2. Notes manuscrites de Pierre-Jean Mariette (1740-1770)

Le collectionneur, expert et critique bien connu en France et à l’étranger, a probablement approché les Drevet pour pouvoir résumer en si peu de mots l’essentiel de leur art. Ses notes et ses commentaires précis sur les artistes, très rarement entachés d’erreurs, sont une source crédible et indispensable à la mise en œuvre d’une étude.

‘« Les Drevet sont au nombre des maitres qui ont exercé la gravure au burin avec le plus de science. L’émulation que du [sic] naturellement produire l’exemple de ces habiles artistes, a sans doute empéche que cette pratique de graveure autrefois la seule en usage et si nécessaire pour certains genres ne retombat & ne perisse entierement.
Pierre Drevet le père en possession de graver tout ce qui de son temps s’est fait de plus considérable en France en matière de Portraits, s’y est acquis une très grande réputation par le nombre de beaux ouvrages qu’il a mis au jour. Les deux grands Portraits de Louis XIV et de Louis XV qu’il a gravé pour sa Majesté très Chrétienne et par son ordre sont exécutés avec un soin et dans un détail, dont peu de maitres auroient été capables. Aussy cet artiste étoit-il doué d’une patience infinie, et pourveu qu’il parvienne au but qu’il s’estoit proposé, il se mestoit peu en peine du temps qu’il lui en coutoit, et du travail souvent rebutant, qu’il lui falloit essuyer.
Son fils elevé dans la méme profession, ne s’y est pas rendu moins recommandable. Il a paru sur les rangs de très bonne heure. Et dans un âge où la pluspart des autres ne font que commencer à se faire connoistre, il débute par des ouvrages de maistre, si accomplis dans toutes leurs parties, que l’on n’y peut rien désirer et qu’il lui auroit peut etre eté difficile à lui même de rien faire de plus parfait dans la suitte. Son burin est d’une couleur extremement douce et brillante et l’on ne peut regarder sans etonnement les recherches dans les quelles il est entré, et avec quelle legereté, quelle precision il a executé chaque objet suivant le caractère qui lui convenoit. Peu de graveurs eussent osé entreprendre un travail aussy épineux ; c’est qu’il en est peu qui ayent assez de dexterité, de patience et d’amour pour le travail. Pierre Drevet en élevant son fils dans la graveure y a en même temps instruit un de ses neveux qui commence à donner des espérances. Tout ce qui est sorti d’entre les mains de ces graveurs est rassemblé dans ce Recueil. On a cru pouvoir y joindre à la fin ce qui a été gravé par Simon Vallée disciple de Drevet et par les deux Chereau dont l’aisné a travaillé chez Drevet pendant quelque temps. Tous ces graveurs sont actuellement vivans et les deux derniers sont presque les seuls qui partagent avec les sieurs Drevet la réputation de bien graver au burin. François Chereau l’aisné a gravé de fort beaux portraits, son frère qui a appris sous lui, a aussy beaucoup de talent. Pour Vallée il avoit commencé à se donner entièrement à la gravure au burin et il y avait assez bien reussy mais il l’a abandonnée depuis, et a preferé l’usage de l’eau-forte 795  ».’
Notes
795.

Pierre-Jean Mariette, 1740-1770, BNF, Est., Ya2. 4, rés., petit fol., microfilm R 064879 à 070199, vol. III, folio 45 r °.