B/ Quelle mission et comment (1980-1981) ?

Le débat sur la catéchèse est la manifestation la plus visible d’une interrogation plus générale. Amenée à la fin du pontificat de Paul VI, lq question de la redéfinition de la mission s’impose comme la première urgence.

Bilan de la visite papale : une nécessaire redéfinition de la mission

A la veille de la première visite du pape en France, la fédération des organismes de communication sociale et le secrétariat national de l'opinion publique composent une Radioscopie de l'Église en France à l'attention des journalistes d'informations religieuses. L'analyse d'une trentaine de sociologues, historiens et acteurs de l'Église est sollicitée. Distribué à toutes les personnes présentes au rassemblement du Bourget, l'outil de communication devient un instrument pastoral. Pour le père Jacques David, directeur du secrétariat national, l'événement offre l'occasion d'élargir les catégories pastorales habituelles de l'Église de France 172 .

Réuni du 9 au11 juin, le conseil permanent tire les leçons de la visite de Jean-Paul II en France. Après la réforme catéchétique, La Croix salue d'ouverture d'un nouveau chantier pour l'épiscopat. ”L'assemblée plénière des évêques traitera à Lourdes, en novembre 1980, des ”enjeux missionnaires”, des années à venir. La journée missionnaire d'octobre revêtira une importance exceptionnelle”, indique le quotidien catholique 173 . Le cap donné par l'épiscopat enthousiasme La Croix qui titre, encore dix jours après, sur ”les évêques affrontés à l'avenir”.

Dans La Croix du 18 juin, Pierre Marthelot, directeur du centre d'études du Maghreb et du Moyen-Orient à l'école des hautes études en sciences sociales, relie le thème de la ”France pays de mission” au filtre de la visite papale. Le succès de ce dernier est d'avoir permis la renaissance d'une ferveur religieuse populaire. En la réhabilitant au service de la mission tandis que l'Église française complexe à mesure que l'intelligence de la foi semble passablement sapée. Reste pour l'épiscopat à faire la preuve qu'une mission épousant les traits de la religion populaire peut être menée en bonne intelligence 174 :

‘Un autre danger qu'il ne faut pas minimiser non plus serait la prime donnée à un certain anti-intellectualisme, tout aussi mortel pour l'Église que l'élitisme dont nous sommes coutumiers. En particulier cette reconnaissance de la communication multitudinaire ne doit pas conduire à je ne sais quel conformisme simplificateur, minimisant la part de la recherche intellectuelle et noyant dans un consensus populiste habilement manipulé les problèmes inhérents à cette recherche.’

Les écueils élitistes ou populistes ne sont rien au regard des mutations sensibles des relations que les évêques français sont appelés à entretenir avec le Vatican. Comme la mise en œuvre des Pierres vivantes le laisse présager, la pastorale de l'Église de France ne pourra désormais plus faire l'économie d'un détour romain. C'est du moins ce que suggère une enquête de l'institut de sondage Indice-opinion paru dans Le journal du dimanche du 22 juin 1980 : pour 55% des Français, ”les catholiques de France sont désormais plus près du pape que des évêques”, diagnostique le journal pour qui 59% des Français refusent de voir en Jean-Paul II ”un pape autoritaire qui veut mettre en tutelle l'Église de France” 175 .

Notes
172.

Lucien Berti, ”Pour mieux connaître l'Église qui est en France”, La Croix, 11 juin 1980

173.

Anonyme, ”L'Église de France tire les leçons du voyage du Pape”, La Croix, 14 juin 1980

174.

Pierre Marthelot, ”L'Église toutes portes ouvertes”, La Croix, 18 juin 1980

175.

Anonyme, ”Le pape redonne foi à l'occident”, La Croix, 24 juin 1980