Rencontre nationale ACO, 13-15 mai 1983 : la politique de la main tendue

Si les rencontres avec le MRJC ont été peu fructueuses, la 13e rencontre nationale de l'ACO organisée à Marseille les 13-15 mai 1983 marque un tournant dans la réflexion des évêques sur la mission. Les semaines précédant l'événement, le mouvement s'était alors ouvert à Mgr Vilnet de ses inquiétudes quant à une mise au pas de l'action catholique. L'épiscopat était alors soupçonné de vouloir se passer des médiations offertes par les mouvements. Soucieux de dissiper le malentendu, le président de la conférence épiscopale parvient alors à rallier le mouvement au projet épiscopal des nouvelles perspectives missionnaires en accordant une interview à la revue Témoignage. Rappelant l'attachement de l'Église au monde ouvrier, le père Vilnet propose une feuille de route au mouvement. ”Il s'agit de savoir où situer la mission propre de l'Église, notamment dans les rapports entre la foi et la politique, ou si vous préférerez, entre la libération des hommes et leur salut en Jésus-Christ”, suggère-t-il 383 .

Mgr Herbulot intervient au terme de la rencontre pour évoquer le souci que porte la conférence épiscopale à l'endroit du monde ouvrier. ”Son but n'est pas de jeter un soupçon sur l'effort apostolique vécu depuis la naissance de la JOC en France, mais, bien au contraire, de ”stimuler la mission en monde ouvrier” ”, indique-t-il 384 . Le président de la commission épiscopale du monde ouvrier se montre compréhensif à l'égard des problèmes que peut rencontrer l'action catholique. ”L'effort apostolique que nous vivons dérange aussi toute l'Église. C'est ce que l'on appelle parfois dans nos assemblées d'évêques ”le choc en retour de la mission”. Là non plus, nous n'avons pas fini d'en mesurer l'étendue” 385 . Le père Herbulot reprend dans son allocution une partie du rapport d'orientation adopté au cours de la manifestation : ”Notre expérience originale, historique, est de tenter de vivre ensemble, dans l'unité de nos vies et de nos choix, notre appartenance dans la classe ouvrière, nos engagements et notre adhésion à Jésus-Christ, notre appartenance à la communauté de croyants” 386 .

”Les convergences l'emportent désormais sur les divergences : l'objectif commun est bien de trouver une parole actuelle susceptible d'aider les travailleurs dans leurs difficultés et de contribuer à leur rencontre avec Jésus-Christ”, s'enthousiasme La Croix 387 . La concorde qui prévaut entre le mouvement et l'épiscopat à cette occasion encourage les évêques à envisager une diversification des partenaires de la mission sans risquer la rupture avec l'action catholique. ”Cette clarification intervenue à l'ACO va pouvoir servir de point d'appui à la recherche engagée par l'épiscopat à Lourdes, l'automne dernier, pour ”stimuler” la présence de l'Église en milieu ouvrier”, note Henri Tincq 388 . L'événement apparaît décisif pour le quotidien catholique qui consacre une pleine page au débat d'orientation de l'ACO dans son édition du 18 mai 389 . Il apparaît pourtant que la direction du mouvement ne soit pas parvenue à rallier les 1 000 délégués à l'idée d'un rapprochement avec les autres communautés d'Église.

Notes
383.

Didier Niel, ”Mgr Vilnet : Vouloir l'Église présente dans la classe ouvrière”, Témoignage, mai 1983

384.

DC, 1854, 19 juin 1983, page 639

385.

Ibid, page 638

386.

Ibid, page 638

387.

Henri Tincq, ”Non à une ACO-ghetto”, La Croix, 17 mai 1983

388.

Ibid

389.

Henri Tincq, ”Dieu n'est pas dans les bagages de la classe ouvrière”, La Croix, 18 mai 1983