiques qui laissaient entrevoir des liens et des rapprochements entre les élites. Cette recherche des formes de production d’un monde commun au-delà des différenciations ethniques pouvait être comprise comme une interrogation sur la production d’un espace public. Les observations de mon terrain à Cluj, s’exprimant souvent sous la forme de crispations identitaires, m’ont amenés à poser la question de la constitution d’un espace public en lien avec l’existence d’un espace communautaire. Il était question pour moi d’interroger la production d’un espace public au-delà des manifestations du « communautaire » rencontrées à Cluj, l’entre-soi et la coexistence. Comment cet espace public pouvait-il être caractérisé en partant de l’exemple de Provincia ?

La construction d’un espace public et d’un monde « en commun » renvoie à des interrogations plus générales et très actuelles de la philosophie politique. Développées entre autres par des auteurs comme C. Taylor, W. Kymlika, M. Walzer, elles posent la question de la constitution d’un « vivre ensemble » en situation de diversité culturelle et de la manière de construire une « communauté des pluralités à partir d’une pluralité des communautés »398.

Cependant c’est vers d’autres approches que je me suis orientée, plus proches des interrogations sur la relation entre espace public et espace communautaire 399 .

Notes
398.

L’expression appartient à Michaël Walzer, Sphères de justice. Une défense du pluralisme et de l ‘égalité, Paris, Seuil, 1997.

399.

Une analyse de cette question a déjà fait l’objet d’un article que j’ai écrit en collaboration avec Dominique Belkis, article dont je vais reprendre ici certaines idées : « La relation communauté/espace public dans le contexte post-totalitaire. Le cas de la Transylvanie », Parcours anthropologiques 4, 2004.