2.2. Les modèles de génération /distribution / partage modal

Comme exemples d'application, on peut citer le modèle mis en place au Service Economie et Statistiques du Ministère de l’Equipement (Calio, Méteyer, 2001), ainsi que le modèle des Pays-Bas (The Netherlands Ministry of Public Works, 1992). La modélisation de la génération est effectuée de façon analogue aux modèles de demande directe présentés précédemment. Le partage modal consiste en un modèle logit de formulation identique à la formulation agrégée, la seule différence résidant dans le calage. Les fondements théoriques de la formulation de partage modal logit multinomial dans le cas désagrégé sont présentés dans (Ben Akiva, Lermann, 1985 ; Ortuzar, Willumsen, 1994 ; Bonnel, 2004).

Les individus ont le choix entre un certain nombre d’alternatives auxquelles on associe une fonction d’utilité ui.La micro-économie conventionnelle suppose que les individus agissent rationnellement et possèdent toute l’information, c’est-à-dire qu’ils sélectionnent toujours l’option qui maximise leur utilité nette personnelle dans la limite de leur budget (au sens financier ou en terme de budget-temps). L’utilité est supposée avoir deux composantes : une composante déterministe qui est identique à la fonction d’utilité conventionnelle de la micro-économie et qui représente le niveau d’utilité moyen mesurable que l’individu t attache à l’éventualité i ; une composante aléatoire représentant tout ce qui n’est pas mesurable quant à l’individu t, pour l’alternative i. Ce terme est fonction des préférences de l’individu pour l’alternative et des caractéristiques non mesurables de celles-ci.

Uit = Vit + it

Uit = utilité de l’alternative i pour l’individu t

Vit = portion observable, déterministe de l’utilité

it = portion aléatoire de l’utilité

La partie observable de l’utilité est supposée être une fonction des attributs de l’alternative Xi et des caractéristiques socio-économiques de l’individu St.

Pour des raisons de commodité et de calage, Vit est donné par :

Vit = 1 Zit1 + 2 Zit2 + ... + n Zitn

où les j sont les paramètres de calage

et le vecteur Zit s’écrit sous la forme : Zit = f ( Xi , St )

La probabilité que l’alternative i soit choisie par l’individu t est donnée par

Pit = P( Uit  Ujt) ;  j  Ct , j  i

soit :

Pit = P(jt - it Vit - Vjt ),  j  Ct , j  i

La phase de distribution est parfois traitée simultanément avec la phase de partage modal (The Netherlands Ministry of Public Works, 1992). Parfois elle est traitée indépendamment et de façon agrégée (Calio, Méteyer, 2001).

Les modèles de partage modal logit multinomial désagrégés présentent les mêmes limites de pertinence et de cohérence que dans le cas agrégé. La condition IID conduit à la propriété IIA d'indépendance des alternatives non associées, hypothèse difficilement soutenable dans le cas d'un partage modal route / air / fer. Les logit binomial et multinomial aux fonctions d'utilités linéaires présentent des propriétés discutables : absence d'asymétrie de la réponse, probabilités limites à 0, impossibilité de prendre en compte un effet de seuil. Les formulations proposées par Gaudry s'appliquent toutefois aussi bien en désagrégé qu'en agrégé. Par ailleurs, les architectures logit hiérarchiques peuvent être envisagées pour contourner la propriété IIA. Les paramètres relatifs aux différentes variables sont supposés fixes pour l'ensemble des individus, ce qui constitue une hypothèse forte. Les phases de partage modal et de génération / distribution ne sont pas cohérentes entre elles. L'intérêt de caler des modèles de partage modal sur données d'enquêtes est d'une part de pouvoir segmenter la population pour calibrer des modèles sur des segments de demande homogènes, de mieux utiliser la variance de l'échantillon pour le calibrage et donc d'augmenter le nombre de variables explicatives, donc la pertinence du modèle. Toutefois cette approche dépend fortement de la qualité des enquêtes utilisées pour le calibrage. Par ailleurs, faute de disposer de données de panel, les paramètres sont estimés à partir de données en coupe instantanée. Or les élasticités en coupe instantanée sont généralement différentes des élasticités en temporel. Pour être équivalentes il faut être sûr d'avoir parfaitement décorrélé les variables ; par ailleurs il est très difficile d'expurger les effets de génération.