Modèles de la compréhension de mots

L’identification visuelle des mots : modèle général

Le mécanisme d’identification des mots débute par la perception d’un input visuel. Cette entrée va très rapidement être codée en une forme linguistique ayant une signification et des caractéristiques grammaticales propres qui vont, dans un second temps, être mises à la disposition des différents mécanismes intervenant lors des processus de compréhension.

En prenant appui sur le modèle proposé par Levelt (1989) en production du langage, Perfetti (1999) offre un modèle alternatif (voir la figure 5) pour les processus de compréhension de la langue écrite (voir aussi Perfetti, Liu, & Tan, 2002 ; Perfetti & Hart, 2001). Ce modèle est applicable au système d’écriture alphabétique, tel qu’il est utilisé tant dans les langues romanes (i.e. espagnol, français ou italien), anglo-saxonnes (i.e. anglais) ou germaniques (i.e. allemand, hollandais). Selon lui, les différentes phases composant la procédure de lecture ont pour but de permettre la conversion des unités du système d’écriture (i.e. les lettres) en représentations mentales, c'est-à-dire en messages ou en informations compréhensibles. La première étape est représentée par l’activation des unités graphémiques par le stimulus visuel constitué par une suite de symboles, ou lettres. Les unités ainsi identifiées par le système orthographique vont provoquer l’activation des unités lexicales mises en mémoire dans ce qui est communément appelé le lexique mental. Mais, l’identification des mots nécessite une étape effectuée parallèlement au mécanisme graphémique : l’activation des unités phonologiques (incluant les phonèmes et provenant de l’association des lettres) par l’input visuel. Donc l’activation d’un mot impliquerait la co-activation des composantes orthographiques et phonologiques. Cette théorie dite de la Dual Route fut élaborée par Coltheart (1978), puis confirmée par la suite par un ensemble d’études (voir entre autres Brent & Perfetti, 1995 ; Coltheart, Curtis, Atkins & Haller, 1993 ; Coltheart, Rastle, Perry, Langdon & Ziegler, 2001 ; Ferrand et Grainger, 1992 ; Lukatela & Turvey, 1990a, 1990b ; Perfetti, Bell & Delaney, 1988 ; Seidenberg & McClelland, 1989). Selon cette théorie, une première voie d’accès donnerait de façon directe la représentation du mot à partir de l’entrée graphique. Alors, qu’à l’opposé, une seconde route impliquerait d’abord la conversion des graphèmes en phonèmes, avant que les unités ainsi activées ne soient par la suite utilisées pour accéder à la représentation du mot. L’output de ce processus d’identification serait la représentation lexicale d’un mot, ses différentes caractéristiques grammaticales associées et bien sur sa signification. Ces spécificités syntaxiques et sémantiques vont être au final mises à la disposition du processus de décodage grammatical. Le rôle de ce dernier étant de convertir la représentation lexicale en une interprétation sémantique de la phrase qui soit en accord avec sa structure syntaxique.

Figure 5 : Modèle de reconnaissance des mots par Perfetti, 1999.
Figure 5 : Modèle de reconnaissance des mots par Perfetti, 1999.

Il est important de noter qu’en l’état actuel des connaissances, la question se pose encore de savoir si comme dans le modèle ci-dessus présenté, le transfère d’informations s’effectue de façon sérielle ou bien en cascade, c'est-à-dire si les différents étapes sous soumises ou pas à un mécanisme de feedback.