2. Introduction à une étude sur les catalogues de ventes

La postérité des Drevet est également perceptible dans les innombrables catalogues des ventes de collections effectuées au cours des XVIIIe et XIXe siècles et dans les quelques catalogues d’expositions sur la peinture de portrait organisées au XXe siècle. Ces ventes sont, en quelque sorte, l’image des goûts et des modes de chaque époque.

Ce sont les estampes qui, par leur beauté, ont apporté en leur temps le plus de notoriété aux Drevet que l’on retrouve, bien entendu et le plus souvent, dans ces catalogues de ventes, les autres, moins connues ou moins vantées par la critique, étant cependant citées, mais rassemblées en lots pour être vendues.

En outre, les catalogues de vente des collections des peintres, graveurs et collectionneurs célèbres du XVIIIe siècle ― qui ont jalonné ce siècle et qui sont une mine de renseignements ―, présentent souvent, quelques-unes des meilleures estampes des Drevet comme, par exemple, le catalogue de la vente Collin de Vermont en 1761, celui de la vente de Benoît Audran en 1772 ou encore les catalogues des ventes de Pierre-Jean Mariette en 1777, de Noël Hallé en 1781 et de Pierre-François Basan en 1798. On les trouve souvent aux côtés des estampes de Girard Audran ou Gérard Edelinck.

En même temps que l’intérêt manifesté pour la gravure durant le XIXe siècle, celui des collectionneurs pour l’œuvre des Drevet semble avoir été vif, illustré par les catalogues de Charles Le Blanc en 1856 et de Firmin-Didot en 1876, entre autres, jusqu’aux ventes des grandes collections d’estampes, ― comme celles de Marshall à Londres en 1864, Firmin-Didot et Behague en 1877 ― dans lesquelles les estampes des Drevet forment une collection cohérente et raisonnée, démontrant que leurs propriétaires n’était pas seulement collectionneurs mais aussi connaisseurs.

Si l’on étudie le dictionnaire des ventes d’art de Mireur, trois estampes, comme l’on pouvait s’y attendre, ont surtout fait l’objet de l’engouement des collectionneurs au fil du temps et, l’étude des prix ― bien que tributaires du contexte économique et des enchères de la vente ― peut, cependant, être une indication sur l’intérêt porté à l’œuvre 788 .

Le Portrait de Louis XIV en tenue d’apparat, gravé par Pierre en 1712 d’après Rigaud, est cité dans une trentaine de catalogues de ventes qui ont eu lieu en France et à l’étranger. Le prix de l’estampe qui n’a jamais dépassé la cinquantaine de livres au XVIIIe siècle, atteint les cent cinquante puis deux cents francs en 1821 et 1823. Son prix ne fera que baisser jusqu’à la fin du siècle, atteignant cependant cent vingt francs à la vente d’Ambroise Firmin-Didot en 1877.

On observe le prix soutenu, pendant les XVIIIe et XIXe siècles, de l’estampe représentant le Portrait d’Adrienne Lecouvreur gravé en 1730 par Pierre-Imbert, d’après Charles-Antoine Coypel, et dont le prix du premier état culmine à mille dix francs à la vente de Firmin-Didot en 1877. Ce portrait, loué par la critique et déja recherché par les collectionneurs du XVIIIe siècle, se retrouve dans plus de trente catalogues de ventes dont la majeure partie est du XIXe siècle.

De ces trois estampes, c’est le Portrait de Bossuet, gravé par Pierre-Imbert en 1723, d’après Rigaud, qui a rencontré la plus forte demande de la part des collectionneurs et des amateurs car il est cité dans une cinquantaine de ventes selon Mireur. Dès le XVIIIe siècle, le premier état atteint des sommes importantes  : à la vente de Pierre Jean Mariette en 1775, son prix a atteint cent deux livres, à celle de Lemarié en 1776, cent cinquante-neuf livres, puis à celle de Servat en 1778, cent soixante livres. Les prix s’envolent à partir de 1814 à la vente Suison où un premier état s’achète trois cent dix francs pour atteindre trois ans plus tard, à la vente Logette la somme de quatre cents francs. En 1821, un même premier état se vend six cents francs à la vente Durand, pour arriver à neuf cents francs en 1862 à la vente Archinto. Les prix du premier état resteront élevés à partir de cette période : à la vente Marshall à Londres, en 1864, un exemplaire atteint la somme de huit cent soixante-quinze francs et un autre, à la vente Behague en 1877, est adjugé sept cents francs.

Bien entendu, les meilleurs estampes de Pierre ou de Pierre-Imbert, telles que la Duchesse de Nemours ou la Présentation de l’Enfant Jésus au Temple et le Portrait du cardinal Dubois, figurent aussi dans les ventes.

Le dépouillement des innombrables catalogues de ventes et la synthèse qui pourrait en être tirée sur la postérité de l’œuvre des Drevet par rapport à d’autres graveurs au burin et à d’autres genres de gravure de la fin du XVIIe siècle et du XVIIIe siècle, adjoindrait des éléments intéressants à cette introduction mais nécessiterait une étude spécifique.

Notes
788.

Mireur 1910, II, pp.532-548.