2.1. Une définition à travers des critères appliqués aux déplacements

Une manière habituelle de caractériser la longue distance consiste à appliquer un critère de longueur aux déplacements (distance parcourue supérieure à 100km, distance origine-destination supérieure à 80km) ou à appliquer un critère d'interzonalité.

Le critère métrique est le critère de caractérisation le plus classique. Les enquêtes transports françaises délimitent la longue distance selon un seuil critique de 100km. Afin de cerner des déplacements de plus longue portée, nous pouvons retenir un seuil de définition supérieur : 200km par exemple (ce qui réduit de 28% les déplacements concernés (d'après les Enquêtes-Transports). Retenir un seuil kilométrique a l'avantage d'être simple pour la compréhension mais présente l'inconvénient de ne pas bien correspondre à la perception d'éloignement. Une distance kilométrique n'a pas la même signification dans le Massif Central ou dans une zone de plaine bien irriguée par un réseau autoroutier. La distance se mesure plus en termes de temps de parcours que de kilométrage (Klein, 2001). Utiliser le critère de temps de parcours pour définir notre objet d'étude présente toutefois un inconvénient : modifier l'offre de transports modifie les temps de parcours donc la définition de notre objet d'étude, ce qui soulève le problème de stabilité de la définition dans le temps.

Le seuil kilométrique est parfois complété par un critère "d’interzonalité administrative". Pour le modèle MATISSE (INRETS, 1997a) les déplacements à longue distance sont définis comme l'ensemble des déplacements interdépartementaux de plus de 50 km à vol d'oiseau. Il est clair que si on n'ajoute pas un critère de distance au critère d'interzonalité administrative, la définition inclut du trafic courte distance à cheval sur la frontière. Il est possible d'adopter une définition plus restrictive que celle des déplacements interdépartementaux de plus de 50km, en ne retenant par exemple que les déplacements interrégionaux entre régions non contiguës. Le critère d'interzonalité administrative complété le cas échéant par un critère de non contiguïté est pratique à adopter lorsqu'on dispose de matrices origine-destinations, souvent établies sur des découpages administratifs. Les zonages administratifs n'ont toutefois pas nécessairement du sens d'un point de vue socio-économique. Au lieu de définir la longue distance comme ensemble des déplacements interdépartementaux de plus de 50km à vol d'oiseau et les déplacements de portée interrégionale comme ensemble des déplacements interrégionaux non contigus, on pourrait utiliser des zonages correspondant à des observations socio-économiques, bassins d'emplois et bassins de vie définis par l'INSEE (Le Jeannic, 1997), ou à plus grande échelle macro-régions correspondant aux aires d'influence des grandes métropoles régionales (Noin, 1996). Les bassins d’emploi et les bassins de vie sont "deux découpages du territoire, élaborés à partir de statistiques de flux : déplacements domicile-travail pour les bassins d’emploi, fréquentations de commerces et de services pour les bassins de vie ; (…) ces zones [présentent] de fortes cohésions internes, minimisant les échanges avec l’extérieur". (Reynard, 1997). Généralement les bassins d'emplois sont plus vastes que les bassins de vie pour les grands pôles urbains ; en milieu rural c'est l'inverse (Reynard, 1997). Il serait ainsi possible de définir la mobilité à longue distance comme mobilité sortant de ces zones. A une échelle plus grande, certains auteurs ont défini un découpage du territoire en aires d'influence des grandes agglomérations françaises (Noin, 1996). Ces zones pourraient être utilisées pour définir un découpage en régions "socio-économiques", où les déplacements de portée interrégionale seraient les déplacements entre ces régions "socio-économiques". Il existe en effet une hiérarchie des villes (Damette, 1994) : les pôles urbains polarisent les flux locaux au sein des bassins d'emplois qui les entourent ; les métropoles régionales polarisent une part importante des flux de portée régionale dans leur zone d'influence – avec parfois des métropoles relais ; Paris polarise une part importante des flux nationaux. A cette hiérarchie de zones pourrait être adaptée une typologie d'envergures de flux. Bien sûr cette définition est difficilement opérationnelle et les régions administratives peuvent avantageusement remplacer ces zonages plus complexes.