Il n'en demeure pas moins la figure épiscopale la plus engagée dans le dialogue avec les universitaires 1518 . Le 9 janvier 1988, Mgr Vilnet se rend à Rome. Les recteurs des quatre universités catholiques concernées par Donum vitae, Pierre Macq (Louvain), Bernard Van Iersel (Nimègue), Michel Falise (Lille) et Mgr Guy Maertens (représentant du recteur de Leuven), rencontrent les cardinaux Joseph Ratzinger et William Baum, préfet de la congrégation pour l'éducation catholique 1519 . L'ancien président de la conférence épiscopale accompagne Michel Falise. Les débats révèlent la détermination des protagonistes de la rencontre, arc-boutés sur leurs positions.
Tandis que s'ouvrent les discussions à Rome, La Croix interviewe le moraliste Xavier Thévenot sur les enjeux théologiques du débat. Ce dernier insiste alors sur les trois sources de l'autorité magistérielle dans l'Église catholique : le magistère, l'Ecriture, la tradition. A celles-ci s'ajoute celle appelée sensus fidei du peuple de Dieu - soit ”le sens de la foi habitant l'ensemble des chrétiens qui cherchent comment répondre aux exigences de Dieu” 1520 . Or pour le quotidien catholique le doute n'est plus possible. L'instruction Donum vitae heurte le sensus fidei de nombreux chrétiens. ”De nombreux théologiens, certains évêques (quand on discute avec eux en particulier), un grand nombre de laïcs convaincus, ayant des responsabilités, disent qu'ils ne peuvent adhérer aux passages de l'instruction concernant la fécondation in vitro entre époux”, atteste le père Thévenot pour qui ”c'est le signe qu'il faut remettre le document sur le métier en certaines parties et ouvrir de nouveau le débat théologique” 1521 .
Pour se faire, le moraliste s'applique à trouver des détours pour renouer le fil de la discussion entre les chercheurs, les évêques, les théologiens, d'une part, et Rome, d'autre part. Ménager le Vatican consiste à minorer l'ampleur de la contestation et, de fait, de l'enjeu lui même 1522 :
‘En présence d'un texte magistériel, le premier réflexe doit être d'évaluer son poids théologique. Or, le document Donum vitae a un poids théologique relativement léger, bien moindre que celui d'un texte conciliaire ou d'une encyclique.Au sortir des entretiens, Le Monde retient le mot de Michel Falise selon lequel les universités catholiques sont assurées d'un ”petit espace de liberté de facto, non de jure” 1523 . Pour sa part, le journal La Croix reste mesuré quant aux ouvertures possibles dans le dialogue avec Rome. Le dialogue engagé ”n'a malheureusement pas permis de lever les incertitudes”, note La Croix 1524 . Soucieux d'écarter tout soupçon gallican, le quotidien catholique complexifie la problématique dans un enchevêtrement des prises de paroles magistérielles épiscopales et romaines 1525 :
‘Certains évêques sont intervenus, parfois publiquement, pour demander à des hôpitaux dépendant de congrégations religieuses une application stricte du texte du cardinal Ratzinger. En revenant sur son texte, Rome risquait de contredire ces évêques.A la veille de la rencontre romaine, le père Régnier, vice-recteur des facultés libres de Lille confirme à La Croix la responsabilité de Mgr Vilnet dans le processus de concertation. ”Le dialogue s'instaure, c'est une très bonne chose. Nous devons cette évolution positive en particulier à Mgr Vilnet qui a tout fait pour qu'une telle rencontre ait lieu”. Bertrand Révillion, ”Des adaptations sont souhaitables”, La Croix, 9 janvier 1988
Anonyme, ”Une rencontre ”utile” à Rome : les universités catholiques et le Vatican débattent de la fécondation in vitro”, Le Monde, 12 janvier 1988
Yves de Gentil-Baichis, ”Le père Thévenot : quelles conditions pour un dialogue ?”, La Croix, 9 janvier 1988
Ibid
Ibid
Henri Tincq, ”Une rencontre ”utile” à Rome Les universités catholiques et le Vatican débattent de la fécondation in vitro”, Le Monde, 12 janvier 1988
BR, ”Optimisme mesuré des cathos”, La Croix, 12 janvier 1988
Ibid