L'action catholique pour référence récurrente

Pour sa part, l'épiscopat réunit son conseil permanent les 10-12 mars 1986. Il s'agit alors de cerner les diverses initiatives mises en œuvre dans la dynamique synodale. Le travail préparatoire se fonde sur trois types d'expériences. 85 mouvements et organismes de laïcs, regroupés en cinq familles, travaillent sur le sujet tandis que divers diocèses coordonnent une réflexion à l'échelle locale, enfin la conférence épiscopale mène sa réflexion propre. Pour les mouvements, il apparaît essentiel de faire valoir que l'engagement des laïcs s'enracine en amont du concile Vatican II. Ainsi, au-delà de tout contexte historique, intuitions et actions de l'action catholique s’ancrent dans l'expérience de foi. Pour leur part, les groupes diocésains adressent aux évêques leurs interrogations sur la pertinence d'une distinction entre sacerdoce des baptisés et ministères. Bien sûr, l'investissement toujours plus important des femmes dans la vie des paroisses fait resurgir la problématique de la femme et de son statut dans l'Église ⁶⁴⁸ .

Le 14 mai 1986, le groupe épiscopal pour les communautés chrétiennes (Grec) se réunit autour de son président, le père Decourtray. Avec eux, le vice-président de la conférence épiscopale dispose d'un panel de quinze laïcs délégués de mouvements et organismes ou responsable de la catéchèse, de la pastorale de la santé et de la famille. C'est à cette occasion que s'initie une réflexion sur ”la vocation et la mission des laïcs”. Le groupe arrête le principe d'une participation d'une vingtaine de laïcs aux travaux de la prochaine assemblée plénière. Au sortir de la réunion, les père Gaston Piétri et Guy Régnier livrent les grandes lignes dégagées au terme des débats ⁶⁴⁹ :

‘S'impliquer davantage dans la société et y tenir son identité, reconnaître vraiment les responsabilités des laïcs en corrélation avec celle des ministères ordonnés, raviver des liens entre mouvements en les mettant davantage au service de l'ensemble du peuple de Dieu, ouvrir largement des responsabilités majeures à des femmes, continuer à promouvoir un apostolat organisé et pas seulement individuel, préparer des paroles d'Église concertées entre évêques et laïcs, relier en chaque baptisé l'expérience spirituelle de Dieu et l'élan missionnaire.’

”La réunion n'a pas fait apparaître de divergences fondamentales entre évêques et laïcs”, relève Yves de Gentil-Baichis au sortir de cette première consultation préparatoire aux débats lourdais de 1986 ⁶⁵⁰ . L'essentiel des débats s'est noué autour de la dualité opposant prêtres et laïcs. Or une appréhension collective du laïcat apparaît déterminante pour l'ensemble des participants qui soulèvent par ailleurs le problème posé par le statut de la femme dans l'Église. Une meilleure formation des laïcs est également revendiquée ”car ne pas savoir peut être une source d'infériorité” ⁶⁵¹ . Ecartant l'hypothèse d'une Église à deux vitesses entre laïcs théologiens en responsabilité et le laïc lambda de la base, les représentants des mouvements et services d'Église souhaitent, par ailleurs, une parole plus pastorale des autorités sur les questions familiales. Charge à Mgr Decourtray de ressaisir les réflexions pour en faire la synthèse au cours de la réunion du conseil permanent des 9 et 10 juin 1986. Le président du Grec anime alors les débats du conseil permanent avec les père Régnier et Piétri. Des points d'attention particuliers sont alors dégagés ⁶⁵² :

‘Il sera nécessaire de reprendre la réflexion sur le rapport Église-monde-Royaume. Le titre du synode ”Laïcs dans l'Église et dans le monde” induit un certain dualisme. Sans nier la distinction, il est urgent de dépasser l'extériorité d'appartenance. En fait, l'identité de tout baptisé, qu'il soit ou non ministre ordonné, est d'être d'Église, et c'est l'Église, par sa mission, qui est ”dans le monde sans être du monde”. De même se manifeste la nécessité d'une élucidation des termes ”laïcs - laïcat et peuple de Dieu”, qui concerne tous les baptisés.’

Le conseil permanent exprime son souci d'embrasser toute la réalité du laïcat sous sa forme individuelle ou collective. La catégorisation ”militants, pratiquants, croyants” doit être transcendée. Par ailleurs, la réalité du laïcat se vit, traditionnellement, soit au sein des mouvements ou en paroisses. Il n'en demeure pas moins que l'épiscopat doit être attentif à ”tous les autres”. Enfin, la promulgation du code de droit canon n'est pas sans influence sur la définition du laïc. ”L'articulation ”laïcs - ministre ordonné dans le peuple de Dieu” est à reprendre en sachant que le nouveau code met en avant l'aspect sacramentel de tout baptisé identifié au Christ et des ministres au service des baptisés” ⁶⁵³ . Une feuille de route est ainsi précisée pour le Grec qui se réunit en septembre.