UNIVERSITE LUMIERE LYON 2
Laboratoire Dynamique Du Langage – UMR 5596
Ecole doctorale de sciences cognitives
LE GENRE GRAMMATICAL :
REPRESENTATIONS ET TRAITEMENTS COGNITIFS
Thèse de
Sciences Cognitives, mention linguistique
Directeur de thèse : Jisa Harriet
Membres du Jury : M. Fayol ; J. Pynte ; H. Jisa ; F. Meunier ; J. Franck.

A tous ceux qui ont traversés ma vie durant cette riche période, et plus particulièrement à tous ceux qui ont eus le courage de rester.

Remerciements

Il y a tant de personnes à remercier et si peu viennent à l’esprit au moment de le faire. Rassemblons nous et essayons d’être cohérente. Oui, l’emploi du ‘nous’ devient vite évident après cette ‘rude’ épreuve qu’est la rédaction d’une thèse. Ayant été sérieuse (hum, hum) durant ces trois années passées, je vais donc me permettre de ne pas écrire de remerciements stylistiquement corrects et de faire quelques petits écarts diplomatiques. De toutes façons personne ne les lit, c’est bien connu. Aller, c’est parti !

Je remercie chaleureusement les rapporteurs, Michel Fayol et Joel Pynte, ainsi que les membres du jury, Harriet Jisa, Fanny Meunier et Julie Franck, qui ont acceptés de lire et de commenter ce travail. Un grand merci à la région Rhône-Alpes qui m’a permis, par son concours financier, de réaliser ma thèse dans de bonnes conditions de par le projet EMERGENCE et de par la bourse de mobilité EURODOC d’un autre côté.

Je remercie en premier lieu Harriet Jisa pour avoir accepté d’être ma directice de thèse et Fanny Meunier pour m’avoir supervisée au cours de ces trois années. Je ne peux oublier les membres de l’équipe (Claire pour avoir réussi à me stresser, Delphine et Caroline pour son sourire et surtout pour s’être occupée de tout durant les dernières conférences), ainsi que tous ceux du laboratoire Dynamique Du Langage (entre autres, Egidio et Christian) qui par leurs diverses et nombreuses compétences ont aplanis les difficultés. A Uli Frauenfelder pour avoir accepté ma présence au sein du laboratoire FAPSE de Genève et à Julie Franck pour avoir répondu aux innombrables questions que je pouvais me poser quant à l’obscur domaine de la production, ainsi qu’au reste de l’équipe genevoise. A la marmotte, au chocolat et à la vache violette qu’il ne faudrait pas oublier. Enfin à Michel et à Andréas pour leur aide sans égale concernant la partie ERPs.

A Drien pour…tout. Je ne pourrais pas dire grand-chose de plus sans que cela devienne insipide par rapport à tout ce que tu m’as apporté. Donc simplement : avec tout mon amour. C’est fini. Tu vas pouvoir respirer. En espérant ne plus jamais te décevoir et qu’un jour je puisse à nouveau voir des étoiles dans tes yeux.

A mes parents pour leur patience, leur foi en moi (et pourtant parfois c’est pas simple) et leur soutient inconditionnel. A mon frère et à ma sœur. Là aussi je ne peux en dire plus. Ils savent tout le bien que je pense d’eux.

En vrac et sans ordre de préférence, ils ne m’en voudront pas (du moins j’espère) : Troll (tu vas les récupérer tes mouches), Juju (à qui je souhaite de trouver son chemin dans notre vaste monde), Fly & sa miss Steph (mes félicitations), Raph & Arnèle (mes deux collocs préférées), Jé (ami thésard ton calvaire tire à sa fin), Kouzin (je l’écris comme je veux d’abord), Eric, Fab, Lolothe, Clairette, Carole et le dernier mais pas des moindres, Simon (à prononcer à l’anglaise simon c’est pas drôle). Notez bien que je n’ai pas l’air fine avec vos surnoms à la noix ! A la fée, au skicoke, à l’arrow, aux mémorables soirées et à l’endroit où j’ai passé le plus de temps après mon boulot (quand même) : le Sham. Tout particulièrement à Sandy (Alors ? J’ai le droit de la voir encadrée dans ton rad ma thèse ou bien ? Avec la mention ‘élevée au Sham’ bien sur…). Et puis à tous ceux que je n’ai pas cités mais qui se reconnaîtront sûrement. A celui qui nous a quitté après avoir mangé mes docs : Spiff ; et aux deux zanimals arboricoles qui me servent de compagnons : Psycho & Pat.

Pis je garde le pire pour la fin…Tan, tan : au Trao des bois (au sens qu’il te plaira mon cher). Pour ses conseils avisés, quoique souvent dérangeants, pour m’avoir motivée, supportée, enguirlandée quand il le fallait. Sept ans que nous sommes les boulets l’un de l’autre, il était peut être temps de marquer le coup non ?

Résumé

Connaître une langue implique être capable de la parler et de la comprendre, c'est-à-dire que cela suppose d’acquérir les mots composants le lexique mental ou lexique interne (i.e. ensemble des informations correspondant aux unités détentrices de sens de la langue). Ce lexique interne serait organisé sur le modèle d’un dictionnaire, c’est à dire bâti autour d’une liste ordonnée d’entrées lexicales dont chacune d’entre elles véhiculerait les informations essentielles à leur identification, compréhension et à leur utilisation. Chaque unité lexicale serait caractérisée par trois informations spécifiques : sa forme phonologique, sa forme morphosyntaxique (i.e. catégorie grammaticale, genre ou nombre) et enfin sa signification. De plus, le temps nécessaire pour accéder à un item du lexique va être très sensible à tout un ensemble de facteurs associés au mot, tel que sa fréquence d’occurrence, sa longueur phonologique ou encore son nombre de voisins orthographiques. Par exemple, tant par un paradigme de décision lexicale (Grainger, 1990 ; Stone & Van Orden, 1993) que par une tâche de dénomination (Balota & Chumbley, 1985 ; Ferrand, 2000 ; Monsell, Doyle & Haggard, 1989), un grand nombre d’études ont mis en évidence une augmentation de la rapidité et de la justesse des réponses pour les mots fréquents par rapport aux temps obtenus pour des mots peu fréquents. Une volumineuse littérature c’est intéressée aux effets du contexte sémantique ou syntaxique sur les mécanismes de reconnaissance des mots ainsi qu’au contexte morphosyntaxique, mais par contre très peu encore se sont focalisées sur la composante de genre grammatical. Pourtant si l’on considère le genre grammatical comme étant une caractéristique inhérente à un nom donné, alors connaître les processus intervenant lors de son extraction permettrait d’avoir un aperçu plus précis des procédures mises en œuvre lors de l’accès aux représentations lexicales.

Quelque soit la langue, le genre grammatical est une façon classique de catégoriser les mots contenus dans notre lexique mental. Mais parallèlement à cette constatation, certains points sont sujets à variation et ce en fonction du système langagier étudié, tels que la modularité du nombre de classes (3 genres en allemand et seulement 2 en français), les critères d’assignation (critères sémantiques basés sur le sexe biologique et critères formels axés sur la structure morpho-phonologique des mots tel que les terminaisons) et les règles d’accords régissant la structuration d’une phrase grammaticalement correcte. Mais, bien que s’appuyant tant sur les indices conceptuels que formels, l’attribution d’un mot à une catégorie de genre ou à l’autre reste encore très arbitraire en français.

Le genre grammatical est donc une particularité linguistique relativement complexe. Mais en dépit de ceci, et malgré son omniprésence dans notre langue, les mécanismes cognitifs intervenant lors de son traitement ne sont encore que très peu connus, car peu étudiés. Si de plus en plus d’études, en production du langage tendent à utiliser cette information comme outil expérimental, très peu ont pour principal objectif l’étude du genre de façon systématique et isolée ; et à fortiori encore moins explorent cette spécificité en compréhension. Au vu d’un contexte scientifique pauvre en opposition avec un rôle prédominant dans notre système langagier, il semblait nécessaire d’approfondir nos connaissances des divers processus conduisant au traitement du genre grammatical en français.

Nous avons donc exploré, au cours de cette thèse, le rôle de l’information de genre lors des processus de production et de reconnaissance des mots. Plus précisément, nous nous sommes focalisés sur la dimension temporelle de son intégration dans les deux modalités. Pour cela nous avons exploré le degré d’implication du genre et à quel niveau temporel il était extrait lors du mécanisme de sélection des déterminants : (1) quand est ce que sont récupérés les informations phonologiques et de genre lors de la sélection des articles en français en production et en compréhension ; (2) lors de la reconnaissance visuelle des mots, à quel instant du processus d’accès au lexique interviennent les informations de genre grammatical. Les réponses obtenues via les différents protocoles menés (décision lexicale, décision de genre, catégorisation phonologique, etc.) nous ont conduit à reconsidérer certaines hypothèses de fonctionnement en production, ainsi que d’offrir un premier modèle exhaustif des divers processus impliqués lors de la récupération du genre en compréhension.

Mots clés : psycholinguistique, production, reconnaissance visuelle, genre grammatical, accès au lexique.

Abstract

Language capacity implies to be able both to speak and to understand it, i.e. that means to access to words stored in the mental lexicon. We can define this last as the storage cognitive system of all representations that are intrinsically related to each lexical unit or word. This internal lexicon is organized like a dictionary, i.e. is built around an ordered list of lexical entries and each one of them convey the essential information for its identification, comprehension or production. Words are characterized by three specific features: Their phonological code, their morpho-syntaxic form (i.e. grammatical category, gender and number) and finally their meaning. Moreover, actual models of words processes assume that the selection of the relevant candidate would be sensitive to a set of different factors such as their frequency, length or their orthographical neighbourhood. For example, both by lexical decision tasks (Grainger, 1990; Stone & Van Orden, 1993) and by denomination tasks (Balota & Chumbley, 1985; Ferrand, 2000; Monsell, Doyle & Haggard, 1989), a great number of studies had highlighted the speed and accuracy increasing for answers to frequent words compared to low frequent words: Common words are recognized more quickly than uncommon ones. If a voluminous literature was interested on semantic or syntactic context effects on words recognition mechanisms, very few studies were specifically focused on the grammatical gender dimension. However if gender is considered as an inherent property of words, then examine the various mechanisms implied during its recuperation would give us more precisions of processes implemented at the locus of lexical representations access.

Whatever the language considered, gender is a traditional way to categorize words contained in our mental lexicon. But in parallel to this observation, some points are prone to variation according to the linguistic system explored, such as the number of subclasses (3 in German: Feminine, Masculine and Neuter; and only 2 in French: Feminine and Masculine), the common features for distinguishing the different noun classes (semantic factors based on natural sex and formal factors based on the morpho-phonological structure of the lexical representations such as word-endings), and the agreement rules (gender marking is generally used to compute long-distance relations among elements in a sentence such as between nouns and articles or between nouns and adjectives). But, although based on these two different types of features, the formal rules for assigning gender in French are not straightforward and many exceptions exist. That why, it's said in French, that the assignment of these words to one or the other gender class is largely arbitrary. For example, why a chair ( une chaise ) is feminine or why a keyboard ( un clavier ) is masculine ?

The grammatical gender feature offers interesting opportunities to investigate the contribution of gender information to lexical access either in word production and recognition. Many studies were interested, in the last decades, to the temporal integration to phonological and gender cues during language production. They suggested that access to syntactic gender information was likely to be quicker than access to information concerning the phonological and orthographical form of the word (Caramazza & Miozzo, 1997; Levelt & al, 1991, 1999; Schmitt, Rodriguez-Fornells, Kutas & Münte, 2001; Van Turennout, Hagoort & Brown, 1997, 1998). By contrast, very little empirical evidence for the time course of these events was provided in the field of word recognition. Although latest studies argued that both grammatical gender (see Friederici & Jacobsen, 1999 for a review) and phonological information (Coltheart & Rastle, 1994) become activated in the course of this process, there is, however, a debate whether the activated information is selected in any case or only if needed.

The question addresses in the present study concerns the time course of the various processes involved in the treatment of gender, and more precisely, the aim was to determine whether the sequential timing of gender and wordform encoding found in production tasks was reversed or not in comprehension tasks. To answer these questions a series of off-line and on-line experiments will be done on native speakers of French. The planned experiments include further lexical decision tasks and gender decision tasks, and some production tasks. ERP experiments to investigate the above issues will be done as well. These tasks have allowed us to test some models in both modalities.

Keywords: psycholinguistic, word produxtion and recognition, grammatical gender, lexical access.