Attentisme épiscopal face aux contestations

Interrogé par la télévision le 24 juin 1985, le président de la conférence des évêques de France élude la polémique, réitérant sa fidélité à Vatican II. C'est à peine s'il concède la nécessité d'une réévaluation concernant la présence de l'Église au monde. ”Que ce concile oriente toujours l'Église pour une présence aux problèmes du monde, en étant elle-même ”toutes fenêtres ouvertes” - comme disait le Pape Jean XXIII lorsqu'il a convoqué ce concile - et avec un optimisme persévérant. Mais toutefois pas un optimisme béat” indique-t-il, concédant en creux la perfectibilité du processus de réception conciliaire 493 .

Confronté au succès de L'appel de Montpellier, un prêtre du centre de la France exprime au souverain pontife et à ses ”collaborateurs” sa gratitude dans une ”Lettre de fidélité au Pape” pour ”la lumière qui, au milieu des dérives de notre temps [aide à] construire solidement sur la foi reçue des apôtres” 494 . Pour sa part, Georges Hourdin alimente le débat dans une adresse à Jean-Paul II et aux évêques du synode - ”vigoureux plaidoyer de l'engagement de l'Église dans l'histoire” 495 , selon Gwendoline Jarczyk 496 :

‘Je comprends assez mal ce livre dont l'opportunité n'apparaît pas évidente quand on songe que le cardinal Ratzinger, dont j'ai dit tout le bien que je pensais quant à ses qualités intellectuelles , est responsable d'une sorte de tribunal. […] Faut-il remplir cette fonction sous la forme d'interviews ? Il faudrait je pense retrouver sinon plus de tolérance, tout au moins un sens plus plénier de l'acceptation de la différence des autres et de la nécessaire démocratie au sein de l'Église.’

Le 20 octobre, 200 délégués des 7 000 signataires de L'appel de Montpellier se réunissent à Montpellier. Les pères Marie-Dominique Chenu, Jean Cardonnel, Jean Larzac, André Laudouze de la revue Échange et dialogue et Jacques Chatagner de La Lettre sont présents. Absents, Georges Hourdin et le général de Bollardière adressent cependant chacun un message de soutien aux participants du rassemblement. Au terme de la rencontre, un ”message au peuple de Dieu” est adopté. Le souhait est alors exprimé de voir l'Église abandonner des ”pratiques des gouvernements autoritaristes calquées sur les pouvoirs de ce monde : condamnation de théologiens, court-circuitage des évêques et responsables locaux, mise au pas d'ordres religieux” 497 . A cet effet, deux réformes sont expressément suggérées : l'amélioration des procédures de nomination des évêques ”qui ne devraient pas être perçus comme les préfets du pouvoir central” mais comme des ”pasteurs représentatifs et responsables des Églises locales dans leurs diversités”. La seconde réforme concerne le fonctionnement du synode. Les signataires souhaitent à l'avenir une consultation des communautés chrétiennes. Finalement, l'utopie d'un concile Vatican III est relancé. Au même moment les initiateurs de la Lettre de fidélité au pape revendiquent la signature de 30 000 catholiques et 3 000 prêtres dénonçant dans l'initiative de Montpellier ”une entreprise de déstabilisation de l'Église elle-même” 498 .

Notes
493.

Gérard Dupagny & Mgr Vilnet, ”Interview de Mgr Vilnet, évêque de Lille, président de la Conférence épiscopale de France”, Snop, n°592, 3 juillet 1985

494.

Jean-Pierre Manigne, ”Les évêques de France : retrouver le dynamisme du concile”, L'actualité religieuse dans le monde, 25, juillet-août 1985

495.

Gwendoline Jarczyk, ”Il faut achever le concile”, La Croix, 8 octobre 1985

496.

Georges Hourdin, Au pape Jean-Paul II et aux évêques du synode. Sur la nécessité d'achever le Concile, Paris, Desclée de Brouwer, 1985, page 157

497.

Jacques Molenat, ”Qu'un nouveau concile soit organisé”, La Croix, 23 octobre 1985

498.

Ibid