I. Les méthodes de modélisation

En matière de modélisation des trafics, il existe plusieurs grandes familles de modèles cataloguables en fonction des objectifs recherchés, du type de données utilisées, de la méthode de modélisation. On distingue ainsi modèles monomodaux et modèles multimodaux, modèles calés sur données chronologiques, en coupe instantanée ou données de pseudo-panel, modèles agrégés et modèles désagrégés, modèles "séquentiels" (dont le classique modèle à 4 étapes génération – distribution – partage modal – affectation) et modèles de demande directe, (Bonnel, 2004 ; Ortuzar, 1994). Si des exemples de ces différents types de modélisation peuvent être trouvés aussi bien en urbain qu'en interurbain, la modélisation en interurbain présente des spécificités. Le modèle zonal à quatre étapes si classique en milieu urbain est ainsi moins fréquemment utilisé. Il laisse souvent place à des modèles de demande directe simulant l'évolution de volumes totaux de trafic à l'échelle d'une région ou d'un pays, ainsi qu'à des modélisations génération – partage modal sur des axes dans le cas d'études de trafics relatives à des projets spécifiques. Dans la présente section, nous présentons les principales méthodes de modélisation qui s'appuient soit sur données opérateurs soit sur données d'enquêtes de types Enquête Transports et Communications, et qui permettent de modéliser l'évolution des trafics modaux à un niveau national. Nous illustrons ces différentes méthodes par des cas concrets en France et à l'étranger. Notre objectif est d'évaluer l'opérationnalité de ces modèles à travers le triptyque pertinence – cohérence – mesurabilité (Bonnafous, 1989). L’opérationnalité d'un modèle est en effet soumise à trois conditions nécessaires et suffisantes : la pertinence (le modèle doit être conforme à ce qu’on croît être la réalité des choses), la cohérence (le modèle ne doit pas comporter de contradictions tant d’un point de vue interne que par rapport à ses objectifs) et la mesurabilité (il faut être capable de mesurer les variables avec des échantillons accessibles suffisamment significatifs et de paramétrer les coefficients de calage du modèle avec un minimum de fiabilité statistique), ces trois exigences étant malheureusement souvent contradictoires (Bonnafous, 1989). Notre objectif est d'évaluer l'opérationnalité des modèles par rapport à leur capacité à modéliser des trafics à l'échelle nationale, même si une segmentation à une échelle plus fine peut intervenir en étape intermédiaire.

La nature de la modélisation mise en place dépend étroitement des données à disposition. Nous disposons de plusieurs types de données : des flux opérateurs (essentiellement des flux nationaux mais aussi quelques flux spatialisés) et des données d’enquêtes. Notre présentation reprend cette distinction. Dans une première section nous présentons les données s’appuyant sur des données de flux. Nous présentons aussi bien les modèles de demande directe que les modèles de partage modal, les modèles calés sur séries temporelles comme les modèles calés sur des données en coupe instantanée. Dans une deuxième section nous présentons les modèles calés sur données d’enquêtes. Les modèles calés sur données d’enquêtes sont en grande partie de la même forme que les modèles calés sur des flux, toutefois la segmentation et le calage apportent des spécificités. Une troisième et dernière section est consacrée au modèle MATISSE. Ce modèle constitue en effet un cas original parmi les modélisations existantes. En section 4 nous effectuons alors un bilan des modélisations existantes.