2. Les types de relations avec les différents peintres avant l’agrément de Pierre Drevet à l’Académie en 1703

Pierre Drevet a gravé quarante-deux portraits d’après Hyacinthe Rigaud ce qui représente le tiers de l’œuvre du graveur. Ses relations avec le peintre ont été évoquées plus haut, de même que les premières gravures, jusqu’en 1696. Ce qui peut être considéré comme la première période de collaboration avec Rigaud se termine donc en 1698 avec le portrait de Jean-Antoine de Mesmes (cat. P.Dr. n° 96) et celui de l’évêque Hippolyte de Béthune (cat. P.Dr. n° 68). Entre 1688 et 1698, Drevet réalise dix gravures d’après Rigaud. La part la plus importante de leur collaboration reste à venir et s’établit donc entre les années 1699 et 1730, période de production qui sera évoquée plus loin.

Si les relations entre Pierre Drevet et Hyacinthe Rigaud sont connues, il n’en est pas de même pour celles concernant le graveur et Jean Jouvenet (1644-1717), François de Troy (1645-1730), Nicolas de Largillierre (1656-1746), Antoine Coypel (1661-1722), peintres d’après lesquels Pierre a gravé vingt-neuf planches.

Le premier de ces quatre peintres dont Pierre ait reproduit une œuvre, est Nicolas de Largillierre, avec en 1692, le portrait déjà cité de Jean-Martin Mitantier. Huit autres portraits du même peintre suivront, parmi lesquels sont à remarquer, pendant cette période initiale, ceux de Nicolas Lambert de Thorigny (cat. P. Dr., n° 92), de son épouse Marie Lambert de Thorigny (cat. P. Dr., n° 93), de leur fille Hélène de Motteville(cat. P. Dr., n° 99) et de Jacques-François-Edouard Stuart, prince prétendant au trône d’Angleterre (cat. P. Dr., n° 15), tous gravés entre 1697 et 1700. Comment Nicolas de Largillierre et Pierre Drevet collaboraient-ils et collaboraient-ils vraiment ? À ce jour, aucune biographie n’a rapporté de faits nous renseignant sur ces questions. Nuls dessins finis et connus, destinés au graveur par Largillierre, n’ont été retrouvés 278 . On peut néanmoins penser que Drevet a relevé des éléments de travail devant les tableaux — en ce qui concerne les grands formats — soit dans l’atelier du peintre, soit chez lui, devant des copies. Il se peut également qu’il ait transmis pour correction les premières épreuves à Nicolas de Largillierre, comme il le faisait, sans doute, pour Hyacinthe Rigaud. En effet, on observe que la réalisation par Pierre des gravures d’après Nicolas de Largillierre, est comparable en finesse et en beauté à celle des gravures d’après Hyacinthe Rigaud, en tout cas pour les portraits cités plus haut, ainsi que pour deux portraits dont l’exécution intervient en 1699 et 1701 et qui seront évoqués plus bas.

Onze portraits, brossés par François de Troy, ont été gravés par Pierre Drevet entre 1694 et 1713, dont cinq avant 1698. Des relations amicales, on l’a constaté plus haut lors du contrat de mariage de Pierre, existaient entre les deux artistes, mais aucune source n’a été retrouvée concernant leurs relations professionnelles. Bien que l’œuvre de Drevet soit exempt de portraits en pied d’après François de Troy, on remarque, parmi les portraits en buste inscrits dans un ovale, le portrait de Philippe V d’Espagne en 1701 (cat. P. Dr., n° 16), celui du maréchal Adrien-Maurice de Noailles en 1704 (cat. P. Dr., n° 51) ou celui de Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, en 1706 (cat. P. Dr., n° 34). Doivent être également signalés, d’après ce peintre, son portrait (cat. P. Dr., n° 119) et le portrait de Boileau Despréaux (cat. P. Dr., n° 103). Ces gravures appartiennent à l’ensemble des excellents ouvrages de Pierre.

S’agit-il d’une coïncidence, mais les premiers travaux de Pierre Drevet d’après Jean Jouvenet commencent en 1703-1704, lorsque le graveur fréquente l’Académie et peut côtoyer les grands maîtres. Citons l’Education de la Vierge (cat. P. Dr., n° 2), Saint Bruno en prière (cat. P. Dr., n° 9), le Mariage de la Vierge, commencé par Michel Dossier et terminé par Pierre Drevet (cat. P. Dr., n° 3), et le portrait de Camus de Pontcarré (cat. P. Dr., n° 86). Ces quatre gravures des années 1703-1704 sont suivies en 1708 et 1713 de deux portraits, celui de Louis Le Gendre (cat. P. Dr., n° 111) et celui de Dom Arnoul de Loo (cat. P. Dr., n° 78). Les œuvres de Jouvenet reproduites par Drevet sont donc peu nombreuses.

D’autre part, on ne peut passer sous silence les trois sujets religieux gravés d’après Antoine Coypel, dont le Calvaire ou les trois Croix (cat. P. Dr., n° 7), entre 1692 et 1696, l’Annonciation à la Vierge entre 1703 et 1715 (cat. P. Dr., n° 4) et le Sacrifice d’Abraham en 1707 (cat. P. Dr., n° 1). Les relations entre Antoine Coypel et Pierre Drevet nous sont inconnues. On ne peut que supposer leur existence, si l’on observe que Pierre-Imbert a également gravé par la suite, soit d’après Antoine Coypel, soit d’après son fils Charles-Antoine Coypel (1694-1752).

Parmi les trente-trois peintres, autres que ceux cités précédemment, et dont Pierre a reproduit un ou deux tableaux, doivent être mentionnés Charles Le Brun, (1612- 1695), pour le portrait d’André Félibien peu après 1695 (cat. P. Dr., n° 105), Pierre Mignard (Troyes 1612-Paris 1695) pour le portrait de Claude Le Peletier en 1711 (cat. P. Dr., n° 61), la Famille de Darius aux pieds d’Alexandre, planche commencée par Gérard Edelinck et terminée par Pierre Drevet peu après 1707 (cat. P. Dr., n° 12), Joseph Vivien pour le portrait de François Girardon en 1696 (cat. P. Dr., n° 107). Ajoutons à ces trois éminents peintres Antoine Dieu (1662- 1727) pour le Repentir de Saint-Pierre (cat. P. Dr., n° 6), Pierre Gobert (1662-1744) pour le portrait du marquis de La Vrillière vers 1700-1701 (cat. P. Dr., n° 60) et celui de Louis-Henri de Bourbon, prince de Condé en 1724(cat. P. Dr., n° 29).

Le reste de la production de Pierre est réalisé, soit d’après des peintres étrangers tels que Benedetto Gennari (1633-1715) en 1693, avec le portrait de Jacques Fitz-James, duc de Berwick (cat. P. Dr., n° 38), Godfrey Kneller (1646-1723) entre 1703 et 1710, avec le portrait de Montague (cat. P. Dr., n° 63), Adriaen van der Werff (1659- 1722) en 1697, pour la série des portraits en grisaille de Charles II d’Angleterre, d’Olivier Cromwell et de Thomas Fairfax (cat. P. Dr., nos 14, 57, 59), soit d’après des peintres moins connus tels que de Saint-Jean 279 , pour le portrait de Jean de la Bruyère en 1697 (cat. P. Dr., n° 110), Jean André pour le portrait d’Alexandre Piny (cat. P. Dr., n° 81) en 1710, Gabriel Revel (1642-1712) en 1698, pour le portrait de Pierre Palliot, historiographe du roi et généalogiste du duché de Bourgogne (cat. P. Dr., n° 114), Augustin Oudard, dit Justina (mort en 1743), pour les portraits du Cardinal de Noailles en 1696 et 1700 (cat. P. Dr., nos 48, 49).

Notes
278.

Il faudra attendre la publication du catalogue raisonné de l’œuvre de Nicolas de Largillierre par Dominique Brême pour confirmer ou infirmer cet état de fait.

279.

Le Thieme et Becker ne connaît qu’un « de Saint Jean » actif vers 1770-1777, peintre de portrait, miniaturiste et peintre sur émail, admis à l’académie de Saint-Luc. Il ne peut s’agir de celui-ci.