116. rigaud (Maria serre, Madame ) , d’après Hyacinthe Rigaud

S. d. [1702]

Burin

H. 0,445/6, L. 0,346/7 au tr. c. ext. ; H. 0,457, L. 0,355 à la cuvette

Sur la face du piédestal, au centre : maria serre // Mater Hyacinthi Rigaud Regii Pictoris // Qui Hanc a se pictam effigiem // in ære incidi curævit [sic] // æternum // erga Matrem optimam // Pietatis Monumentum.; sous le tr. c. ext. à g. : Drevet Sculpsit ruë du Foin devant les Mathurins. ;

Dans un médaillon, en buste, sans mains, le corps tourné légèrement de trois quarts à gauche, la tête et le regard de face, une coiffe dont les pans retombent en drapé dans le dos et le long de l’épaule gauche couvrant la tête, la mère du peintre, placée devant un paysage, porte sur les épaules une étole attachée sur la poitrine par des rubans.

I : avec la mention Hyacinth. Rigaud pinxit sur le dessus du socle, à gauche ; (cité par Paignon-Dijonval qui ajoute le nom de Drevet également sur le dessus du socle. Cité par Firmin-Didot comme étant au musée de Berlin)

II : l’état décrit ; la mention Hyacinth. Rigaud pinx., inscrite sur le piédestal, a été grattée mais est encore visible ; (BNF, Est. : Ed 99b rés., in-fol. ; Da 62, in-fol.,p. 15, Mf E66730 ; N3, in-fol., vol. 81, Mf D291839 ; s.n.r., à Drevet, 3 épr. - Paris, ENSBA, fol. 1439, rés., p. 18 - Paris, Fond. Custodia - Caen, MBA - Dijon, MBA - Baltimore, MA - Bruxelles, BR, Estampes - Francfort, Städel- Genève, MAH, Estampes - Londres, BM - Londres, V&A - Philadelphie, MA - Rome, InG, Farnesina - Stockholm, Nm - Vienne, Albertina - Vienne, ABK, Kupferstichkabinett - Washington,NGA, 1984.92.2)

Épreuves non consultées : Strasbourg, Musées, Estampes - Amsterdam, Rijks - Bologne, PN, GDS - Dresdre, SK.

Biographie de Rigaud : voir numéro suivant.

Maria Serre épouse en 1655 Mathias Rigau y Ros dit Rigaud dont elle a Hyacinthe en 1659. Devenue veuve alors que Hyacinthe n’avait que huit ans, elle envoie son fils en 1673 étudier chez le peintre Pezey en activité à Montpellier 1 . Elle meurt après 1715. Rigaud lui sera reconnaissant, sa vie durant, de l’avoir laissé embrasser la carrière artistique et concevra pour elle une véritable vénération.

En 1695, Rigaud part pour son pays natal dans l’intention, tout en revoyant sa mère, d’en réaliser le portrait pour permettre à Antoine Coysevox (1640-1720) de sculpter son buste 2 . Il réalise ce portrait sous trois angles de vue différents, l’un de face, le second de profil et le troisième de trois quarts, les deux derniers sur une même toile conservée au Louvre 3 . Par testament signé en 1707, Rigaud lègue le buste en marbre au Dauphin et le portrait de sa mère « en trois faces » à son neveu Hyacinthe Rigaud et à sa descendance mâle 4 . Le portrait qui a servi de modèle à Drevet est celui représentant Marie Serre de face 1 . Les trois attitudes ont été exposées au Salon de 1704 sous le titre « Madame Rigaud en trois différentes attitudes 2  ».

Rigaud mentionne le portrait de sa mère dans son Livre de Raison à l’année 1695 et Van Hulst indique que le portrait a été gravé par Drevet en 1702 3 . Les termes dont Van Hulst accompagne cette indication sont les suivants : « ...et ne s’étant pas voulu tenir à cette seule marque d’amour pour elle, il l’a fait graver ensuite par le sieur Drevet, un des plus habiles graveurs au burin de ce temps, afin de multiplier et de reproduire en quelque façon à la postérité celle qui l’a mis au monde 4  ». Quant à Mariette, il souligne à juste titre : « Mr Rigaud avoit été faire à la fin de cette année [1695] un voyage à Perpignan exprès pour faire le portrait de sa mère, laquelle il honorait tendrement… »

Un premier état avec le nom de Drevet inscrit sur le piédestal est cité par Le Blanc. Cette hypothèse peut s’avérer exacte en raison des traces, certes minimes mais visibles, laissées par le grattage sur le côté droit. Il doit donc exister un état présentant sur le dessus du socle le nom de Rigaud à gauche et celui de Drevet à droite. L’état II actuel est celui où les deux noms ont été grattés.

Plusieurs erreurs sont à relever : celles de l’abbé Lelong qui date l’estampe de 1706, bien que Drevet ne soit plus rue du Foin à cette époque, de Gori qui attribue le portrait à Pierre-Imbert, de Firmin-Didot qui ne mentionne pas les épreuves conservées au département des estampes de la Bibliothèque nationale et de l’Inventaire du fonds français qui inscrit pour le second état le mot curavita  pour curaevit ainsi qu’une dédicace incomplète dans laquelle il manque les mots erga Matrem optimam.

Ce portrait illustre, une fois encore, la collaboration étroite entre Pierre Drevet et Hyacinthe Rigaud par le soin apporté à l’ornementation du médaillon que l’on nommerait de nos jours « mise en scène ». Le peintre a probablement remis à Pierre une esquisse ou un dessin, mais le graveur a obligatoirement vu le tableau en raison du rendu exceptionnel du coloris, des nuances et de l’expression.

Rigaud possédait le cuivre puisqu’il s’est retrouvé dans sa succession au profit de sa nièce, veuve du peintre Jean Ranc 5 . Drevet a-t-il travaillé à titre gracieux pour Rigaud et lui a-t-il fait don du cuivre ? Ou bien Rigaud a-t-il commandé et payé régulièrement le travail au graveur ? Aucun document, aujourd’hui, ne permet de répondre à cette question. Pierre Drevet a rendu au plus haut degré la beauté du tableau de son ami Rigaud qu’il savait très attaché à sa mère. En confiant à Pierre Drevet le soin de graver le portrait de sa mère, Rigaud rendait hommage tant à cette dernière qu’au talent du graveur, lui renouvelant sa confiance et son amitié.

Pierre Drevet s’établit rue Saint-Jacques à l’Annonciation à partir de Noël 1702. Le portrait a donc été achevé avant cette fête et la date de 1702, que Van Hulst et Mariette donnent pour la gravure, est vraisemblable.

Gravé également d’après Rigaud par Edelinck (voir BNF, estampes, œ uvre de Rigaud).

(Voir volume I : pp. 75, 171, 202).

bibliographie

Mariette 1740-1770, III, f° 48 v°, n° 95,VII, p. 7 ; Dezallier D’Argenville 1745, II, p. 406 ; Basan 1767, p. 175 ; Gori 1771, I, p. 364  ; Lelong 1775,p. 268 ; Huber et Rost 1797, VIII, p. 3 ; Paignon-Dijonval 1810, 7368 ; Joubert 1821, I, p. 435 ; Nagler 1836, III, p. 476; Dussieux & coll. 1854, II, pp. 117, 127-128, 176 ; Le Blanc 1856, II, P. Dr., n° 104 ; Villot 1855, n° 478 ; Firmin-Didot 1876, P. Dr., n° 110 ; Firmin-Didot 1875-1877, P.Dr., n° 476 ; Portalis et Beraldi 1881, II, p. 20 n° 46 ; Bellier et Auvray 1882, I, p. 446 ; Bryan 1893, I, p. 425 ; Rondot 1896, p. 109 ; Mireur 1910, II, pp. 537, 539, 541 ; Soulange-Bodin 1914, pp. 6-49 ; Roman 1919, p. 46 ; Audin et Vial 1919, p. 288; Brière 1924, p. 223, n° 784; Duportal 1926, 3, p. 32, pl. III ; IFF . XVIII e 1951, VII, P. Dr., n° 109 ; Rosenberg, Reynaud, Compin 1974, II, p. 81 n° 719, p. 215 ; Thieme et Becker-Saur 2001, XXIX, p. 409.

catalogues de ventes ( complément au Dictionnaire Mireur )

Vente par Musier et Knapen 1753, p. 16, n° 134 ; Catalogue de la vente Marron, 1832, p. 21, n° 93.

catalogues d’expositions

Liste des tableaux et des ouvrages de sculpture, exposez dans la Grande Gallerie du Louvre... en la présente année 1704, à Paris, Coignard 1704, p. 31.

Catalogue de l’Exposition Visages du grand siècle « Le Portrait français sous le règne de Louis XIV, 1660-1715 », Nantes, musée des Beaux-Arts, 20 juin au 15 septembre 1997 ; Toulouse, musée des Augustins, 8 octobre 1997 au 5 janvier 1998, pp. 187, 266-267 n° 139.

Notes
1.

Dussieux et coll. 1854, II p. 127-128.

2.

Dezallier D’Argenville 1745, II p. 406.

3.

Inv. n° 7522, dimensions : H. 083, L. 1,03 m. Voir Rosenberg, Reynaud, Compin 1974, II, p. 81, n° 719 et p. 215.

4.

Chennevières, Montaiglon 1855-1856, IV pp. 25-32.

1.

Collection particulière Fontaine-Henry. Catalogue de l’Exposition Visages du grand siècle, « Le Portrait français sous le règne de Louis XIV, 1660-1715 », Nantes, Toulouse, 1997-1998, pp. 187, 266-267 n° 139.

2.

Liste des tableaux et des ouvrages de sculpture, exposez dans la Grande Gallerie du Louvre, Coignard 1704, p. 31.

3.

Il ne peut avoir été gravé après cette date car le graveur n’habite plus rue du Foin depuis Noël 1702. Voir A. N. , m. c., ET/ XLIX/ 425, et annexes, vol. III, p. 14.

4.

Voir Dussieux et coll. 1854, II p. 117.

5.

Voir Chennevières et Montaiglon 1851-1860, IV, pp. 25-32.