2.4. Les faiblesses du modèle Mundell–Fleming

Le modèle Mundell–Fleming est critiqué sur un certain nombre de points 61 . La première critique concerne les niveaux de prix, supposés rigides. En supposant que les prix sont bloqués, le modèle sous-estime la dimension nominale et présume que l’inflation par la demande n’existe pas. Ainsi, il n’y a pas de distinction entre les taux d’intérêt, nominal et réel.

Le modèle Mundell–Fleming ne prend pas en compte par ailleurs les chocs d’offre, comme par exemple les chocs pétroliers. Ce modèle appartient à la catégorie de modèles de demande agrégée où la variation des niveaux de prix et la distinction entre les taux d’intérêt, nominal et réel, n’entrent pas en jeu. Comme le problème de l’offre ne se pose pas, les entreprises fournissent toute la quantité demandée au prix de vente initial.

Le modèle Mundell–Fleming est aussi critiqué parce qu’il adopte une vision keynésienne rigide de l’épargne. D’après ce modèle, la hausse du déficit public accroît le revenu via le multiplicateur keynésien interne. La hausse du revenu entraîne à la fois l’accroissement de l’épargne et du taux d’intérêt. La hausse du taux d’intérêt évince l’investissement interne. Cette hypothèse est critiquée par les économistes classiques, qui défendent la théorie selon laquelle les agents économiques épargnent davantage lorsque l’Etat a un énorme déficit public, puisque ce déficit sera tôt ou tard remboursé sous forme d’impôts et de taxes. D’après ce raisonnement, les agents économiques vont épargner quel que soit le taux d’intérêt.

Une autre critique du modèle Mundell–Fleming concerne les actifs financiers en jeu, qui sont seulement la monnaie et les obligations. Ainsi, comme il existe un seul taux d’intérêt (nominal), le modèle ne fait pas de distinction entre les obligations, les bons du Trésor, les effets de commerce, etc., et suppose que ces instruments sont parfaitement substituables et qu’ils produisent un taux d’intérêt unique. Cette caractéristique du modèle ne permet pas de rendre compte de la réalité en matière de pratique bancaire et financière.

Le modèle est aussi critiqué parce qu’il suppose que le stock de capital est constant et parce qu’il se concentre sur les fluctuations de court terme. Ainsi, l’accumulation d’actifs et de richesse n’est pas prise en compte.

Le modèle est également critiqué parce qu’il manque de fondements microéconomiques dans la construction de la courbe IS, et parce qu’il n’intègre pas les anticipations rationnelles des agents économiques.

Un autre reproche vis-à-vis du modèle Mundell–Fleming est que la politique monétaire est représentée comme la fixation de l’offre de monnaie. Cette représentation ne correspond pas tout le temps à la pratique des banques centrales, qui fixent en général le taux d’intérêt à court terme pour spécifier leurs stratégies monétaires comme nous avons déjà vu 62 .

Notes
61.

Parmi les critiques, nous citons Tobin (1969), Friedman (1976), Wallace (1980), Barro (1984), Sims (1992) et Brunner et Meltzer (1993). Pour une revue des critiques vis-à-vis des modèles IS–LM et Mundell–Fleming, voir McCallum et Nelson (1997).

62.

Le taux d’intérêt à court terme est fixé en fonction des prévisions d’inflation et de l’écart de la production à la production potentielle (« output gap »).