Section (II) : La tarification des échanges internationaux

Introduction

L’intérêt que portent les économistes de l’organisation industrielle à l’élasticité prix par rapport au coût réside dans l’information que cette élasticité peut fournir. Cependant, les observations sur l’élasticité prix des importations fournissent une vision limitée du comportement de la firme ou de l’industrie.

La transmission des variations de change à un marché particulier dépend, d’une part de l’élasticité des taux de marge, d’autre part de l’association du taux de change de la destination et des coûts de production de l’exportateur.

Les changements dans le coût marginal se transmettent en général en entier au marché destinataire, alors que les variations des cours de change affectent les prix inégalement dans les différents pays.

Sur un marché mondial intégré, la discrimination de prix n’est pas possible et les prix fixés par les exportateurs sont identiques pour les différentes destinations. Ces prix égalisent le coût marginal (plus un taux de marge commun si le marché n’est pas parfaitement concurrentiel).

Les études empiriques portant sur les comportements de fixation de prix à l’international montrent que la répercussion des variations de change sur les prix est faible pour certains pays (notamment le Japon où les entreprises adoptent un comportement de PtM) et forte pour d’autres pays (notamment les Etats-Unis où les prix à l’exportation intègrent les fluctuations du taux de change). Knetter (1993) montre, par exemple, que les entreprises japonaises absorbent la moitié des fluctuations du taux de change en modifiant leurs taux de marge, alors que les entreprises américaines répercutent la totalité des variations de change sur leurs prix à l’exportation.

L’asymétrie des méthodes de tarification des échanges internationaux pose un certain nombre de questions sur la validité des modèles de transmission internationale des chocs monétaires qui supposent que toutes les firmes, nationales et étrangères, adoptent le PtM (Otani, 2002). Dans ce cas extrême, la transmission des variations de change aux prix à l’exportation est nulle pour toute une nation, et la dépréciation de la monnaie de cette nation améliore ses termes de l’échange et détériore les termes de l’échange des autres pays.

Le report des variations du taux de change sur les prix à l’exportation est une pratique moins courante ces dernières années. Cela s’explique par les taux d’inflation bien maîtrisés au niveau mondial et par la stabilité des politiques monétaires (Taylor, 2000). Selon le raisonnement de Taylor, une plus faible inflation conduit à une plus faible transmission des variations de change sur les prix à l’importation d’un pays. Les exportateurs préfèrent fixer leurs prix dans des monnaies stables au niveau international (Devereux et Engel, 2001), (Bacchetta et Wincoop, 2001). Ainsi, dans les pays où la politique monétaire est stable et le taux d’inflation faible, les entreprises fixent leurs prix à l’exportation dans leur propre monnaie. En revanche, dans les pays où la politique monétaire est instable et l’inflation peu maîtrisée, les entreprises fixent leurs prix dans la monnaie du pays de l’acheteur. D’après Campa et Goldberg (2002), « si les exportateurs fixent leurs prix dans la monnaie du pays qui conduit une politique monétaire stable, les prix à l’importation exprimés en monnaie locale seront plus stables dans les pays où la politique monétaire est plus stable. Toutes choses égales par ailleurs, le pass-through sera plus élevé pour les pays qui conduisent une politique monétaire plus volatile » 129 , 130 . Devereux (2000) montre que le degré de transmission des variations de change aux prix est très élevé dans les économies émergentes, contrairement aux économies avancées où le degré de transmission est limité à court terme.

Dans la Section (II), nous étudions la tarification des échanges internationaux et les différentes explications possibles à l’asymétrie des méthodes de pricing. Nous commençons par un état des lieux des différentes pratiques de vente à l’international (notamment la vente dans la monnaie du pays du producteur et la vente dans la monnaie du pays de l’acheteur). Nous présentons ensuite les autres méthodes de tarification du commerce international et étudions le rôle que jouent les prix, le temps, l’information asymétrique et l’absence de marché organisé dans les décisions de prix. Nous terminons par un tableau de bord des pratiques de vente à l’international.

Notes
129.

Campa et Goldberg (2002), page 15.

130.

Le pass-through est l’expression anglo-saxonne désignant la « transmission des variations de change ».